Saving Human Being - Actualité manga

Critique du volume manga

Publiée le Mercredi, 25 Mai 2011

Parmi les auteurs de bande dessinée chinois, Zhang Xiaoyu est probablement l'un des plus prolifiques, et l'un de plus connus dans nos contrées, puisque nous lui devons déjà plusieurs oeuvres. Cette fois-ci, c'est sous le label Kraken des éditions Ankama que nous revient l'auteur, avec une adaptation du roman chinois Saving Human de Liu Waijia, le tout sous la forme d'une BD d'un peu plus de 80 pages entièrement en couleurs.

Dans un monde désertique, ravagé par la guerre, un avion s'écrase au sol. A son bord, un pilote mal en point, et un robot dont la mémoire n'a retenu qu'une seule chose: sa mission, qui consiste à sauver les hommes. Mais peut-il seulement y parvenir ? Au détour de ses rencontres avec le pilote, puis avec une mère et sa fille isolées dans une oasis pour fuir la guerre, et enfin avec les belligérants eux-mêmes, notre héros mécanique ne pourra que se résigner face à la cruauté de la réalité et de ceux qu'il est censé protéger...

Le concept de Saving Human Being est simple: un robot qui doit sauver les hommes cherche à bien faire, toujours et uniquement porté par cette mission, mais chacune de ses rencontres ne fera que l'enfoncer un peu plus dans son incapacité à sauver les humains, parfois adorables mais trop fragiles face aux dangers de la nature, à l'image de la mère et de sa fille, parfois tout simplement trop occupés à s'entredéchirer dans la guerre, s'inventant ainsi de nouveaux dangers comme s'il n'y en avait pas encore assez.

La quête initiatique du robot, qui voit lui échapper les unes après les autres les âmes qu'il est censé protéger, ne sait comment agir, puis prend petit à petit conscience du sacrifice totalement absurde qu'il devra faire pour avoir l'impression de réussir sa mission, laisse entrevoir un fond profondément pessimiste sur une humanité trop occupée à se faire la guerre pour chercher à se préserver. Le message est assez classique, mais bien mené et sublimé par toute l'innocence que dégage le corps mécanique qui sert de héros, un héros attachant à bien des égards.

Pour autant, l'ambiance générale ne se veut jamais totalement pesante, du moins pas avant les dernières pages. Le ton assez posé apporte une atmosphère résolument onirique et mélancolique encore renforcée par la beauté des illustrations de Zhang Xiaoyu, aux couleurs variées, nuancées et réalistes, sublimée par des grandes cases, voire des double-pages assez bluffantes. Une impression de pureté est dégagée par l'innocence du robot et de personnages comme la mère et sa fille, l'attachante Boya, les quelques exemples de moments heureux du quotidien du robot avec ces deux personnages renforçant aussi l'attachement que l'on peut avoir pour cette ambiance et ces protagonistes.
Face à ça, le changement assez radical qui apparaît quand le robot arrive au beau milieu de la guerre est plutôt saisissant. Là, les couleurs se font un peu plus ternes ou plus agressives sans tomber non plus dans l'exagération, et la bêtise humaine apparaît pleinement sous les yeux du lecteur quand il la compare aux bonnes intentions de ce robot qui ne sait comment réagir, ou, plutôt, qui ne parvient pas à comprendre le comportement de ceux qu'il devait protéger.

Malgré tout, si l'on entre facilement dans l'oeuvre, on regrette la rapidité à laquelle les choses se déroulent. On aurait aimé, par exemple, voir un peu plus de ces passages heureux du robot avec la petite Boya, qui peuvent ici se résumer en une page (ce que l'auteur fait d'ailleurs, en représentant de manière certes habile la mémoire de son héros lors d'une double-pages). On aurait aimé, également, voir l'auteur prendre le temps d'amener un peu mieux certains événements. Mais tout ceci ne gâche pas vraiment la lecture. Au vu du nombre de pages limité, Zhang Xiaoyu s'en sort fort bien, préférant aller à l'essentiel tout en parvenant à développer une ambiance réussie et une tristesse qui arrive tout naturellement.

Avec Saving Human Being, Zhang Xiaoyu offre un fond profondément pessimiste sur les faiblesses et absurdités humaines, le tout sous couvert d'une ambiance onirique, plus mélancolique et triste qu'accusatrice. Le tout est imparfait, certains éléments auraient gagné à être un peu plus abordés, mais l'ensemble dégage quelque chose de réellement attachant.

Du côté de l'édition, Ankama réalise un travail d'excellente facture. Format BD à la conception de qualité, impression impeccable, traduction fluide.


Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
15 20
Note de la rédaction