Saru - Actualité manga

Critique du volume manga

Publiée le Vendredi, 16 Janvier 2015

Tout commence par des événements inexplicables à divers lieux et dates. Une explosion venue de nulle part dans la Chine de la dynastie Ming en 1626. Une étrange lueur dans le ciel de la Sibérie centrale au début de 20e siècle. Une apparition mystérieuse dans les eaux des Malouines en 1982.


Cela continue de nos jours, avec une succession de faits qui dépassent l'entendement. A Lima, la dépouille du conquistador Pizarro semble avoir ressuscité, et en Inde c'est celle de Saint François-Xavier qui disparaît comme par enchantement. Quant à la Russie, elle voit une équipe de chercheur mettre à jour les restes d'un animal inconnu, comme une tête géante ressemblant beaucoup à un singe...


Bientôt, en Italie, un prêtre, Candido Amantini, est appelé pour l'exorcisme d'une jeune fille, Irène Béart, mais rien ne va vraiment se passer comme prévu face à cette demoiselle qui semble possédée par un esprit disant être une partie du Roi des Singes.


Dans le même temps, à Angoulême, Nana, une jeune fille ayant dans le fond de l'oeil une douleur étrange, rencontre Nawang Namgyal, un moine du Bhoutan amnésique.


Ils ne le savent pas encore, mais tous les 4 devront tenter d'enrayer une lourde menace qui pèse sur le monde : le réveil de celui que l'on appelle Sun Wukong, Son Goku ou encore le Roi des Singes n'est que le début d'une apocalypse se préparant depuis des siècles...


Après l'envoûtante fable naturaliste des Enfants de la Mer, Daisuke Igarashi revient à un récit profondément ancré dans l'ésotérisme qu'il apprécie tant, et qui n'est pas sans rappeler sa série Sorcières. S'étalant sur près de 450 pages, Saru ("Singe" en Japonais) est une oeuvre où l'auteur se fait un plaisir de réinterpréter nombre de mythes mondiaux, tels la légende du Roi des Singes, les prophéties de Nostradamus, les traités "Hermetica" d'Hermès Trismegiste, ou les reliques telles que les dépouilles de Pizarro et Saint François-Xavier ou l'Arche d'alliance. Le tout pour en faire un récit préapocalyptique saisissant de cohérence, où l'on se régale en découvrant les nombreuses interprétations qu'imagine le mangaka, notamment à travers les points communs de la figure déifiée du singe dans les différentes civilisations. Pourquoi donc le Sun Wukong asiatique ressemble-t-il tant à l'Hermès grec, au Thot égyptien ou au Tlaloc aztèque ?


Avec tant de richesse, inutile de dire que la lecture demande un peu de concentration pour tout cerner. Mais au-delà de cet énorme travail d'interprétations ésotériques, le fond de l'intrigue reste finalement assez classique, avec la réunion de quatre personnes destinées à empêcher la fin du monde et à maintenir son équilibre. Ces personnages restent d'ailleurs, dans le fond, assez creux, ils bénéficient de quelques développements, mais rien d'extrêmement poussé, juste ce qu'il faut pour servir l'intrigue.


C'est alors plutôt à un long voyage que nous convie Igarashi. Via la quête des personnages, il nous emmène aux quatre coins du monde, à commencer par les pays cités précédemment, mais les pas de Nana et des autres les mèneront aussi, entre autres, dans le dangereux Afghanistan ou en pleine Ethiopie, berceau de l'humanité. Et à chaque fois, c'est la même claque visuelle : avec son trait extrêmement fin et légèrement tremblotant, l'auteur croque une multitude de paysages et de lieux à la beauté incroyable, allant des grands espaces d'Asie Centrale à la cité d'Angoulême. L'oeuvre vaut aussi sans doute le coup rien que pour se laisser bercer par ces planches nous amenant un peu partout.


Captivant et visuellement fascinant, Saru est un récit à l'intrigue de base simple, mais enrichie par une veine ésotérique parfaitement développée. On se laisse porter avec grand plaisir par ce long voyage d'autant que l'édition de Sarbacane est impeccable : grand format, papier cartonné, traduction claire... un pavé de 450 pages de cette qualité vaut largement ses 17,90€.


Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
16 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs