TONOGAI Yoshiki - Actualité manga

TONOGAI Yoshiki 外海良基

Interview de l'auteur

A l'occasion de Japan Expo, nous avons le plaisir de rencontrer Yoshiki Tonogai, auteur de Doubt mais aussi de JUDGE, dont le second tome parait cette semaine dans toutes les bonnes librairies!

Découvrez ci-dessous le compte-rendu de notre entretien... Bonne lecture !


Yoshiki Tonogai, merci d'avoir accepté cette interview. Vous avez fait vos premiers pas en tant qu'assistant d'Atsushi Ohkubo, l'auteur de Soul Eater, puis avez ensuite débuté en tant que mangaka en dessinant Himatsubushi-hen, adaptation de Higurashi no naku koro ni. Que vous ont apporté ces premières expériences ?
On peut dire qu'Atsushi Ohkubo m'a tout appris. Il m'a appris les bases du dessin, m'a montré comment dessiner, et a surtout conforté mon envie d'exercer dans ce domaine. Je pense sincèrement que s'il n'avait pas été là, moi-même je ne serais pas là aujourd'hui devant vous.
En ce qui concerne l'adaptation de Higurashi no naku koro ni, elle m'a permis de m'écarter du shônen pure souche pour découvrir des choses plus ancrées dans le suspense. Mais surtout, cela m'a permis de constater que c'est un genre qui me plaît et dans lequel je suis à l'aise. Le fait que le scénario de Higurashi existait déjà auparavant m'a aussi permis de me concentrer principalement sur l'impact visuel, ce qui m'a offert la possibilité de progresser plus rapidement dans ce domaine.
 



Est ensuite arrivé le succès Doubt. Comment vous est venue l'idée de ce manga ?
Tout a commencé par le simple dessin d'un masque que j'ai ensuite remis à mon responsable éditorial, qui l'a beaucoup aimé. Il a alors dit qu'il fallait à tout prix créer quelque chose autour de cette illustration, et c'est ainsi que le projet de Doubt a commencé.




JUDGE, votre nouvelle série, a pour principal sujet les 7 péchés capitaux. Comment vous est venue cette idée ?
Je voulais faire quelque chose autour du jugement, et le thème des 7 péchés capitaux s'y prêtait bien, d'autant que c'est un thème assez connu au Japon. Il s'agit également d'un sujet qui apparaît de manière épisodique dans Soul Eater. Après quelques hésitations, j'ai finalement décidé de me lancer sur ce sujet.


Le fait que vous personnages portent des masques est-il important pour vous ? Cela permet-il de cacher la personnalité de vos protagonistes ?
Tout à fait. Quand, sur une couverture, on ne voit pas le visage des personnages, cela permet d'attiser la curiosité des lecteurs et de créer d'emblée un certain suspense.


C'est un peu un projet marketing, ou vous n'avez pas du tout voulu opter pour ce côté-là ?
Oui, on peut dire qu'il y a un peu de marketing là-dedans. Pour ce qui est du genre shônen, beaucoup de lecteurs choisissent d'acheter ou non un titre en regardant avant tout la couverture, et il est donc important d'offrir une première image attractive.




On retrouve dans JUDGE ce goût pour les masques d'animaux, et l'on retrouve parmi ceux-ci le fameux masque de lapin aux yeux rouges de Doubt. Y a-t-il ici un quelconque rapport de près ou de loin avec votre précédente série, ou ne s'agit-il que d'un clin d'oeil ?
En fait, vous avez raison sur tous les points (rires). Cela dit, quand j'ai conçu Doubt, je pensais faire une œuvre unique. De ce fait, Doubt se suffit à lui-même, mais depuis que l'idée de JUDGE a germé en moi, j'ai eu envie d'offrir quelque chose qui soit dans la continuité pour ceux qui ont lu Doubt, et qui soit parfaitement abordable pour ceux n'ayant pas lu ma précédente série. Pour le moment le succès est présent auprès des lecteurs, donc je ne serais pas contre la création d'une troisième œuvre du même genre après JUDGE. Mais on verra si les lecteurs suivront toujours.


On retrouve dans JUDGE le même goût pour le huis-clos, pour l'angoisse, et pour la paranoia des personnages que dans Doubt, mais cette fois-ci, les protagonistes doivent juger eux-mêmes qui doit mourir. Que souhaitez-vous apporter de plus à votre œuvre via cette nouvelle particularité ?
Je ne voulais évidemment pas faire la même chose que dans Doubt, et la nouvelle idée principale était donc cette thématique du jugement. C'est de là que découle tout.


Cette nouvelle thématique peut vous donner l'occasion de créer des personnages plus torturés et à la psychologie plus travaillée ?
C'est aussi un peu comme dans une série télévisée. Entre la saison 1 et la saison 2, il faut évidemment apporter de nouveaux éléments, de nouveaux personnages, plus d'angoisse... Plus de tout, en somme. J'ai donc apporté cette touche supplémentaire avec la thématique du jugement.


Vous parliez tout à l'heure de la classification en shônen de vos œuvres. Or celles-ci peuvent se montrer parfois assez mâtures et gores pour du shônen. Vous sentez-vous parfois obligé de vous limiter dans cette violence ?
Je fais tout de même en sorte de ne pas montrer les choses directement, à l'état brut. Par exemple, quand un personnage est décapité, je ne vais pas montrer la décapitation mais plutôt ce qui suit, le reste du corps.


Malgré tout, votre éditeur vous pose-t-il des limites ?
Il arrive que je propose une idée et que le responsable éditorial me stoppe dans mon élan. Mais cela ne me pose pas trop de problème. En effet, je suis habitué à ce genre de réticences de ma maison d'édition puisque mon adaptation de Higurashi pouvait être plus violente, et donc généralement je sais à présent jusqu'où je peux aller et quand je dois m'arrêter.


Pour le moment, vous vous spécialisez un peu dans le genre du thriller/huis-clos. Selon vous, quelle est la recette pour faire un bon titre de ce genre ?
C'est quelque chose que l'on me dit souvent, mais même si l'on a du mal à me croire, personnellement, et si JUDGE peut être vu comme tel, je ne considère pas Doubt comme une série de ce genre, mais plus comme un manga portant sur l'amour, tout ayant commencé avec la relation entre les deux héros qui est allée de mal en pis. A la base, c'était pour moi le thème principal. Je n'ai donc pas d'avis à émettre sur ce qui fait un bon thriller.


Avec Doubt et JUDGE, vous offrez des thrillers haletants, à la mise en scène très cinématographique. Avez-vous des influences dans le cinéma ?
Comme on me le dit le plus souvent, je suis évidemment influencé, surtout visuellement, par des films comme Saw, ou Seven pour JUDGE, des films dont je suis friand. Mais le film qui m'a le plus influencé quand j'ai conçu Doubt est Usual Suspects. D'ailleurs, si vous regardez les couvertures de Doubt, cela ressemble un peu à l'affiche d'Usual Suspects, avec tous les personnages alignés contre le mur. De plus, le schéma du scénario est semblable, notamment en ce qui concerne l'identité de l'assassin.




On peut dire que l'angoisse est votre thème de prédilection ! Mais envisagez-vous de vous essayer plus tard à d'autres genres ?
Je ne compte évidemment pas me cantonner à ce genre de titre. Je m'intéresse à tout, et je dois même avouer que mon genre de film préféré serait plutôt une comédie romantique comme Coup de foudre à Notting Hill (rires). Il ne faut pas m'imaginer en maître du thriller ou de l'horreur.


Alors vous ne seriez pas contre la création d'une comédie romantique à l'avenir ?
(rires) De toute façon, dans les shonen, il faut toujours qu'il y ait une petite amourette, donc je mettrai toujours un petit peu de romance. Mais dans l'immédiat, je vais déjà tâcher de terminer JUDGE, ce qui devrait me prendre encore environ 2 ans pour un total d'environ 7 volumes.


Enfin, et vous, quel est votre péché ?
(rires) Je dirais l'envie, parce que j'ai vraiment envie de continuer ce métier et de satisfaire les lecteurs.


Merci pour cette interview !


Remerciements à l'auteur, au traducteur et aux éditions Ki-oon.


Ci-dessous, l'auteur en dédicace ...