Golden Gold Vol.1 - Actualité manga
Golden Gold Vol.1 - Manga

Golden Gold Vol.1 : Critiques

Golden Gold

Critique du volume manga

Publiée le Vendredi, 17 Février 2023

Si l'on excepte les rééditions d'oeuvres de Suehiro Maruo en janvier, la première vraie nouveauté du lézard Noir en 2023 arrive en ce mois de février avec Golden Gold, deuxième série d'un auteur déjà connu en France: Seita Horio, mangaka que l'on avait découvert il y a quelques années chez Glénat avec sa toute première oeuvre, l'intéressant et atypique Kokkoku, qui avait même eu droit à une adaptation animée diffusée sur Prime Video. Lancée au Japon en 2015 dans les pages du magazine Morning Two des éditions Kôdansha, Golden Gold compte actuellement 9 volumes dans son pays d'origine, et a notamment été nommée aux 10e Manga Taisho Awards en 2017.

En plus d'être la première nouveauté de 2023 du Lézard Noir, la série marque également une nouvelle étape majeure dans l'histoire de l'éditeur poitevin: il s'agit effectivement de son tout premier format "de poche" standard, lui qui était habitué aux grands formats souples ou cartonnés et toujours sans jaquettes depuis presque 20 années d'existence. Et autant le dire tout de suite: pour un "coup d'essai" dans un format plus standard pour du manga, Le Lézard Noir nous offre une excellente copie, si l'on excepte quelques moirages sur certains fonds. A l'extérieur, la jaquette, en plus d'être proche de l'originale japonaise et d'offrir un logo-titre sobre, profite de sympathiques éléments en vernis sélectif (sur le logo-titre et sur de petites étoiles transparentes) et se veut bien épaisse. Et à l'intérieur, le papier épais permet une bonne qualité d'impression en plus d'être agréable à manipuler, le lettrage est propre, et la traduction effectuée par Cyril Coppini est très claire et assez naturelle, tout en étant ponctuée de quelques notes quand c'est nécessaire pour préciser certains détails.

Golden Gold nous immisce à Neijima, une petite île japonaise certes habitée, mais pas spécialement peuplée, et pas vraiment touristique, où l'une des légendes locales se limite à dire que Fukunokami, un dieu de la bonne fortune, y aurait élu domicile il y a bien longtemps. C'est sur ce petit coin de terre entourée par les eaux que vit Ruka Hayasaka, une collégienne de 14 ans, dans la maison de sa grand-mère qui gère aussi une pension et une boutique. L'aïeule de notre héroïne est d'ailleurs sur le qui-vive puisque, pour la première fois depuis très longtemps, sa pension va accueillir du monde en les personnes de Kurohashu, une romancière cherchant l'inspiration pour son prochain livre, et de son responsable éditorial Aoki ! Mais Ruka, elle, n'a pas vraiment le coeur à la fête en ce moment: la jeune fille, qui loge loin de ses parents et qui est visiblement peu sociable pour des raisons mystérieuses, a pourtant réussi à sympathiser avec Oikawa, un camarade de classe pour qui elle a secrètement un véritable béguin. Hors, le jeune garçon est voué à déménager dans un an, pour l'arrivée au lycée, chez son père à Ôsaka, un fait dont il se réjouit notamment pour pouvoir squatter régulièrement dans la boutique Animate de la grande ville, en bon adolescent un peu otaku. Bref, Ruka a forcément un vague à l'âme depuis quelque temps. mais c'est dans ce contexte un peu chamboulé qu'elle trouve, échouée sur le bord de mer, une étrange statuette abîmée, dont le bras ne tarde d'ailleurs pas à s'échapper. En suivant le conseil d'un habitant, elle finit par placer l'objet sur un petit autel d'un temple délabré, sans se douter une seule seconde des conséquences de son acte: elle a bientôt la surprise de voir cette statuette s'animer et s'immiscer dans son quotidien et dans celui de ses proches, et tout porte à croire qu'il s'agit de la fameuse divinité Fukunokami !

Il faut bien se dire qu'au fil de ce premier volume d'un peu plus de 200 pages, Seita Horio s'applique surtout à mettre en place les différents éléments de son étrange récit. Et concrètement quelle mise en place efficace ! Cela, on le doit en premier lieu aux qualités narratives et visuelles d'un mangaka qui, depuis Kokkoku qui était un peu inégale mais bourré de promesses, a largement peaufiné sa patte. C'est surtout le travail de découpage et de mise en scène qui séduit beaucoup, pour deux choses en particulier. D'un côté, le talent de l'auteur pour offrir quelques scènes délicieusement ubuesques et décalées: la double-page où la statuette s'anime, les retrouvailles avec cette statuette à la pension comme si tout était normal, et toutes les scènes où les personnages vaquent à leurs occupations à ceci près qu'il y a dans le cadre cette statuette animée avec son design réussi (à la fois un peu grotesque et inquiétant) et sa tête souvent trollesque. Et de l'autre, un travail d'ambiance très soigné: il n'est pas rare que des pages entières, via des découpages subtils, nous laissent simplement profiter des décors ultra précis de l'auteur afin de mieux nous immerger dans cette atmosphère si particulière.

En s'appuyant sur ces qualités, Horio a tout le loisir de bien nous faire entrer dans un récit qui pique beaucoup la curiosité, en particulier via ce que peut bien être exactement cette possible divinité insolite, et quelles peuvent bien être ses intentions exactes. Il faut savoir que Fukunokami (ou Fuku no Kami) est une divinité existant bel et bien dans le folklore du pays, et que l'on a d'ailleurs déjà pu croiser dans d'autres oeuvres à commencer par GeGeGe no Kitaro. Et ici, Horio, se le réapproprie pour nous en offrir une version assez nébuleuse: la statuette peut effectivement être tour à tour assez grotesque dans sa façon de squatter le quotidien d'humains comme si de rien n'était, bienfaitrice en attirant visiblement une certaine part de chance et de richesse sur son entourage... et en même temps angoissante, car elle semble facilement manipuler les gens, à l'image des habitants nés à Neijima qui la voient comme un petit homme cinquantenaire normal (contrairement à Ruka où à Kurohashu et Aoki qui, forcément, se demandent un peu s'ils n'ont pas la berlue), et surtout de la grand-ère de Ruka et de son employé Haruo qui commencent à agir bizarrement sous son influence... Et quand la romancière et son responsable essaient de le prendre en photo ou de se souvenir de lui une fois l'île quittée, impossible ! Alors, jusqu'où la statuette étendra-t-elle son emprise ?

Dans l'immédiat, une chose est sûre: un tel phénomène, ça attire forcément l'attention de celles et ceux qui en ont conscience ! Kurohashu se verrait bien profiter de la bonne fortune de cette divinité pour gagner au pachinko. Aoki, lui, imagine déjà quel scoop cela ferait auprès de son éditeur. Quant à Ruka, elle se dit surtout, en bonne adolescente de son âge, qu'elle pourrait y trouver un moyen pour mettre en place quelque chose qui inciterai son Oikawa chéri à rester sur l'île. Oui, mais quoi exactement ? Les pistes sont lancées, et on attendra avec intérêt de les voir avancer par la suite.

A l'arrivée, ce premier volume de Golden Gold est une vraie bonne pioche pour inaugurer le lancement du Lézard Noir dans des oeuvres en format de poche. Seita Horio, en tirant très bien parti de son sens de la mise en scène et de l'atmosphère, installe les premières bases d'un récit assez unique, dont les différents éléments intriguent très facilement. On attendra la suite avec une réelle impatience !


Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
16.5 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs