Sayonara Game - Actualité manga

Critique du volume manga

Publiée le Lundi, 07 Décembre 2020

Débarquée aux éditions Boy's Love en novembre 2018 avec le joli one-shot Un oisillon sur le rivage, la mangaka Yuu Minaduki a fait son retour dans la collection Hana un peu moins de deux ans plus tard, en septembre dernier, avec un titre assez emblématique de sa carrière. One-shot de plus de 230 pages, initialement prépublié au Japon en 2016 dans le magazine Dear+ des éditions Shinshokan, Sayonara Game est effectivement un manga qui a connu un beau succès dans son pays d'origine, au point de s'être classé 3e meilleur manga pour commencer le BL au Chil Chil BL Award 2017, d'avoir connu une adaptation en CD drama, et d'avoir vu son autrice lui offrir une suite en deux volumes (Change World, sorti en France en novembre), ainsi qu'un spin-off (Love Nest, dont le 1e tome paraîtra dans notre pays en janvier 2021).

Ikuo Arimura est un homme à qui tout réussit... ou, plutôt, à qui tout aurait dû réussir. Talentueux vice-capitaine de l'équipe de base-ball de son lycée à l'époque où il était adolescent, il attirait immanquablement le regard de la gente féminine, et cela a continué pendant les années qui suivirent, y compris dans l'entreprise où il travaille désormais, et où il est très apprécié. Mais il y a comme quelque chose de désabusé dans ses relations amoureuses qui ne vont jamais très loin, à tel point qu'il vient encore de pousser dans les bras de son rival la belle et gentille Morikawa, une collègue qui lui plaisait pourtant énormément. C'est dans ces conditions qu'il retrouve sur sa route Yôsuke Itô, jeune homme qui était son camarade au club de base-ball du lycée, mais qui était sans doute moins doué et plus effacé. Sur conseil de son vieil ami Matsu, Ikuo a sélectionné Yôsuke pour être le nouveau professeur particulier de sa petite soeur Kanna, en vue de préparer au mieux ses futurs examens. Mais tandis que, bien vite, la jeune fille craque complètement pour son nouveau prof, il s'avère que le regard de Yôsuke est tourné ailleurs, vers Ikuo, dont il a toujours été amoureux depuis le lycée...

Yuu Minaduki nous offre ici une histoire d'amour passant par plusieurs étapes, au fil desquelles ses deux personnages principaux vont devoir se capter, se comprendre, voire accepter leurs sentiments pour mieux s'aimer. Car si l'attachant, incertain et mignon Yôsuke est enfermé depuis déjà quelques années dans son amour, il en est évidemment tout autre pour Ikuo, qui n'a toujours connu que des femmes, mais dont on se demande s'il a déjà été franchement amoureux une seule fois. En plein doute sentimental, ce dernier finira même bien vite par proposer à Yôsuke de sortir avec lui, pour voir, ce qui aurait pu combler le jeune homme si...

Tout en évoquant vite et bien le passé commun des deux héros et ce qu'Ikuo a inconsciemment pu apporter à Yôsuke au point qu'il ne l'a jamais oublié, Minaduki développe tout aussi efficacement le rapport des deux hommes dans le présent, et plus particulièrement le rapport d'Ikuo au sentiment amoureux. Tout en laissant passer sa chance de plein gré avec Morikawa, celui-ci pense d'abord à éviter que Yôsuke se fasse de faux espoirs, avant de lui proposer de sortir avec lui... mais pourquoi exactement ? Il faudra une bonne remise en question d'Ikuo sur lui-même et sur ses relations jusqu'à présent pour enfin évoluer. A-t-il déjà été pleinement amoureux ? Après tout, il est déjà arrivé que les femmes avec qui il sortait n'avaient pas confiance en ses sentiments. Ce sont toujours les femmes qui se déclaraient à lui, lui se contentait de faire ce qu'elles attendaient de lui mais ne s'impliquait pas, et quand ça n'allait plus il s'en fichait... Mais avec Yôsuke, petit à petit, c'est bien lui qui semble enfin faire le premier pas dans une relation, se montrer sincère, me^me si ça part un peu mal au départ.

Et dans tout ça, on appréciera pas mal l'impact assez fort de certains des quelques personnages secondaires, en particulier de Kanna. Les rôles féminins sont parfois un peu délicats dans certains boy's love, mais ici la mangaka exploite très bien cette petite soeur en dégageant en elle un caractère bénéfique: loin de se morfondre sur son amour déjà déçu et de jalousie son grand frère, elle sera au contraire celle qui lui ouvrira les yeux sur le côté "faux" qu'il y avait dans toutes ses relations jusqu'à présent.

Visuellement, on retrouve avec plaisir le trait fin de cette mangaka. Sobre et claire voire dans son découpage, voire un peu épurée dans les décors, la mangaka se focalise surtout sur les personnages, sur les visages, sur leur expressions assez fines, qu'elle sait souligner de plus belle par des trames et encrages soignés.

Et côté édition, c'est du bon, dans l'ensemble. Le livre est facile à manipuler, avec un papier assez épais mais restant souple, tandis que l'impression est convaincante. A la traduction, Laurie Asin pourra éventuellement faire tiquer sur une chose: l'accumulation de termes japonais conservés tels quels, alors que rien ne les justifie forcément. Ca dépendra beaucoup des goûts, mais personnellement, autant je peux comprendre la conservation des suffixes tels que "-san" ou "-chan" même si à la longue ça peut devenir lourd à lire, autant garder "aniki" tel quel, je ne vois pas l'intérêt et ça me sort de la lecture. Mais à part cet élément sur lequel chacun(e) se fera son avis, la traductrice livre vraiment un bon travail, très appliqué dans la mise en avant des personnages et de ce qu'ils ressentent.

Au bout du compte, Sayonara Game est assurément un très bon récit dans son genre, en étant porté par des personnages réussis et par un abord soigné de leurs sentiments, si bien que l'on lire avec beaucoup d'attentes la suite et le spin-off de l'oeuvre.
  

Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
15.75 20
Note de la rédaction