Jeu Video - Actualité manga

Le test du jeu video:

Publié le Jeudi, 16 Février 2012

Un brin d’histoire avant de commencer. En 2001, la Playstation 2 avait encore bien du mal à convaincre, avec son prix fort élevé et ses jeux plus que moyens dans l’ensemble à cette période ; Beaucoup de joueurs voyaient d’un œil mauvais l’arrivée de Microsoft sur le marché des consoles avec sa XBox ; La Dreamcast ne savait pas encore qu’elle courrait inexorablement à sa perte ; et Nintendo continuait simplement son petit bonhomme de chemin, comme à son habitude. Pendant ce temps, la Playstation première du nom, dernière relique d’un âge qui commençait à tomber dans l’oubli, fredonnait doucement son chant du cygne. Et quel chant du cygne ! Les yeux voilés par les claques que furent Final Fantasy VII et Final Fantasy VIII, Final Fantasy 9ème du nom est très (trop) peu souvent cités par les joueurs parmi les grands de la saga. Et pourtant, et pourtant…

Premières secondes, premier choc : la musique d’intro du jeu, « The Place I’ll return someday », vous transportera d’entrée dans l’univers de la série et restera indubitablement gravée dans vos mémoires, à tel point qu’on prend un moment avant de lancer le jeu, pour en profiter un maximum. On entame la partie : Mon dieu, les cinématiques déchirent tout ! Quels progrès fantastiques encore depuis les précédents titres de la saga. Squaresoft (depuis devenu Square-Enix en fusionnant avec son rival de toujours) sait y faire à ce niveau, c’est indiscutable. Même en le comparant aux standards de qualité d’aujourd’hui, cet opus n’a nullement à rougir. La Playstation est à ce moment parfaitement maîtrisée et affiche une qualité d’images quasiment indémodable.

Première impression maintenant sur l’univers : à l’évidence, on en revient aux bases de la saga, c’est-à-dire une ambiance médiévale-fantastique, à base de châteaux, de princesses, de voleurs, de magiciens, de dirigeables, etc. Oubliez l’ambiance technologique assez prédominant dans les trois derniers titres, et profitez d’une ambiance plus chaleureuse et naturelle. Les textures du jeu sont splendides, même encore de nos jours, colorées, vivantes, expressives, c’est un vrai plaisir de se balader dans les villes et les différents lieux visités à travers le jeu. D’autant plus que le soft dégage une véritable identité et ne se contente pas de reprendre les poncifs propres à ce genre d’univers. Sans compter que ce coup-ci, l’équipe de Squaresoft a assuré niveau animation. Fini les manches à balai du VIII, chaque personnage une démarche propre, superbement animée, fluide et juste magique. Un vrai plaisir de simplement se promener avec nos personnages en ville.

En parlant de ballade, le rythme de l’avancée est sans temps mort, et l’un des plus fluides et des plus agréables parmi les opus de la série. Certains y verront le début de l’effet « couloir », tant décrié dans les épisodes qui suivront (le XII excepté, mais les gens ne sont décidément jamais contents…). Néanmoins, ce principe de liberté surveillée constitue avant tout un renforcement de notre implication dans le scénario, et il nous est encore largement laissé l’occasion d’explorer notre environnement pour en découvrir des items bien utiles dans notre avancée, faute de pouvoir compter directement sur des fonds importants et des boutiques à portée de main.
Et le scénario en lui-même me direz-vous ? À la hauteur du rythme. Tout s’enchaîne admirablement, les personnages se croisent, se séparent, se retrouvent, partagent leur destin et leurs angoisses. Nous sommes dans un contexte de guerres, de complots, de manipulations. Point d’élus cependant en charge de sauver le monde, simplement des personnages simples (mais travaillés) dont la destinée s’est vue malmenée dès la naissance pour certains, mais qui se redressent pour y faire face et ne pas se laisser submerger.
Le groupe de personnages principaux que nous contrôlons est sans cesse en mouvance. Par exemple, pendant que la princesse et son garde du corps se rendent au château, un autre groupe vit ses propres aventures dans un autre lieu. Le système est d’ailleurs bien pensé, puisque lors des cinématiques en temps réel, une option nous permet de sélectionner une autre cinématique nous éclairant sur les motivations ou des petits moments de la vie des personnages, ce qui donne beaucoup de vie et de corps à nos protagonistes.

Venons en au cœur de notre attachement au jeu. Un RPG culte, c’est avant un casting de folie, dont on garde le souvenir durant des années (toute notre vie ?) après avoir complété notre quête et l’avoir recommencé au moins une ou deux fois. Tristement pourtant, c’est sans doute du côté des protagonistes que la magie a moins bien fonctionné sur le grand public en termes de charisme, notion très relative soit-dit en passant. Sephiroth, Clad et Tifa sont des personnages emblématiques de FFVII, que même les non-initiés reconnaîtraient immédiatement. Il en va de même pour Squall ou Linoa dans FFVIII. Néanmoins, il faut avouer qu’à moins d’être un fan hardcore, on a tendance à oublier le nom des autres personnages en dehors du couple principal ou de nos préférés.
En ce qui concerne FFIX, le casting est bien plus balancé, chaque personnage se complète, on se rappelle de chacun car tous ont eu un rôle important à jouer dans l’aventure et dans le scénario. Il en va de même en ce qui concerne leurs capacités. Aucun n’est interchangeable et tous ont leur spécificité en termes de gameplay et d’apport à l’équipe. Djidane, le héros et le seul personnage ayant la capacité de voler les adversaires (très pratique pour débuter dans l’aventure). Bibi, mage noir dans toute sa splendeur et son look, le seul capable de lancer des sorts offensifs destructeurs. Dagga et Eiko, invocatrices maudites par le destin et anges gardiens bienfaisants de nos combats, chacune possédant ses propres chimères (noms des invocations dans cet épisode) et les seules à pouvoir utiliser des sorts de magie blanche. Steiner, un chevalier lourdaud mais puissant avec ses attaques de frappe et qui se découvre de nouveaux talents en combo avec Bibi. Tarask le taciturne, assez proche de Steiner en tant que tank, mais doté d’attaques de force particulière et capable de lancer des objets (ce qui peut faire très mal). Freyja, chevalier dragon errant, aux attaques meurtrières et capable de sauter et disparaître de l’écran. Enfin, Kweena, personnage bonus et loin d’être indispensable mais toujours sympathique à utiliser, une magicienne bleue qui peut assimiler les pouvoirs de certains ennemis en les mangeant.
Mis à part Kweena, tous fonctionnent parfaitement ensemble, et les liens qui les unissent sont palpables et font tout le charme de l’histoire.

Cependant, il faut bien l’avouer, le style graphique ne contribue pas à les rendre charismatique auprès du grand public. Conçus en Super Deformed (SD, grosse tête par rapport au corps), même durant les cinématiques les plus soignées, leur style n’a pas le même impact sur les gens que les beaux gosses et les belles filles de FFVII et VIII. D’une part parce que les seuls personnages « beaux » sont Djidane et Dagga. Les autres possèdent beaucoup de charme, mais entrent moins dans le moule des canons de beauté du grand public, qui a tendance à occulter ce style. Ce qui est extrêmement dommage, car tous (ou presque) sont une réussite en terme de chara-design et de personnalité. Dagga est sans doute mon personnage féminin préféré de la série FF dans son entièreté pour sa beauté, sa grâce et sa détermination à ne pas être qu’une princesse qui doit être protégée. Bibi est un personnage touchant de par son origine, ses mimiques et sa volonté de surmonter le poids de sa naissance. Un peu à la manière de Djidane, cabochard au grand cœur qui doit porter un lourd destin. Steiner ne pourrait être qu’un butor abruti et le comique de la bande si les événements ne l’avaient pas poussé à prendre conscience que lui seul peut décider qui est digne de recevoir sa loyauté. Eiko, à l’instar de Dagga, porte sur ses épaules un lourd héritage qui pourrait bien changer le cours du monde, ainsi qu’une grande tristesse et solitude qu’elle cache derrière des airs de peste. Tarask et Freiya, personnages aux airs sombres et qui portent leur lourd fardeau contre vents et marées, et font tout leur possible pour vivre. Même Kweena, membre plus anecdotique et de loin le moins intéressant, mais qui apporte un peu de légèreté par rapport aux autres qui en ont gros sur la conscience et ont un grand rôle à jouer dans l’équilibre de la planète.

Puisqu’on parle de thèmes et de destins, Final Fantasy IX n’est pas en reste par rapport à ses illustres aînés. Guerre et soif de conquête, pouvoir et équilibre de la nature, ce que nous sommes à la naissance ne définit pas ce que nous deviendrons, etc. On reste dans les classiques de la série, mais c'est toujours aussi bien amené, avec des variantes intéressantes et des twists qui nous accrochent et nous poussent à poursuivre sans relâche notre quête aux côtés des personnages. Il y a bien sûr une histoire d'amour entre Djidane et Dagga, mais elle est présente en arrière-plan, et ne constitue pas le cœur de l’intrigue au détriment des autres personnages, ce qui évite le syndrome FFVIII à ce niveau, et qui amène une certaine logique par rapport aux situations auxquelles les personnages sont confrontés. Car comme souvent dans les RPG nippons, les personnages font face à des événements bien plus grands qu’eux, déterminants pour l’avenir même de leur monde. La marque de fabrique des Final Fantasy, c’est simplement de s’embarquer dans une aventure qui nous entraîne au-delà de nos limites, nous fait ressentir énormément d’émotions et attaches, et dont nous ressortons avec un soulagement mêlé de joie et de tristesse d’avoir pris part à une superbe expérience et de devoir si vite la quitter.

Pour le dernier grand épisode de la Playstation, on conserve le principe de l’active-time battle comme dans les titres précédents, mais les développeurs sont revenus à des joutes à quatre personnages. Et mine de rien, le flux des affrontements trouvent un regain de dynamisme par rapport aux opus PS1 précédents. Plus tactique grâce aux capacités bien définies des personnages, plus jouissifs de par l’impression de force de son équipe, la formule renaît de ses cendres et fait de nouveau ses preuves. En matière de capacités, les personnages acquièrent bien sûr de l’expérience, comme dans tout RPG qui se respecte, mais également différents pouvoirs de support en fonction de l’objet équipé. Et si l’objet est conservé suffisamment longtemps, le personnage l’apprend définitivement. De plus, activer ces capacités demande un certain nombre de cristaux, le nombre dépendant du niveau du personnage et peuvent être redistribués à volonté selon les besoins. De cette manière, le joueur est libre de customiser l’équipement et les capacités de support de ses personnages sans tomber dans l’équipe surpuissante qui ne requiert même pas de faire attention lors des combats. Dans FFIX, même à un niveau élevé, on n’est jamais à l’abri d’une mort par défaut d’attention ou manque de préparation, nous obligeant à rester sur nos gardes en permanence. D’autant plus qu’avec des personnages qui ont leur capacité propre, il est important que le joueur lui-même fasse le choix adéquat dans la composition de son équipe, afin qu’elle corresponde le mieux à sa manière de jouer. De plus, même les personnages qui ne combattent pas gagnent un peu d’expérience, ce qui permet de changer allègrement notre groupe sans devoir se traîner un boulet pendant une trentaine de combats et varier un peu les plaisirs. Dommage par contre pour le système des transes, qui booste d’un coup vos personnages une fois la jauge remplie et débloque de nouvelles capacités, car celle-ci n’est pas contrôlable et peut se déclencher face un monstre très faible. Râlant quand on allait arriver devant un boss…

Final Fantasy IX, c’est aussi un univers riche en quêtes annexes multiples et variées pour se détendre entre deux combats et notre mission de sauveur du monde. Les chocobos sont bien sûr de la partie et servent dans cet épisode à découvrir des trésors. Ils peuvent aussi évoluer pour évoluer dans les cours d’eau, la mer, et même dans les airs ! Ils sont la clé pour obtenir les armes ultimes de chaque personnage, et aussi d’affronter le boss caché. Un type puissant, mais heureusement largement battable si on est bien préparé et qui ne réclame pas de simplement obtenir un pouvoir spécial pour en venir à bout (FF VII, si tu nous regardes…) mais bien de maîtriser le système à quatre. Pas de FF sans les mogs non plus, qui servent ici à sauvegarder nos aventures dans leur grand livre des mogs, mais aussi de facteurs. En effet, un peu à la manière d’un Zelda portable et sa quête du troc, il faut porter des missives entre mogs (on finit même par connaître leurs noms à force), ce qui bien sûr nous permet d’obtenir de nouveaux items. À l’instar de FFVIII, cet opus recèle aussi un jeu de cartes, jouable à n’importe quel moment contre n’importe qui possédant un deck en appuyant sur select. Immersif, simple et efficace, plein de suspens, il n’est pas rare qu’on fasse une petite pause de dix minutes pour tenter de les « catch’tem all ». Une quête de longue haleine, je peux vous l’assurer ! Mais qui en vaut la peine si on veut vraiment profiter à fond de tout ce que nous propose le jeu. Il y a aussi le saut à la corde, qui réclame une patience d’ange et un timing d’enfer… Bref, même une fois terminé, le monde de FFIX continue à vivre, et on y revient avec plaisir.

Je pourrais aussi vous parler des musiques, sans doute l’apothéose de la carrière de Nobuo Uematsu en termes d’ambiance, sa dernière création solo sur un Final Fantasy et son épisode préféré. La chanson thème « Melodies of life », première expérience de musique parlée dans un FF, cristallise toute l’essence de l’œuvre, sa nostalgie, son souvenir, sa force, sa joie de vivre et de ne pas baisser les bras. Le thème de Bibi est tellement entraînant qu’on traîne un peu avant de poursuivre sur le scénario au début. Le thème de la ville de Blumécia est envoûtant dans l’aspect inquiétant et triste qu’il dégage. La musique des batailles est sincèrement agréable, et fort heureusement par rapport au nombre de fois où on l’entend. De manière générale, rarement un jeu a été aussi bien pensé en matière d’harmonie et d’intégrité. Tout se tient, forme un tout homogène, parfaitement maîtrisé. On ne se rappelle pas d’une scène culte en particulier, le jeu entier est culte, tout simplement, et mérite une place dans les plus grandes réussites de la saga, et des jeux vidéos en général.

Graphismes :
Superbes, même considérant nos standards actuels. La preuve que ce n’est pas la puissance de la console qui est prépondérante, mais la façon dont les développeurs exploitent au mieux ses capacités.

Bande-son :
Inoubliables, même par rapport aux thèmes bien connus des autres opus. Nobuo Uematsu est au sommet de son art et de son inspiration, et nous a composé une OST si harmonieuse qu’elle nous rappelle le jeu pas à pas quand on écoute les CDs.

Durée de vie :
Infinie, dans nos mémoires du moins. Concrètement, une quarantaine d’heures pour enchaîner la quête principale et les 4CDs. Avec les quêtes annexes, plus du double sans problèmes, sans compter qu’on y revient volontiers.

Scénario :
Mémorable, un des plus agréables à suivre dans la série des FF. Un rythme sans faille, une histoire à la fois tragique et plein de joie, où chaque personnage a sa place et son rôle à jouer.

Jouabilité :
Infaillible, la prise en main n’a jamais été aussi aisée et intuitive. L’agencement des menus est exemplaire, et une fonction d’aide en appuyant sur select nous permet de nous y retrouver en un clin d’œil.

En résumé:
Pour toute saga, chaque personne a d’office son épisode préféré, qu’elle défendra envers et contre tout. Dans mon cas, il s’agit indubitablement de Final Fantasy IX. Souvent délaissé ou occulté par ceux qui ont joué au VII et au VIII, je le dis néanmoins haut et fort, il s’agit sans doute du meilleur Final Fantasy jamais créé, ou en tout cas du plus abouti. Tout simplement parce que peu importe l’époque à laquelle on le découvre, il reste indémodable, infaillible, insubmersible face au temps qui passe. Ce FF possède une aura particulière, loin du buzz et des chicaneries de la plupart des fans de la saga sur ce qui constitue un vrai Final Fantasy, presque intouchable dans sa tour de cristal, il représente simplement une leçon de maîtrise et de cohérence, la quintessence de ce que la série possède de meilleur à offrir. Dans un monde où il est requis de contenir un moment fort et choquant pour rentrer dans la légende, Final Fantasy IX a opté pour nous proposer une expérience forte d'un bout à l'autre de son épopée. Et ironiquement, peut-être est-ce pour cette raison que le public a moins été touché par sa grandeur et sa magnificence. Un immense épisode trop tôt tombé dans l'oubli, mais qui vivra à jamais dans les mémoires de ceux qui ont su reconnaître sa valeur et ses qualités.

Sorrow

Note de la rédaction
Note des lecteurs