365 Days to the Wedding Vol.1 - Actualité manga
365 Days to the Wedding Vol.1 - Manga

365 Days to the Wedding Vol.1 : Critiques

Kekkon Surutte, Hontou Desu ka?

Critique du volume manga

Publiée le Mercredi, 17 Avril 2024

Chronique 2 :


Au tout début des années 2010, le mangaka Tamiki Wakaki perçait (notamment en France aux éditions Kana) avec la deuxième série de sa carrière: la comédie "Kami nomi zo Shiru Sekai", plus connue dans notre pays sous le nom "Que sa volonté soit faite" et à l'international sous le titre "The World God Only Knows". Pilier du magazine Shônen Sunday des éditions Shôgakukan pendant quelques années, auréolé d'une adaptation animée qui rencontra un franc succès, ce manga, malgré sa longueur qui a fini par le rendre un peu répétitif, brillait par la capacité du mangaka à offrir un humour truculent (comment oublier Elsy, l'étourdie et naïve déesse fan de camions de pompier, et ses innombrables bonnes bouilles ? ) et un joli soin accordé à une galerie de personnages tous attachants dans leur genre. Depuis la conclusion de son oeuvre emblématique en France en 2016, l'auteur restait malheureusement absent dans notre langue, bien qu'il ait conçu quelques autres oeuvres plus courte et ait participé à certaines anthologies collectives. Et il aura fallu attendre patiemment jusqu'à cette année pour enfin le revoir en France avec l'une de ses plus récentes séries: 365 Days to the Wedding, lancée en février dernier par les éditions Mana Books, désireuses d'étoffer leur toute jeune collection XOXO.

Derrière ce titre anglophone se cache "Kekkon Surutte, Hontou Desu ka?" (littéralement "Est-ce vrai que vous vous mariez ?"), une série achevée en 11 volumes, que Wakaki dessina entre 2020 et 2023 pour le compte du Big Comic Spirits, magazine seinen phare des éditions Shôgakukan. Il s'agit par ailleurs de la toute première oeuvre estampillée seinen du mangaka, ce qui nous promet d'emblée un contenu un peu plus mature, d'autant plus que le Big Comic Spirits est un magazine particulièrement qualitatif en ayant accueilli un paquet de très grands noms comme Naoki Urasawa (20th Century Boys, Asadora!, Yawara), Taiyou Matsumoto (Amer Béton,Ping Pong, Le rêve de mon père), Inio Asano (Bonne nuit Punpun, Dead Dead Demon's DeDeDeDe Destruction, La fin du monde avant le lever du jour) ou encore Keigo Shinzo (Hirayasumi, Le Jour du Typhon, Sentimental no Reaction). Qui plus est, la série a connu un succès suffisant pour être adaptée au japon en série livre en 2022, tandis que sa future adaptation animée prévue cette année devrait encore accroître sa notoriété.

Mana Books a choisi de lancer l'oeuvre en France le 15 février, soit le lendemain de la Saint-Valentin, une date qui n'est sans doute pas anodine puisque, comme le laisse bien deviner le titre, il va y être question de mariage... mais sans doute pas comme vous l'imaginez, puisque cet acte encore si souvent sacralisé par les normes de la société se voit ici abordé sous un tout autre angle !

L'intrigue prend place au sein de J.T.C., une agence de voyages qui rencontre un beau succès même si, parmi les sociables employés, il y a aussi des gens beaucoup plus solitaires. C'est le cas de Takuya Ohara, jeune homme de 24 ans qui est loin d'être un grand communicant: ayant toujours un train de retard dans les conversations, il a le sentiment de passer à côté de beaucoup de choses dans sa vie, si bien qu'il reste un éternel célibataire et que sa principale source de plaisir au quotidien est d'essayer d'apprivoiser Kama, un chat méfiant qu'il a récemment recueilli. Son quotidien est donc loin d'être dans les normes sociales, il se sent parfois un peu à la ramasse, et il a même le sentiment que sa collègue Rika Honjoji, 26 ans, le lui fait souvent sentir en le regardant fixement avec sévérité... Et pourtant, Rika est un peu son penchant féminin ! Avec son air naturellement sévère, elle donne souvent l'impression à Takuya qu'elle le fusille du regard comme si elle le détestait, mais en réalité il s'agit juste d'une femme ayant tendance à fixer les gens sans parler car elle ne sait pas quoi leur dire, ce qui leur fait un peu peur. Elle aussi autant solitaire que célibataire, elle n'a pas spécialement d'attrait pour les relations de couple, car sa plus grande passion se trouve plutôt dans la cartographie, qui illumine comme jamais son visage ! Le quotidien de ces deux-là aurait pu encore se cantonner à ça, si une nouvelle au travail ne venait pas tout chambouler: l'agence va ouvrir dans un an une succursale à Irkoutsk, au beau milieu de la Sibérie, et elle compte confier sa direction à une personne célibataire ! Ni Takuya ni Rika n'ont envie de partir si loin de leur routine qui les satisfait assez, si bien que Rika a une idée en entendant dire que les personnes mariés et ayant des enfants sont automatiquement écartées du poste: elle propose à son collègue de faire croire à toute la boîte qu'ils vont se marier ! À la base, le plan est simple: annoncer aux autres leur mariage, laisser passer quelques mois, éviter la mutation, et basta, car d'ici là tout le monde aura sûrement oublié cette histoire. Sauf qu'évidemment, absolument rien ne va se dérouler aussi facilement.

Tamiki Wakaki l'a déjà largement prouvé dans Que sa volonté soit faite: il a un don pour très vite installer des personnages à la fois truculents, amusants et attachants, et ça se confirme d'emblée ici avec ses deux protagonistes qui se font vite facilement touchants. D'un côté, ils amusent dans leurs passions à la fois simples et un peu singulières, lui pour son chat qu'il peine à apprivoiser, et elle pour sa lubie de la cartographie qui, dans un sens, nous rappelle un peu l'amour décalé d'Elsy de Que sa volonté soit faite pour les camions de pompiers. De l'autre côté, ils attendrissent et nous semblent proches de nous et réalistes dans les difficultés qu'ils peuvent avoir à bien communiquer et à socialiser... si bien que, tout naturellement, on se demande vite comment ils vont pouvoir s'en sortir dans leur petit stratagème !

Car il va de soi que leur plan pour éviter la mutation va très rapidement se compliquer, dans la mesure où ils ont négligé, eux les gens peu sociables, la sociabilité de leurs collègues qui se posent vite plein de question sur eux, jusqu'à voir la situation prendre des proportions plus grandes que prévues et à les obliger à peaufiner les choses. Ainsi arrivent vite des premiers quiproquos, des hypothèses farfelues de certains collègues sur ce mariage précipité, des doutes sur la véracité de leur relation, et même des demandes de conseils d'un collègue en matière de relation amoureuse, ce qui est un peu le comble pour Takuya et Rika ! De plus, il leur faudra veiller à la crédibilité de leur plan: faire attention à tous les détails dans le logement où ils sont censés vivre à deux, mettre au point toute une version crédible de leur histoire d'amour en allant de leur rencontre à leur décision de se marier en passant par leur lieu de premier rendez-vous... Tous deux ne s'attendaient certainement pas à devoir réfléchir aussi profondément à leur stratagème... mais qui sait, peut-être que cela sera plus bénéfique que prévu pour eux ?

En effet, à partir de tout ceci, les deux solitaires, pris en tenaille entre leurs collègues curieux et l'approfondissement de leur plan, vont forcément être amenés à faire ce pour quoi ils ont des difficultés depuis toujours: socialiser, et sans aucun doute s'ouvrir petit à petit comme ils ne l'avaient jamais fait auparavant. Bien sûr, cela concerne aussi Takuya et Rika eux-mêmes, qui vont devoir apprendre à mieux se découvrir, au-delà de la première image solitaire et froide qu'ils peuvent renvoyer, et de façon plaisante le mangaka évite pour le moment pas mal de clichés habituels sur ce rapprochement. Mieux, Wakaki entame déjà, en filigranes, une certaine réflexion de société sur le concept même de mariage, sur la manière dont il est érigé en tant que norme dans la société voire est sacralisé, et sur le sens du mariage. De belles promesses que l'on espère voir encore plus développées par la suite.

Visuellement, même si l'on reconnaît assez bien les designs made in Wakaki, on sent qu'il s'adresse à un public un peu plus mûr et qu'il a lui-même gagné quelque peu en maturité depuis Que sa volonté soit faite: offrant un rythme et un découpage plus posés ainsi que plusieurs scènes faisant dans l'économie de mots pour mieux se focaliser sur les dessins, il sait en profiter pour faire ressortir une certaine douceur ainsi que de l'attachement pour scruter ses personnages principaux ainsi que leur mode de vie. Ce qui ne l'empêche pas de quand même offrir des bouilles qui rappellent immanquablement Que sa volonté soit faite, à l'image de celles de la pimpante Natsumi !

"Le mariage, c'est si fascinant que ça ?"

On peut dire, au bout de ce premier tome, que 365 Days to the Wedding est une vraie bonne petite surprise. Sur un pitch de base qui aurait pu très vite tomber dans les clichés, Tamiki Wakaki se montre bien plus subtil que ça, en dépeignant avec soin et crédibilité des personnages d'ores et déjà attachants, et en esquissant d'emblée des thématiques prometteuses et très actuelles, notamment autour des difficultés de communication et de la place du mariage dans les sociétés normées.

Qui plus est, côté édition, Mana Books livre une copie impeccable: la jaquette reste proche de l'originale nippone tout en se parant d'un logo-titre soigné et d'un chouette vernis sélectif, le papier assez épais (bien que légèrement transparent par moments) permet une qualité d'impression très satisfaisante, le lettrage du Studio Charon est très convaincant, et la traduction effectuée par Maëva Depoilly s'avère très plaisante en sonnant juste et en collant bien au caractère des personnages.



Chronique 1 :


Tamiki Wakaki est un nom qui parlera sûrement à un certain nombre, notamment aux fans de "Que sa volonté soit faite". Manga en 26 tomes publié chez nous aux éditions Kana, le titre a aussi fait l'objet d'une adaptation animée par le studio Manglobe, elle aussi rendue disponible dans nos contrées.
Depuis, beaucoup attendaient certainement la publication de l'une des séries les plus récentes de l'artiste, à savoir "Kekkon Surutte, Hontô desu ka ?", manga publié entre 2020 et l'année dernière dans le magazine Big Comic Spirits des éditions Shôgakukan, totalisant ainsi 11 volumes. Un titre qui a eu son petit succès au Japon, en tout cas suffisamment pour permettre une adaptation en une série live de 10 épisodes en 2022, tandis qu'une adaptation animée est actuellement en cours de production.

L'attente des fans de Tamiki Wakaki fut récompensée en octobre dernier, lorsque les éditions Mana Books ont annoncé l'acquisition de la licence, pour une publication du premier volume en ce mois de février 2024. C'est précisément le 25 du mois, soit le lendemain de la Saint-Valentin, que le premier tome nous est proposé en librairies, sous le titre anglophone "365 Days to the Wedding". L'occasion de découvrir une autre des œuvres de l'artiste, et une comédie sentimentale dans laquelle une dimension sociale vient s'appliquer.

L'agence de voyages J.T.C a un cercle de salariés très varié. Parmi eux, Takuya, un homme introverti et qui peine à trouver ses mots, dont le seul vrai lien social est Kama, un jeune chat peureux qu'il a récemment recueilli chez lui. En face de lui travaille Rika Honjoji, une jeune femme de sa génération, au regard sévère, elle aussi solitaire et qui voue une passion pour les cartes routières et de voyage. Leur destin bascule le jour où l'entreprise annonce vouloir ouvrir une succursale en Sibérie dans une année tout pile, et que l'un des employés sera muté pour la gérer. Mais personne ne veut partir si loin, et encore moins Takuya et Rika. Seuls les salariés mariés sont exclus de la sélection pour un tel transfert, une information qui n'échappe pas à Rika. Croisant Takuya au détour d'un trajet, cette dernière lui propose un deal pour ne pas avoir à partir en Sibérie : annoncer un faux mariage à leur entourage. Mais tout ne se passera pas comme prévu...

C'est sur ces bases un peu naïves en apparence que débute la relation très particulière entre Takuya et Rika, deux introvertis qui vont devoir simuler un mariage, pour une situation vouée à prendre de plus en plus d'ampleur au fil des chapitres. Car malgré ce que dit l'héroïne, le lecteur n'est pas dupe : l'annonce de leurs "fiancailles" auprès de leurs collègues n'aura rien d'une information anodine, et ce sont bien leurs réactions qui placera les deux timides protagonistes dans un embarras sans cesse croissant. Dès lors, le schéma du récit semble couru d'avance, puisque des quiproquos vont se créer tandis que les deux concernés vont devoir simuler leur union sans rien laisser paraître. Un exercice simple sur le papier, mais qui sera soumis à quelques complications, notamment en fin de tome qui marquera un premier rebondissement de taille pour une telle situation.

Ce premier volume de "365 Days to the Wedding" est donc assurément drôle par ce postulat de départ, mais aussi touchant grâce à Takuya et Rika, deux jeunes adultes auxquels on s'attache sans mal grâce à leur pureté d'âme. Lui ne jure que par le matou qu'il a recueilli, et elle par ses cartes du monde par lesquelles elle aime s'évader, ce qui en fait deux profils très singuliers. Leurs personnalités amènent donc quelque chose d'assez novateur, sans compter que chacun d'eux est un éternel célibataire, et que cette fausse liaison pourrait amener quelques chamboulements sentimentaux en eux. C'est un traitement auquel on s'attend, ce qui n'empêche pas Tamiki Wakaki de faire les choses brillamment, en prenant le temps de créer des atmosphères dans les échanges entre les deux héros du récit. Par une narration qui sait se taire de tout mot, le mangaka élabore des ambiances douces et qui collent aux caractères de ces deux personnages émouvants. Dès lors, malgré un pitch qui amènera des quiproquos parfois cousus de fil blanc, on s'attache aux deux concernés, tout en étant émus par les moments qu'ils traversent.

Et en parallèle, l'auteur aborde une véritable réflexion sociétale vis-à-vis du mariage. Un événement majeur de la vie d'un adulte, certes, mais pourquoi ? À quoi bon accorder tant d'importance et une telle sacralisation à ce type d'union ? Et, surtout, pourquoi l'imposer comme une norme de société ? Par son pitch de base, les caractères solitaires de Takuya et Rika et leurs premiers échanges, ce sont tous ces questionnements qui nous sont introduits avec une certaine habilité. Forcément, on a bien envie de voir jusqu'où le sujet sera poussé, tant celui-ci est intéressant, actuel et universel.
Il en résulte donc un premier volume qui, derrière un registre qui peut avoir l'air sans surprise, séduit d'entrée de jeu, et promet une suite prenante sur plusieurs points. "365 Days to the Wedding", avec ce premier volet, est donc une belle entrée en matière.

Du côté de l'édition, Mana Books a concocté un ouvrage assez solide, que ce soit par son papier épais ou sa ravissante couverture sur papier mat qui profite d'un vernis sélectif épais sur plusieurs éléments, afin de lui donner du relief.
Assurée par Maëva Depoilly, la traduction semble sans fausse note, et le texte sait s'adapter aux tons doux des personnages et à l'humour des situations. Le studio Charon officie le lettrage qui, comme aux habitudes du collectif, est bien calibré.


Critique 2 : L'avis du chroniqueur
Koiwai

15.75 20
Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Takato
15.5 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs