Asadora Vol.1 - Actualité manga
Asadora Vol.1 - Manga

Asadora Vol.1 : Critiques

Asadora

Critique du volume manga

Publiée le Mercredi, 10 Juin 2020

Chronique 2 :

2020 sera une année Naoki Urasawa chez Kana, ou ne sera pas ! Auteur emblématique du catalogue seinen de l'éditeur avec Monster, Pluto ou encore Master Keaton, le maître du suspense va avoir droit, au total, à pas moins de 3 nouvelles publications chez l'éditeur cette année. Et en attendant en septembre son manga sportif culte Yawara! et son dernier recueil de nouvelles Atchoum! (initialement tous deux prévus en juillet, mais reportés suite à la situation actuelle), on peut découvrir depuis fin janvier la toute nouvelle série du mangaka, dont le 2e opus sortira d'ailleurs en cette semaine de juin: Asadora!, oeuvre qui se poursuit tranquillement au Japon depuis octobre 2018 dans le magazine Big Comic Spirits des éditions Shôgakukan, et qui compte actuellement 3 volumes.

Tout commence par d'intrigantes pages en couleurs, on ne peut plus chaotiques: en 2020, tandis que Tôkyô est en feu et que le stade olympique est sous la menace de l'incendie, une silhouette géante et cornue aux pieds monstrueux se déplace, rappelant volontiers ce que le mangaka a pu faire sur 20th Century Boys ou même Pluto... Mais comme le disent ces pages elles-même, cette histoire n'est pas celle de ce cataclysme directement, mais celle d'une jeune femme mignonne et courageuse et d'une génération, de l'après-guerre jusqu'à nos jours. Dès lors, ces quelques pages d'introduction laissent vite la place à un retour en arrière, en 1959, dans le quartier portuaire de Nagoya. Là où tout commence. Là où vit notre héroïne, Asa Asada, fillette de primaire que l'on découvre en train de courir. Elle court, court, comme si en dépendait sa vie, quitte à même aller plus vite que son ami Shôta pourtant promis à un avenir olympique, car sa mère est sur le point d'accoucher, et de donner naissance à un énième enfant dans une famille pauvre et déjà nombreuse. Mais à cet instant précis où un typhon est sur le point de s'abattre sur les environs, la jeune fille n'a encore aucune idée du tournant soudain que sa vie va prendre...

Dès les premières pages, on ressent la bonne vieille recette d'Urasawa: ce goût pour jouer un tant soit peu sur le facteur temporel, en nous présentant des premières pages chaotiques en 2020 pour mieux nous replonger à l'origine de tout 61 ans auparavant. Il ne fait aucun doute que l'un des enjeux de l'oeuvre sera de relier le récit à ces premières pages d'apocalypse, mais hormis les 3 dernières pages du tome assez intrigantes il n'est ensuite plus du tout question du "monstre cornu de 2020", mais bien d'une plongée au plus près d'une enfant dont la vie va basculer.

Car assez vite dans ce premier tome, la situation "dérape" quelque peu pour cette fillette et pas seulement pour elle, et clairement Urasawa y va crescendo dans les problèmes: une course contre la montre pour l'accouchement de sa mère, puis un kidnapping, puis un typhon laissant derrière lui un paysage de chaos, et enfin ces 3 dernières pages laissant envisager quelque chose d'encore plus grand... La recette est efficace et, dans sa gestion des rebondissements où chaque fin de chapitre amène un petit climax, agit comme un véritable feuilleton télévisé. Et ce n'est pas anodin, puisque l'auteur lui-même l'a dit: avec cette nouvelle oeuvre, il veut conter sur papier ce qui s'apparenterait à un feuilleton télévisé, genre avec lequel il a grandi, et le nom Asadora est d'ailleurs une référence directe à un feuilleton-fleuve matinal éponyme diffusé par la NHK depuis 1961.

Le récit se veut donc un brin linéaire, et après un seul tome il est difficile de prédire jusqu'où l'auteur nous emmènera... Mais une chose est sûre: on n'a pas vraiment le temps de s'ennuyer ici, et on est bel et bien dans du Urasawa. Pour son inimitable patte graphique bien sûr, avec ses designs variés et aboutis ayant tous leur petit quelque chose, sons ens de la mise en scène fluide et rythmé, et ses décors photographiques soignés et très présents (et d'autant plus appréciable qu'ils font vraiment d'époque). Mais aussi pour l'habituel petit goût de l'auteur pour immiscer ou exploiter des détails historiques. Cela passe par des petites choses, comme l'arrivée des chansons d'Elvis Presley (qu'Asa aime beaucoup) au Japon ou l'évocation des JO de Tokyo qui auront lieu 5 ans plus tard en 1964, mais aussi par des événements marquants comme le typhon s'abattant dans ce tome (le typhon Vera, qui a vraiment eu lieu en 1959, et est resté dans l'Histoire comme le plus fort et le plus meurtrier typhon à avoir touché le Japon), sans oublier toutes les références au Japon d'après-guerre, que ce soit via la pauvreté, ou via les cicatrices que la guerre a pu laisser chez les hommes à travers le cas de Haruo Kasuga.

D'ailleurs, les quelques personnages secondaires ont ici un certain charisme dès le départ: on attend de voir ce que donnera le jeune Shôta sur la longueur, Kasuga dégage beaucoup d'humanité par ce qu'il a vécu, ses faiblesses, ses cicatrices et ses moments plus glorieux, Kinuyo montre un caractère assez chouette... mais bien sûr, il y a surtout la petite Asa, qui porte à elle seule la lecture. Petit par la taille et l'âge mais déjà grande par son courage et ses valeurs, elle séduit dès les premières pages où elle n'arrête pas de courir, de foncer, puis elle ne cesse de maintenir notre attention par son côté sans cesse battant, sa volonté, et déjà une certaine maturité, elle qui regrette qu'on ne la remarque pas, qui est blasée de voir même sa famille l'oublie tant ils y sont nombreux, et qui n'aime pas son prénom banal que personne ne retient. Pourtant, il ne fait déjà aucun doute que derrière cette banalité, elle ira très loin, et que son histoire sera passionnante à suivre.

Derrière un déroulement assez linéaire, Urasawa pose donc ce qu'il faut pour promettre un récit qui devrait aller crescendo, en étant porté par une héroïne déjà captivante, le tout avec ce qu'il faut de rebondissements et d'exploitations "historiques". La suite se fera attendre avec plaisir !

Côté édition, on a du bon travail, porté par une traduction solide de Thibaud Desbief, où le langage sonne plutôt juste. Le papier est fin mais de qualité, l'impression est très honnête, et les choix de police sont convaincants.


Chronique 1 :
 
On ne présente plus Naoki Urasawa, l'auteur de mangas plus qu'appréciés comme Monster, Pluto et 20th Century Boys, dont la patte se reconnaît entre mille, et duquel on a récemment pu profiter du diptyque Mujirushi : Le signe des rêves. Dire que chaque œuvre du mangaka est fortement attendue serait un euphémisme, aussi l'annonce d'une nouvelle série en octobre 2018 avait de quoi réchauffer les cœurs.

Intitulé Asadora, ce nouveau titre est toujours en cours de parution dans le magazine Big Comic Spirits de l'éditeur Shôgakukan, le même qui a accueilli 20th Century Boys en son temps. Kana, l'un des éditeurs français emblématiques d'Urasawa, a l'honneur d'accueillir ce nouveau récit dans son catalogue, pour une parution dès la fin janvier 2019. Et à l'heure de celle-ci, deux opus sont parus au Japon, le troisième y étant prévu pour la fin du mois de février.

En 2020, Tokyo est sous les flammes. La population fuit, en panique, une monstrueuse silhouette qui se dessine derrière le feu...

Des décennies avant, en 1959 à Nagoya, un violent typhon menace le Japon, tandis qu'une demoiselle court chercher un médecin pour sa mère, sur le point d'accoucher. Fille issue d'une grande fratrie, Asa est souvent dans l'ombre de ses frères et sœurs, et sa famille ne remarque jamais sa présence. Pourtant, elle est pleine d'entrain quand il s'agit de rendre ce service, pour permettre à sa mère un accouchement en bonne et due forme. Mais tandis que la tempête se fait plus violente, Asa est kidnappée par un homme, un ancien « chevalier du ciel » aux rêves déchus. Il n'a pas mauvais fond, mais n'a pas bien agi. Une rencontre qui, au cœur du typhon, va se révéler cruciale pour les deux individus qui vont mutuellement s'entraider...

Asadora démarre de manière choc, pour tous ceux qui auraient pu expérimenter l'excellent 20th Century Boys du même auteur : une silhouette monstrueuse et menaçante au cœur de Tokyo, avant de retourner dans le passé... La démarche ne trompe pas, et une forte attente est immédiatement fixée, avec tout de même l'espère que la série ne reprendra pas exactement la même structure, dans son ensemble.

Mais le reste du volume se détache totalement de ce prologue fascinant, tout en couleur. La véritable aventure semble alors commencer, et ce sera celle d'Asa, adolescente de 12 ans vaillante, dont un typhon va faire changer le cours de son existence.

Avec ce premier opus, il est encore difficile de voir où Naoki Urasawa veut nous mener. Ce tome est celui d'une rencontre, puis d'une véritable mission sauvetage qui semble présenter l'Humanité comme notion phare de ce début de série. Car tout suinte le cœur dans ces premiers chapitres, qu'il s'agisse de la rencontre que fera Asa, où les actions qui en découleront. Naoki Urasawa apporte alors de la générosité dans la réutilisation d'une idée, celle d'une catastrophe dantesque qui frapperait le Japon, un jour.

Et clairement, Asa porte sans mal ce premier volume. La fillette est battante, débordante d'énergie et particulièrement positive. Elle ne se laisse que rarement dépasser par son émotion, et toute son énergie se révèle communicative, donnant l'envie de la suivre dans la moindre de ses actions. L'homme qui l'accompagne (et nous n'en dirons pas plus pour ne pas trop évoquer le scénario de cet opus premier), se révèle fort d'une manière différente, mais aussi touchant. Par lui, Naoki Urasawa aborde l'après-guerre, et les cicatrices qu'un tel conflit peut laisser sur un individu. Là aussi, il y a de quoi être curieux à l'idée de savoir ce que fera le mangaka de tous ces éléments.

Finalement, il y a même de quoi être surpris, arrivé à la fin de ce premier volet. L'intrigue tranche nettement de l'amorce constituée par les premières pages, si bien qu'on se demande ce que l'auteur a en tête, et comment il rattachera les wagons. Pourtant, les dernières cases viennent secouer, d'une certaine manière, nous prenant même au dépourvu. Difficile alors de ne pas réclamer la suite, tant les enjeux prennent tout à coup une allure nouvelle.

Naoki Urasawa séduit une nouvelle fois par ce début de série, aussi bien par son style toujours très marquant, que cette amorce de récit qui fixe de grandes ambitions, tout en narrant un début a priori très éloigné de sa finalité. Asadora sera un manga à juger dans son ensemble, ce qui est régulièrement le cas chez Urasawa. En attendant, ce début de série réussit son pari, à savoir donner l'envie de découvrir l'intrigue dans son ensemble, tant on veut savoir où le mangaka souhaite nous mener.

Critique 2 : L'avis du chroniqueur
Koiwai

15.5 20
Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Takato
16 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs