SHIITAKE - Actualité manga

SHIITAKE しいたけ

Interview de l'auteur

Découvrez ci-dessous le compte-rendu de notre entretien avec Shiitake, la sympathique dessinatrice de Kaguya: Princesse au Clair de Lune, qui est venue rencontrer ses fans français à l'occasion de Japan Expo.


 
 
Manga-news: Comment êtes-vous arrivée dans le milieu artistique ? Etiez-vous intéressée par ce milieu depuis longtemps?
Shiitake: J'aime dessiner depuis toute petite, comme la plupart des enfants. Mais je ne dessine une page entière d'illustration que depuis le lycée. Lors d'une exposition qui a eu lieu dans une bibliothèque de ma région pour fêter la remise des diplômes du lycée, mes travaux ont eu beaucoup d'échos auprès d'un public assez large. Après des études supérieures, j'ai décidé de m'investir dans le dessin.


Comment est née votre collaboration avec nobi nobi ! et Alice Brière-Haquet pour Kaguya, princesse au clair de lune ? Qu'est-ce qui vous a séduit dans ce projet ?
nobi nobi ! m'a proposé d'illustrer un conte traditionnel ou une histoire originale. J'ai donc choisi le plus ancien et le plus connu des contes japonais, La Princesse Kaguya. L'idée que mon style graphique colle bien à l'image de Kaguya et l'envie de partager avec les enfants français une histoire fantastique et intrigante ont été mes principales motivations pour ce projet.

Avez-vous rencontré directement nobi nobi ! et Alice Brière-Haquet pendant l'élaboration de vos illustrations, ou tout s'est-il fait à distance ?
Je n'avais jamais vu ou contacté Alice pendant l'élaboration du livre. C'est lors des séances de dédicaces à Japan Expo que nous nous sommes rencontrées pour la première fois.




Avant Kaguya, aviez-vous déjà travaillé sur des illustrations destinées à un public majoritairement enfantin ?
Je ne me suis jamais préoccupée de viser un public en particulier à travers mon travail, mais il est vrai que les enfants apprécient beaucoup mes illustrations originales qu'ils voient lors des expositions.


Kaguya, princesse au clair de lune est votre premier album illustré, mais avez-vous déjà d'autres projets dans le domaine des albums illustrés ? Avec nobi nobi ! ?
Je ne sais pas encore. Comme mon activité principale se concentre autour de mes illustrations originales pour mon association Gensôdô, j'espère pouvoir continuer à mener des projets en parallèle avec nobi nobi ! selon les plannings.


En dehors des albums illustrés, avez-vous d'autres projets actuellement ?
En ce moment, je suis dans une période de préparations de plusieurs choses, mais j'ai en effet des projets assez avancés.


Que vous a apporté la collaboration sur Kaguya, au niveau du gain d'expérience ?
C'était la première fois que je travaillais sur un livre, que je devais rendre un si grand nombre d'illustrations et que je collaborais avec des personnes à l'étranger. Tout était nouveau pour moi. Je n'étais pas habituée à suivre un récit, mais j'ai pu réussir avec le chaleureux soutien de ma famille et les conseils de nobi nobi !


 
 
On sait que vos travaux sont régulièrement exposés au Japon. Aussi, auparavant, aviez-vous déjà publié des œuvres au pays du Soleil Levant ? Si oui lesquelles ?
J'auto-édite mes recueils d'illustrations Gensôdô et les mets en vente dans les salons mangas ou des expositions qui ont lieu à Tôkyô, Ôsaka ou Fukuoka.
Mes artbooks sont également disponibles en France sur le site Gensôdô official store.


Les illustrations de Kaguya possèdent des couleurs très nuancées, dégagent beaucoup de féérie et de mystère, les personnages sont élégants, ancrés dans un Japon traditionnel, et possèdent un charme posé typiquement japonais. A travers ces illustrations, quelle ambiance avez-vous cherché à privilégier avant tout ? Quels aspects du conte d'origine souhaitiez-vous faire ressortir le plus ?
J'ai tenu à garder intact le mystère qui émane de Kaguya et l'atmosphère fantastique du conte, tout en gardant à l'esprit qu'il me fallait ajouter ma touche personnelle. J'ai particulièrement travaillé sur les vêtements que porte Kaguya sur la couverture et la dernière page du livre, qui sont des designs originaux.


Votre présentation à la fin de l'album Kaguya nous apprend que vous aimez particulièrement dessiner les jeunes filles et les fleurs. Pourquoi ce goût en particulier ? D'où vient-il ?
Depuis toute petite, j'adore dessiner des jeunes filles et j'éprouve une fascination particulière pour les princesses, les anges ou les fées. J'aime aussi ce qui est mignon comme les fleurs, les pierres précieuses et les gâteaux. Je suis éprise des belles choses, alors je les associe dans mes illustrations.


Y a-t-il d'autres types d'illustrations que vous aimez particulièrement réaliser ?
S : Je dessine des doujins par passion. Un jour, un personnage du jeu vidéo Tales of Destiny a volé mon cœur (rires), et depuis, j'ai crée un site de fan: Tales no yakata (le manoir de Tales)
Je dessine beaucoup de personnages masculins sur ce site, ce que je ne fais pas d'habitude...
 



Des influences particulières ? Artistes (japonais ou non) de tous bords qui vous ont marquée ?
Dans les artistes qui m'ont le plus marqué, il y a d'abord Alphonse Mucha qui réalise de magnifiques dessins de femmes dans une situation donnée avec des détails minutieux. Puis, Cicely Mary Barker qui dessine des illustrations de fées des fleurs qui semblent réelles. Et pour finir Mutsumi Inomata qui m'a ensorcelée avec son charadesign de Tales of Destiny (rires).


Quels outils utilisez-vous pour réaliser vos illustrations ?
J'effectue mes tracés avec un portemine, l'encrage avec un portemine 0,3mm, un marupen (plume pour les lignes fines) et un stylo de 0,3mm. Je colorise à l'ordinateur avec les logiciels SAI et Photoshop 7.0 et à la main avec des copics et de l'aquarelle.


Pourquoi le pseudonyme Shiitake ? Nous savons que cela vient d'un surnom donné à l'école primaire, mais peut-on avoir quelques précisions supplémentaires ?
En 6ème (l'école primaire au Japon compte une année de plus qu'en France ndlr), j'avais décidé que nous nous appellerions par un surnom qui ne serait compris que par les personnes de ma classe. On a décidé que ces surnoms seraient basés sur les champignons.
J'étais "Shiitake", il y avait aussi "Matsutake" (champignon des pins), "Shimeji" (tricholome) et "Enoki"(micocoulier). Mais en fait il n'y avait personne qui m'appelait "Shiitake".
Et lorsque j'ai dû décider de mon nom d'artiste, j'espérais que si je me nommais Shiitake, d'autres personnes allaient m'appeler comme ça. Je me le suis donc réapproprié. Et me voici aujourd'hui !


Remerciements à Shiitake et aux éditions nobi nobi!

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Japan Expo 2013 accueillait une nouvelle fois Shiitake, talentueuse illustratrice qui participait volontiers à des dédicaces de ses livres Kaguya, princesse au clair de lune, Yôsei, dans le secret des fées et Yôsei, le cadeau des fées, sur le stand des éditions nobi  nobi !, entre deux dessins sur son stand Gensodo. Si nous l'avions déjà rencontrée il y a deux ans, nous sommes retournés avec plaisir à la rencontre de cette sympathique artiste, qui a accepté avec le sourire de répondre à nos questions sur Yôsei, sur son style, sur Gensodo, avec en fin de tableau des réponses étonnantes au sujet de sa passion dévorante pour la saga de jeux Tales of !
 




Shiitake, c'est un plaisir de vous interviewer une nouvelle fois. Il y a deux ans nous vous avions déjà posé des questions pour la sortie de Kaguya,  princesse au clair de lune, et depuis du chemin a été parcouru, avec notamment la sortie des albums Yôsei. Comment est né le projet Yôsei ? Qu'est-ce qui vous a séduite dans ce projet ?
Shiitake : Il faut faire un petit bond en arrière : au moment où nobi nobi ! m'avait proposé de faire Kaguya, il y avait un mauvais timing, je ne pouvais pas le faire tout de suite et il a fallu décaler ce projet. Puis Kaguya est sorti, et pendant qu'il se taillait son succès de mon côté j'ai commencé à réfléchir à une nouvelle collaboration, et j'ai vu avec nobi nobi! pour faire un projet utilisant plusieurs de mes illustrations déjà publiées dans mes premiers artbooks. nobi nobi! ayant envisagé une œuvre sur le thème des fées, cela correspondait parfaitement à mes illustrations.


Comment s'est déroulée la collaboration avec Alice Brière-Haquet, l'auteur des poésies des deux albums Yôsei ?
J'ai beaucoup aimé la collaboration avec Alice, tout s'est très bien passé. En premier lieu il y a eu mes illustrations, et ensuite Alice a écrit les textes en s'inspirant de mon travail. Elle m'a dit adorer mes dessins et avoir puisé beaucoup d'inspiration en les regardant, donc tout collait parfaitement. Les textes d'Alice se sont très bien adaptés à mes illustrations. D'ailleurs il n'y a pas eu besoin de réelle coordination entre nous : tout s'est fait naturellement du premier coup.


Donc on peut dire que les illustrations étaient déjà choisies avant l'écriture des textes ?
Oui, c'est ça. Les illustrations ont été choisies avant les textes, et aucune n'a été changée après l'écriture. C'est Alice qui s'est adapté à mon univers, avec beaucoup de talent.


Quels ont été les plus importants critères de sélection des illustrations ?
C'est nobi nobi! qui a choisi les illustrations. De mon côté je leur ai fait parvenir mes artbooks pour qu'ils aient une vue exhaustive de mon travail. Ils ont surtout sélectionné les dessins les plus féeriques mais sans être redondants, pour avoir à la fois un ensemble cohérent mais varié à la fois (dans les couleurs, les poses...).

 


Depuis deux ans et la découverte en France de votre travail avec Kaguya, est-ce que votre façon de faire des illustrations a évolué ?
Je pense que sur Kaguya je n'étais pas très douée pour faire sur la longueur le même visage, à chaque fois je voyais des petites différences dans ma façon de dessiner les visages des personnages. C'est un problème que je n'avais jamais rencontré auparavant puisque je me contentais d'artbooks, où donc chaque illustration présente un nouveau personnage. J'espère avoir progressé sur ce point.
S'il y a une évolution je pense que c'est plutôt dans les thèmes. J'avoue qu'à mes débuts et à l'époque de Kaguya je n'avais pas autant d'excitation qu'aujourd'hui. J'étais enchantée de faire des illustrations, mais c'était moins bouillonnant en moi, alors qu'aujourd'hui j'ai en tête plein de nouvelles idées et des thèmes que j'ai envie d'aborder. Par exemple, récemment j'ai fait un livre sur les champignons, un thème qui m'inspirait beaucoup.


A présent, revenons sur Gensodo, votre marque. D'où vient-elle ? Vous appartient-elle ?
Gensodo, c'est d'abord le nom de la page d'accueil de mon site internet. "Genso" signifie "imagination" et "do" signifie à peu près "temple, espace où il y a des gens", donc Gensodo, c'est le temple de l'imagination, de la fantaisie. C'est effectivement ma marque, elle est à moi.


Ce que vous faites au sein de Gensodo est très varié : on trouve des dessins sur shikishi, des éventails, des posters, des lithographies, des artbooks... Est-ce que la conception de tous ces produits vous suffit pour vivre, ou alors faites-vous encore d'autres choses à côté ?
En ce qui concerne ces goodies, il y a avant tout une sorte de roulement : sur les salons j'arrive à bien les vendre, et j'utilise l'argent gagné pour réinvestir dans les déplacement suivants, pour payer le transport, l'hôtel, les frais en convention... A chaque fois il reste un peu d'argent, mais ce n'est pas suffisant pour vivre.
En dehors de tout ça, je fais donc beaucoup de freelance au Japon, par exemple des packagings pour des boîtes à saké, des bouteilles de saké, des boîtes de puzzle, des DVDs... Tous ces projets freelance, qui sont plus importants et donc rapportent plus, me permettent de vivre, d'autant que je n'en garde pas les droits et que je les fais à domicile.
    
 
 
En dehors de la France, participez-vous à d'autres salons au Japon ou dans d'autres pays ?
Au Japon, je fais le Comic Market (Comiket) qui est le plus grand salon au monde sur l'univers des mangas. Ensuite il y a Comic City qui se passe à Tôkyô, Osaka et Fukuoka. Je vais aussi au Comitia à Tokyo. A Taiwan je suis présente au Comic World, et je participe au Genki Matsuri à Hanoï, au Vietnam. Il y en a aussi plein d'autres, de moins grande envergure.


Avez-vous déjà d'autres collaborations prévues en France avec nobi nobi! ou d'autres éditeurs ?
Il y a eu pas mal de discussions de projets. Avec nobi nobi ! il n'y a rien de prévu dans l'immédiat, mais j'ai très envie de faire un nouveau livre avec eux, je vais leur en parler. J'ai également très envie de poursuivre ma collaboration avec Aoji.


Il y a deux ans vous nous aviez parlé de votre passion pour le jeu Tales of Destiny, et de votre site Tales no Yakata (http://talesny.web.fc2.com/) où vous proposez des travaux comme des doujin sur Tales of Destiny, entre autres. Pouvez-vous nous présenter cette autre facette de votre travail ?
(En entendant les mots "Tales of", le visage de Shiitake s'illumine.)
Aaah ! En fait, ce site a été créé bien avant Gensodo, et c'est avec lui que j'ai commencé à faire des goodies, en proposant des doujin sur Tales of Destiny. C'est après ça que j'ai commencé à faire mes propres goodies basés sur mes illustrations. C'est d'abord parce que j'étais passionnée de Tales of que j'ai ensuite eu envie de créer Gensodo. Mon inspiration est née grâce à Tales of.
Car je suis une grande fan des jeux Tales of ! Pour vous donner une anecdote, le premier jour de mon installation à Japan Expo cette année, après avoir monté mon stand j'ai fait un petit tour sur le salon et je suis passée sur le stand de Namco Bandai. Il y avait le doubleur d'un des personnages, ça m'a rendue folle !
 
Straps Tales of créés par Shiitake.
 
 
Vous avez vu la mini exposition sur Tales of sur le côté du stand ?
(les yeux de Shiitake s'écarquillent)
Oh non, je ne l'ai pas vue ! Vite, il faut absolument que j'aille voir ça ! Merci pour l'information !
Ma passion pour Tales of a commencé en 2004 quand j'étais au collège. J'ai commencé à faire des goodies dessus en octobre 2004. A cette même époque j'avais déjà commencé à créer quelques fondements de Gensodo mais c'était très minime. Gensodo a commencé en réellement en mars 2005. Ensuite, j'ai fusionné les deux, mais quand j'ai voulu participer au Comiket en 2011 j'ai dû les séparer à nouveau, car le Comiket est sectorisé : il y a d'un côté les créations originales, et de l'autre les créations inspirées d'oeuvres déjà existantes. A cette époque, je faisais les goodies avec une amie fan elle aussi de Tales of. Pour pouvoir aprticiper au Comiket j'ai géré mon stand avec ma marque Gensodo, et elle a pris en charge le stand sur Tales of.


Vos travaux sur Tales of sont d'un style très différent de ce que vous faites avec Gensodo. Entre ces deux styles, votre façon de travailler change-t-elle ?
C'est totalement différent et séparé (rires). Comment dire...
Ce sont des inspirations différentes : Gensodo c'est tout ce qui est très pur et beau, c'est là que vous aurez les jolies jeunes filles toujours souriantes et heureuse. Mais je suis comme tout le monde : il y a des jours où ça ne va pas forcément, il y a des idées un peu tristes qui peuvent arriver, plus obscures, et cela m'inspire plutôt pour Tales of. Dans ma tête, il y a à peu près 10% de Gensodo, et 90% de Tales of. Les gens qui voient mes travaux sur Gensodo puis Tales of sont très surpris, car il y a un grand écart entre les deux (rires).


Remerciements à Shiitake, à son interprète, ainsi qu'aux éditions nobi nobi !.