Levius Vol.1 - Actualité manga
Levius Vol.1 - Manga

Levius Vol.1 : Critiques

Levius

Critique du volume manga

Publiée le Jeudi, 19 Janvier 2017

Critique 2


Dingue… complètement ouf et abjectement swag… voilà les quelques bribes ou interjections qui pourront être, à la lecture de ce premier ouvrage, murmurées, voire soufflées… Mais qu’est-ce donc que cette série apostrophée d’un préfixe en « us » ? Levius…

En cette nouvelle ère de la grande vapeur, une vaste guerre aura laissé pour orphelin le jeune et un brin traumatisé Levius Cromwell : alors qu’il n’avait que douze ans, il perdit son bras droit, son père fut abattu et sa mère sombra dans un coma sans fin… Depuis les cendres de ce conflit insensé émergera le nouveau sport international à la mode : la « boxe mécanique ». Faut dire qu’il y eut une révolution scientifique et industrielle de taille, laquelle fut initiée par un petit génie. Bref, est née, ce que l’on appellera, pour le moment, la « grande vapeur » : elle alimente toutes les nouvelles technologies, mais aussi, par accessoire… les humains… eux qui mécanisent désormais leur corps, s’agrémentent de bras bioniques et de prothèses de métal en tout genre à l’aide de cette force motrice… cette puissance provenant d’une  mystérieuse vaporisation…

Levius est un des plus grands champions du milieu de la boxe mécanique : gladiateur des temps futurs et icône steampunk-beau-gosse d’un univers à la fois fantastique et un zeste post-apocalyptique. Les participants sont classés parmi cinq catégories. La première catégorie rassemble les plus grands combattants… le gratin… pour ainsi dire des sortes de demi-dieux : ce cercle très fermé comporte treize athlètes. Levius est un boxeur de deuxième catégorie et figure en septième position au sein de celle-ci : à ce stade, ledit Sieur Levius Cromwell demeure d’ailleurs invaincu ; aussi, cela paraîtra fort logique dans la mesure où les duels dans l’arène grandiloquente se soldent, quasi-systématiquement, par la mort de l’un des gladiateurs qui n’aura point eu le temps de déclarer forfait : les coups portés à renfort de grande vapeur sont d’une violence incommensurable ;… Un machin de barge…

Des personnages et quelques intrigues habilement dépeints, à l’aune d’enjeux concrets et de rêves féconds… Depuis son plus jeune âge, Levius fait des dessins qui, le temps s’écoulant, viennent, d’une certaine manière, à se réaliser ; ainsi, si rien ne semble pouvoir extraire sa mère du coma, il avait pu esquisser un de ses combats avec, pour spectateur, dans les tribunes, sa maman. C’est pourquoi Levius continuera, encore et toujours, au péril de sa vie, ce sport d’une violence extrême et sans pareille : l’espoir chevillé-au-corps que, un beau jour, sa mère puisse réellement apparaître parmi cette foule qui l’acclame. Levius, après la guerre, fut recueilli par son oncle, le fameux Zack Cromwell… sacré personnage d’ailleurs : rongé par les remords, en proie a des sentiments maladroits et adeptes inconscients d’un humour bavard… Aussi, comme tout champion qui se respecte, Levius est suivi et assisté par un ingénieur qui veille à l’état de son matériel de combat : Bill, un réputé parmi les réputés. 

Un des treize gladiateurs de la première catégorie vient de rendre l’âme : une place est désormais libre dans ce petit monde très prisé. Un duel est organisé par la fédération pour sélectionner celui qui pourra accéder au trône fraîchement libéré : Levius sera choisi pour affronter le numéro un de sa catégorie : le monumental Hugo Stratus : ce mec est une bête… L’affiche aura de quoi faire saliver ;… L’auteur fait miroiter bien des choses avant d’offrir un petit retournement de situation fort bienvenu, lequel débouchera, jusque dans les dernières pages du volume, vers une nouvelle intrigue, laquelle participera hautement à élargir les horizons de la série.

L’édition de la collection « Big Kana » offre une lecture allègrement cool : il pourra être considéré que, pour un tel prix  et dans la mesure où l’impression n’a point eu lieu dans l’hexagone, il devrait être attendu davantage, mais cela demeure assez cool voire superbe dans l’ensemble : format, papier et ancrage permettant la délectation des planches ; pages couleurs en début de tome et couverture du plus bel effet : un régal. Bref, une édition d’une rare qualité en dépit d’un sens de lecture occidental : un choix volontaire de l’auteur qui demeure sans logique aucune nonobstant les explications qu’il pu en donner.

Du côté du style graphique, Haruhisa Nakata se balade… : un trait pas croyable à la fois raffiné et sauvage, un brin à la Yoshitaka Amano ; s’en dégage une atmosphère d’héroïc Fantasy à l’ancienne. Les flous des arrières plans confèrent un cachet photographique assez délicieux et certaines estampes auront de quoi littéralement scotcher le regard.

Pot-pourri mêlant science-fiction, fantastique-badass et patates-vapeur. Seinen où les colorations nekketsu côtoie un esthétisme roi un brin poétique. Il aura été réussi quelque chose… Cet univers happe, il enveloppe. C’est tout un monde qui débarque. Ce genre de production n’est définitivement que trop rare : émane un souffle tragique… résonne un écho qui emporte…


Critique 1


Première série de Haruhisa Nakata, Levius arrive en France auréolé d'une certaine réputation due autant à son aspect esthétique qu'à son univers intrigant et à son format inhabituel pour un manga. En effet, l'oeuvre a dès le départ été étudiée pour avoir un sens de lecture occidental au Japon, ce qui se traduit également par des bulles à l'horizontale au lieu des traditionnelles bulles verticales. Ne vous offusquez donc pas de ce sens de lecture : c'est un choix délibéré de l'auteur et de son éditeur, comme expliqué dans une petite postface toutefois un brin pompeuse et prétentieuse ("la nouvelle norme manga mondiale", rien que ça...). Mais passons.

Après de superbes premières pages en couleurs aux teintes sépia qui nous plongent tout de suite dans une ambiance poisseuse et terne, Levius nous perd volontairement dans une première partie de volume posant peu à peu les bases. Ces bases, ce sont celles d'un monde aux influences steampunk où après une guerre, le monde a été entièrement refaçonné.
Tout d'abord, d'un point de vue géographique, où noms et nations se sont remodelés. A ce titre, la carte présente en début de volume s'avère utile pour jeter les premières bases de ce monde que l'on devine clairement basé sur l'Europe, que ce soit dans la forme de certaines contrées et des océans ou dans leur nom.
Ensuite, au niveau des conditions de vie, où un nouvel art martial est né en puisant sa source dans les nouvelles technologies mécaniques mises au point. Cet art martial, la boxe mécanique, voit s'affronter en arène, souvent jusqu'à la mort de l'un des deux, des combattants qui ont été dotés de membres mécaniques. Ces "améliorations" par les machines peuvent aller très loin.

C'est dans ce contexte que nous voici plongés aux côtés de Levius, jeune garçon vivant de ces combats mécaniques et ayant de telles prédispositions dans cet art qu'il est très bien classé. Mais Levius est également un garçon terne et peu bavard, bien difficile à cerner pour son oncle, et coach Zack et pour sa grand-mère. Et dans le genre étrange et mystérieux, ces deux derniers ne sont pas en reste, puisque le premier a parfois des comportements un peu excessifs ou peu ragoûtants (il n'hésite pas à péter quand ça lui chante, par exemple), et que la deuxième semble avoir une bizarre capacité de communiquer avec des êtres non humains, voire à prédire certaines choses.

Toute la première partie du volume nous immisce en plein coeur de cet univers et aux côtés de ces personnages en jouant volontairement la carte du flou. Pendant les premiers chapitres, on se contente de suivre ces personnages un peu moribonds et peu explicites, ou d'assister à un combat de boxe mécanique de Levius, sans cerner grand chose. Ce n'est que petit à petit que les choses se dévoilent, que l'on en apprend plus sur le passé de ce monde qui a été dévasté par la guerre, sur l'enfance et les traumatismes de Levius, sur la manière dont son oncle et sa grand-mère l'ont accueilli, sur la naissance, les spécificités et la hiérarchie de la boxe mécanique... et le résultat est excellent, tout simplement parce que cette narration qui ne dévoile d'abord les choses qu'à petites doses et qui peut paraître faussement confuse nous plonge à merveille dans cet univers peu accueillant où il est difficile de trouver ses marques, et se fait un parfait écho de la propre absence de repères du personnage principal. Un abord original et pleinement immersif, qui peut demander au départ un petit effort, puis qui révèle vite son efficacité si tant est que l'on accepte le parti-pris.

Le parti-pris est également visuel, et là aussi Haruhisa Nakata offre un rendu qui ne plaira pas forcément au premier abord, mais qui s'avère très vite saisissant.
Cela, on le doit en premier lieu à une gestion des décors très intéressante, l'auteur y mettant souvent un effet de flou numérique déstabilisant et réussi. En plus de permettre une mise en avant spécifique d'éléments importants en jouant sur la profondeur de champ, ce parti-pris accentue cette ambiance de perte de repères et, en quelque sorte, de déshumanisation de la terne cité. On ressent notamment très bien cela lors de certaines planches, de certaines cases, par exemple celles où Levius court dans des rues et une foule troubles.
Du côté des scènes de boxe mécanique, Nakata délivre des scènes qui ont besoin de gagner en lisibilité, mais qui délivrent déjà un certain dynamisme, notamment grâce à des angles de vue souvent audacieux et soulignant la rage des combattants (à titre personnel, certains angles de vue m'ont rappelé un peu Ping Pong de Taiyô Matsumoto).

Au fil de tout cela, un réel travail psychologique est effectué sur Levius, qui ne se livre que par petites touches. Nakata offre régulièrement une narration au plus près de son héros, pour mieux nous permettre de le cerner, et pour intriguer toujours mieux autour de lui. Car au bout du compte, au-delà des combats de boxe mécanique, ce sont aussi de nombreuses interrogations qui s'immiscent doucement, autour des facultés de Levius au combat, du destin auquel il semble promis, des étrangetés liées par exemple à sa grand-mère, de ce que permet la mécanisation des corps... Tout un univers se pose et intrigue.

Audacieux et original, Levius vaut sans nul doute le coup qu'on s'y intéresse, qu'on l'essaie au moins. Son univers étrange, immersif et fascinant n'attend qu'à être exploré, en même temps que son personnage principal. L'édition proposée par Kana est portée par un grand format vraiment très utile pour profiter au mieux du travail visuel de l'auteur, par une traduction sans fausse note, et par 'excellente qualité des premières pages en couleur. Dommage, par contre, que l'encre bave un peu sur certaines pages, et que le papier soit si fin.

Notons qu'au Japon, la série s'est arrêtée après trois tomes dans le magazine Ikki de Shôgakukan, pour se poursuivre chez Shûeisha dans le magazine Ultra Jump.


Critique 2 : L'avis du chroniqueur
Alphonse

17 20
Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
16 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs