Fille perverse (la) - Junji Ito collection N°10 : Critiques

Junji Ito Kyoufu Manga Collection - Ijimekko

Critique du volume manga

Publiée le Mercredi, 30 Novembre 2011

Plus de huit mois après la Ville sans rue, et après quelques reports, la Fille perverse, nouveau recueil issu de l'anthologie Junji Ito, débarque enfin. Entre temps, les fans du maître de l'angoisse ont pu découvrir ou redécouvrir Spirale, son oeuvre la plus célèbre, via une belle réédition en intégrale.

On retrouve ici sept histoires publiées entre 1989 et 1994, de longueur variant entre une vingtaine de pages pour la plupart, et une soixantaine pour la plus longue, pour un total d'un peu plus de 220 pages.

Visuellement, on retrouve le trait unique de Junji Ito, son don pour croquer des personnages assez simples, élancés et élégants, mais capables à n'importe quel moment de sombrer dans un rictus emprunt de folie, le meilleur exemple étant dans l'histoire "Le coeur d'un père". Le rendu général est un peu vieillot mais sympathique, mais l'on soulignera surtout dans ce recueil, en dehors de quelques cases-choc dominées par des représentations de cadavres peu ragoûtantes, un manque généralisé de cet aspect crade, tortueux et défiant parfois toute logique qu'est souvent capable de nous offrir l'auteur.

De manière générale, c'est le don qu'a Ito pour offrir ses habituelles situations surnaturelles, invraisemblables et sorties de nulle part qui est ici en retrait. Bien évidemment, les événements inexplicables sont toujours de la partie et font leur petit effet quand ils se font présents, à l'image de morts qui réapparaissent, de personnages possédés ou de figures murales sinistres prenant vie dès que la nuit tombe, mais ceux-ci ne possèdent guère la folie à laquelle le mangaka nous a si souvent habitué.
A vrai dire, plus que les événements bizarres, glauques ou malsains qui font de temps en temps leur apparition, ce sont les personnages eux-mêmes qui, ce coup-ci, tendent à prendre le dessus pour oppresser le lecteur. En effet, dans chacune des histoires, c'est bel et bien par l'intermédiaire d'un humain que viennent les situations les plus sordides. Dans la Fille perverse plus que dans n'importe quel autre recueil de l'auteur, les héros ne sont pas en proie à la folie d'un quelconque événement incompréhensible et surgissant comme par enchantement, mais sont eux-même les principaux acteurs des horreurs qui se passent, ou sont les victimes d'un autre protagoniste.

On découvre alors une facette encore peu vue de l'auteur. De ce fait, la lecture est plaisante, mais perd malheureusement la majeure partie (pas la totalité, rassurons-nous) de ce qui fait l'originalité d'Ito : ce don pour créer des événements surnaturels fous, pour susciter la peur de l'inconnu, de l'inexplicable. A vrai dire, certaines histoires ne comportent même pas la moindre trace de surnaturel ("Scénario amoureux"). Ici, on se retrouve bien souvent avec des histoires dans le fond assez banales, souvent très prévisibles (à commencer par la toute dernière, "En terre", ou par "Le coeur d'un père"), ne laissant souvent même pas le lecteur sur ces conclusions-climax auxquelles nous a habitué l'auteur, et en prime à peine angoissantes, celle s'en tirant le mieux sur ce dernier point étant peut-être "Au fond de la ruelle".
Pour le reste, on trouvera une sorte de similitude, un vague fil conducteur entre les histoires, qui abordent toutes de près ou de loin les notions de passé, de temps qui est passé, de souvenir... cet élément jouant directement sur le comportement de certains protagonistes.

Si la lecture reste tout à fait sympathique et que l'ensemble permet de mieux voir une autre facette de Junji Ito, on constate que le mangaka n'est guère aussi convaincant ici que lorsqu'il donne libre court à son imagination pour offrir des faits soudains, inexplicables et bien plus angoissants dans leur genre. Ici, le tout reste globalement trop conventionnel.

Du côté de l'édition, Tonkam s'est à nouveau fait plaisir sur la couverture, avec un hologramme plus ou moins réussi. A l'intérieur, on retrouve un papier de bonne qualité, une traduction correcte, mais un ou deux tout petits problèmes de lettrage et à nouveau des notes un peu étranges (une explication sur le mot "gendarmerie"...).


Koiwai


Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
13 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs