Nuisible Vol.1 : Critiques

Lycéen ordinaire passant son quotidien avec ses amis, Ryoichi Takasago est troublé depuis quelque temps, car il fait régulièrement le même rêve où apparaît une jeune fille qui, derrière sa beauté profonde et envoûtante, sème la mort. Aussi, il reste stupéfait quand arrive dans sa classe une nouvelle élève ressemblant comme deux gouttes d'eau à la fille de ses rêves ! Elle se nomme Kikuko Munekata, subjugue tout le monde de par son physique hypnotique, mais reste également très distante et mystérieuse. Cela n'empêche pas Ryoichi d'être très intrigué par elle, au point que cela pourrait vite tourner à l'obsession... et mettre son existence en danger. Car l'énigmatique Kikuko ne semble décidément pas du tout normale... aurait-elle un rapport avec ce qui se déroule actuellement dans le pays ? Alors que la canicule bat son plein et que l'alerte est lancée sur la survie de l'humanité à cause des conditions climatiques, des morts inexplicables ont été observées ces derniers mois, et même les insectes se mettent à attaquer les animaux domestiques...

Masaya Hokazono est un auteur prolifique et que l'on connaît bien en France, ses oeuvres parues chez nous allant de l'excellent Inugami au décevant Freak Island, en passant par Emerging, Girlfriend, ou les recueils horrifiques Hurlements et Insomnia. Parfois considéré comme un maître japonais du récit d'épouvante, il aime aussi ponctuer ses oeuvres d'autres éléments : un léger érotisme comme dans Girlfriend, un parfum de fin du monde et des thématiques un brin écolos comme dans Inugami, un goût de mort par parasites/virus comme dans Emerging... Le scénario de Nuisible se présente un peu comme une synthèse de toutes ces thématiques.

Au fil de ce premier tome, le récit se contente surtout de poser son atmosphère à la croisée de différents genres. Tandis qu'il se passer des choses de plus en plus étranges autour de lui, Ryoichi est comme fasciné par la belle Kikuko, figure au coeur de l'oeuvre et qui, au fil des pages, va afficher des choses de plus en plus inquiétantes et au parfum de mort de plus en plus présent... A l'heure de découvrir un peu plus ce qu'est cette fille hantant ses rêves, quel choix fera le jeune garçon ? La réponse laisse deviner une bien étrange romance, qui s'installe tout doucement...
La lecture est surtout portée par cette Kikuko, assez insondable, belle, mais étrange, pouvant faire sortir une aiguille de son bras, de laisser des filaments sortir de sa bouche, et de tuer bien malgré elle au point d'en verser des larmes... L'aura de mystère reste bien présente, mais cette figure tour à tour belle, énigmatique, inquiétante, dangereuse ou fragile retient l'attention.
Autour d'elle, on attend désormais simplement que la suite poursuive bien le développement de ses autres pistes sans doute destinées à se rejoindre, entre les morts inexpliquées, les attaques d'insecte, le danger pesant sur l'avenir de l'humanité, et le rôle à venir de certains autres personnages comme le laborantin Kuzumi.

Pour cette série, Hokazono n'est que scénariste, et il a confié la partie visuelle à Yû Satomi, une artiste qui signe là son tout premier manga. Et le moins que l'on puisse dire est que pour un premier manga, elle impose une patte très intéressante et prometteuse. En dehors de contours anatomiques parfois trop relâchés, on retient surtout de constants effets crayonnés ou esquissés, très présents et du plus bel effet. Ceux-ci sont de densités différentes, parfois très appuyés ou au contraire quasiment imperceptibles, selon ce que la dessinatrice veut mettre en avant, ou pour apporter différentes impressions de profondeur, ou encore pour accentuer certains éléments en particulier (par exemple, l'ambiance de canicule avec la chaleur et le soleil rendant certains paysages flous/moins nets). Les angles de vues sont souvent recherchés, les décors extérieurs et intérieurs sont très immersifs quand il le faut, et il y a aussi de quoi rester à quelques reprises captivé par le travail sur certaines expressions faciales, en particulier les regards capables d'être très profonds (chez Kikuko en tête).

Il y a donc de très bonnes choses dans ce premier tome de Nuisible, qui ne s'emballe pas vraiment (pas encore ?), mais pose efficacement une ambiance captivante sitôt que l'on accepte de s'y plonger. Entre horreur, suspense, romance étrange et petit parfum de danger sur l'espèce humaine, ce qui s'installe promet pour la suite.