Jeu Video - Actualité manga

Le test du jeu video:

Publié le Mardi, 10 Avril 2012

Quatre ans après sa sortie japonaise en 1999, l’opus Forbidden Memories de la saga Yu-Gi-Oh ! parait en France, à une époque où la licence bat son plein et où la PsOne est en fin de vie. Avec quatre années d’écart entre les deux sorties, on peut craindre un certain retard technique. Pourtant, Konami a su tirer son épingle du jeu, de manière assez inattendue.

Dans Forbidden Memories, le joueur incarne un prince de l’Egypte Antique. Plutôt que d’écouter son précepteur Simon Muran, il préfère s’échapper régulièrement du palais royal pour retrouver ses amis Jono et Teana et jouer aux cartes en ville, déguisé comme un simple paysan. Le jeu de carte auquel joue le prince est au centre de toutes les attentions. Des grands intellectuels comme Simon Muran au simple civil, tout le monde y joue. Y compris les grands prêtres. L’un d’entre eux, Heishin, a découvert comment contrôler les forces des ténèbres grâce aux objets millénaires, de puissants artefacts magiques, le puzzle millénaire étant détenu par le prince.
Après un étrange rituel religieux, les prêtres attaquent le palais pour dérober les objets millénaires et accéder au pouvoir, avec à leur tête Heishin secondé par le jeune Seto. Au terme d’un duel de carte, qui matérialise la puissance mystique des joueurs, le prince réussi à contrecarrer le plan d’Heishin en cassant le puzzle millénaire. Son esprit et celui de son précepteur Simon sont ainsi faits prisonniers du puzzle, jusqu’à ce qu’un certain Yûgi réussisse à reconstituer ce puzzle.

Le jeu se déroule en trois grands arcs : la partie introductive sus-citée, en Egypte, le tournoi de Duel de Monstre, se déroulant dans le présent avec Yûgi, et enfin la partie finale avec un retour en Egypte ancienne. Le scénario tel qu’il est présenté est assez étrange. Afin de saisir qui est qui, qu’est-ce qui fait référence à quoi, il faut connaitre un minimum le manga original ou l’anime. Cependant, ce n’est pas une nécessité absolue. Mais on a quand même l’impression que ce scénario bizarrement construit a été créé afin d’offrir une histoire ressemblant de loin à l’originale pour justifier aux fans de pouvoir jouer au JCC Yu-Gi-Oh ! dans un jeu vidéo.

Car en effet, ce qui frappe avec le recul, c’est que le jeu est sorti en 2003 chez nous, en 1999 au Japon, et on retrouve des éléments de l’intrigue de Yu-Gi-Oh ! qui n’avait même pas encore lieu dans le manga, comme le retour en Egypte, la présence de Simon Muran,…Même si au final, l’intrigue du manga est plus complexe, avec des antagonistes et des intervenants différents.
Bref, le scénario est, grosso modo, un ersatz de l’intrigue de départ, en simplifié, mais surtout en avance sur son temps, et ça, ça avait le mérite de titiller la curiosité des fans de l’époque, voire de les faire rêver.

Mais au fond, ce n’est pas le scénario qui compte tellement ici. Car Yu-Gi-Oh ! reste Yu-Gi-Oh !, on attend surtout des duels de carte épique. Contrat rempli ? Oui, même si le gameplay ne plait pas à tout le monde.

Ce qu’il faut d’abord noter, c’est que les séquences de dialogue, très nombreuses, se font comme les visual novels, c’est-à-dire que les silhouettes des personnages apparaissent et qu’il faut sélectionner la réponse à leurs questions pour faire avancer le scénario. Il n’y a pas à faire avancer un personnage modélisé. Mais le cœur du jeu concerne quand même les duels. Le JCC tel qu’il est décrit dans le manga ou dans l’anime (hors GX et 5D) était une ébauche de jeu de stratégie irréalisable en vrai, car faisant trop appel à des conditions subjectives (ce qui arrangeait les scénaristes, bien évidemment). Les développeurs du JCC réel ont alors rendu les règles plus techniques. C’est les règles de ce jeu qu’on trouve dans les jeux de la licence depuis bien des années, comme dans Spirit Caller ou les World Championship.

Mais à l’époque de Forbidden Memories, ce n’est pas le cas. Les développeurs du jeu ont d’ailleurs arrangés le JCC de manière très étrange. Ici, le jeu repose sur la force brute principalement. Les pièges et les magies n’ont pas beaucoup d’utilité, l’aspect stratégique passe donc à la trappe. Et comme l’achat de bonnes cartes est irréalisable dans le jeu (qui demanderait un nombre infini de parties gagnées pour une seule carte !), le joueur va tout axer sur le principe de fusion, qui consiste à mélanger des cartes de types définis pour en obtenir une plus puissante. Les premières parties sont difficiles pour les habitués du JCC tant le jeu semble limité. Et pourtant, ce principe d’utiliser principalement la force brute associés aux effets dynamiques de la table de jeu offre des parties où on ne s’ennui pas. Il est même possible de visualiser les monstres qui s’affrontent. Ca aurait pu être une composante grandiose du jeu, malheureusement, on a juste l’impression que ça a été fait à la va-vite. Entre les créatures très moches et le fait que ça casse le rythme (l’animation n’étant pas déclenchée automatiquement, il s’agit juste d’une cinématique bonus), il vaut mieux oublier.

Par contre, un réel problème du jeu, c’est une difficulté extrêmement ridicule. Les premiers affrontements sont relativement faciles, mais dès le troisième match du tournoi dans le présent, mieux vaut avoir intelligemment construit son deck avec la possibilité de pouvoir toujours exécuter des fusions. Car, par exemple, l’adversaire des quarts de final envoie parfois dès le premier tour une créature à 3500 points d’attaque sans fusion, ce qui est énorme. Finalement, le battre relève un peu de la chance. Si le joueur a les bonnes cartes mais pas l’ordinateur qui gère l’adversaire, c’est possible. Mais devoir compter sur la chance dans un jeu à la base stratégique, c’est particulier quand même. Mais les parties les plus difficiles apparaissent dans le troisième arc. Il y a fort à parier que beaucoup joueurs ont commencé à jeter à l’éponge à ce moment. Et c’est là qu’on se dit que le Joueur du Grenier pourrait faire un test marrant avec des remarques sur la difficulté.

Mais là où le jeu excelle, c’est l’ambiance qu’il dégage, une ambiance qu’on n’a pas l’habitude de voir, nous occidentaux, parmi les jeux qui sortent dans nos contrées. Déjà, l’aspect visual novel est assez rare. Mais surtout, l’original soundtrack est unique. A vrai dire, cette remarque s’applique à tous les jeux Yu-Gi-Oh ! de Konami. Les compositeurs ont su imprégner les jeux de la licence d’une identité musicale particulière. Dans Forbidden Memories, on apprécie la diversité des thèmes, notamment entre le côté antique et le côté futuriste du deuxième arc. Cela dit, l’OST est tellement particulière qu’elle ne plaira peut-être pas à tout le monde.

Graphisme :
Les scènes de dialogues présentent des graphismes assez basiques. Les décors ne sont pas très recherchés, les silhouettes des personnages sont très fidèles aux originaux, et le design des personnages inédit est intéressant, notamment Heishin. Seule l’animation des créatures lors des duels pose vraiment problème.

Bande-son :
Très spéciale mais unique. Dynamique, avec des sonorités orientales pour les passages en Egypte et électro pour le tournoi du présent. Les thèmes contre des adversaires puissants comme Heishin et Kaiba sont parfaitement épiques.

Durée de vie :
Difficile de chiffrer en heure le jeu. Quand on regarde le découpage, on s’aperçoit que ce n’est pas forcément très long. Mais le jeu est tellement dur par moment qu’on peut délayer les parties dans le temps et finalement ne pas se rendre compte de sa longueur. D’autant plus qu’il y a un mode Duel hors campagne pour amasser des étoiles ou des cartes, ce qui rallonge forcément l’intérêt du jeu.

Scénario :
Assez simple, un peu onirique. Il est question de magie, d’ancestralité, de mysticisme… Mais en réalité, c’est assez linéaire. On ne donne pas de but au joueur au départ. Du coup on se contente d’avancer sans trop savoir qu’elle doit être la conclusion. Reste que l’ambiance du jeu est vraiment intéressante.

Jouabilité :
Pendant les duels, la sélection et l’action des cartes est facile et dynamique, les règles du JCC parfaitement abordables pour un débutant. Honnêtement, chapeau. Parce que tel que le jeu était présenté, on pouvait s’attendre à pire, et c’est pourtant très prenant.

En résumé :
Yu-Gi-Oh ! Forbidden Memories est une réussite. Pas un excellent jeu, pas un mauvais jeu, juste un jeu qui peut plaire, y compris à ceux qui n’accrochent pas plus que ça au manga. Et cela grâce au parti-pris de simplifier les règles pour rendre duels plus dynamiques et une ambiance toute particulière.
Après l’échec cuisant que fut Duel des Ténèbres en terme de qualité, on tient là un jeu d’un tout autre niveau.


Chroniqueur: Raimaru


Note de la rédaction