Maria Holic Alive - Actualité anime

Critique de l'anime : Maria Holic Alive

Publiée le Jeudi, 03 Septembre 2015

Maria Holic Alive – Chère Mère qui êtes au Paradis…

La suite est un exercice commun dans la japanimation. Nombreuses sont les raisons qui peuvent pousser un studio à poursuivre quelques saisons plus tard un anime : succès critique et public, avancées scénaristiques suffisantes des œuvres originales, avancements financiers importants des diffuseurs souhaitant rentabiliser une licence qu’ils ont payée cher… Maria Holic Alive rentrerait plutôt dans la première catégorie.

Diffusée pendant l’hiver 2009, la série Maria Holic avait reçu un très bon accueil avec son scénario original, ses personnages attachants, son esthétique particulière et son humour ravageur. Notons par ailleurs que cette saison hivernale 2009 était marquée par un manque flagrant de blockbusters, si l’on excepte Clannad After Story. Ceci explique peut-être cela. Mais finalement, de quoi est-ce que ça parlait, Maria Holic ?

Maria Holic Begins

Maria Holic est à la base un manga de Minari Endô, mangaka plutôt spécialisée dans le josei comédie romantique conventionnelle, eût égard à sa bibliographie : Hatenkô Yûgi et Kuria Kuoria. Maria Holic, son manga à succès, prend un peu le principe de ce genre à contrepied.

On suit Kanako, une lycéenne transférée dans une classe de deuxième année (l’équivalent de la première chez nous) du très huppé lycée/pensionnat pour filles Ame no Kisaki. Pourquoi ? Parce que c’est dans cet établissement que se sont rencontrés le père et la défunte mère de l’héroïne (le père était professeur, la mère son élève – à l’époque, les règles de vie entre prof et élève semblaient moins strictes). De belles et pures intentions, n’est-ce pas ? Seulement, l’entrée de Kanako dans cet établissement ne serait rien si elle n’avait pas quelque idée tordue derrière la tête. En fait, notre amie est lesbienne, et peu discrète quant à son orientation sexuelle, et compte bien séduire les jeunes et jolies lycéennes qui peuplent la cour de l’institut pour constituer son harem.

Heureuse et pétrie d’idées perverses, Kanako pense avoir fait une première prise en la personne de Mariya, blondinette à couettes tout à fait charmante. Sauf que… Mariya s’avère être un garçon, petit-fils de l’actuelle présidente de Ame no Kisaki. Il doit se faire passer pour une fille et effectuer toute sa scolarité sans que personne ne se rende compte de son véritable sexe, sinon quoi il n’héritera pas du poste de président… Tordu, mais plutôt inventif.

Forcément, Kanako découvre rapidement le pot aux roses – à l’instar de Yukinari de Girls Bravo, elle souffre d’éruption cutanée dès qu’un membre du sexe opposé la touche. Mariya va donc être contraint(e) de garder un œil sur l’opportune, au lycée comme dans le pensionnat. S’en suivent les péripéties usuelles allant de quiproquos en confusions, le tout assaisonné de coïncidences malencontreuses et autres.

Cette première saison était particulièrement rafraîchissante. D’une part parce que le sujet du harem manga, genre éminemment masculin, était détourné au profit d’un public plus large et d’un humour dévastateur. D’autre part parce que le studio SHAFT aux commandes avait rendu l’ensemble particulièrement attrayant, dans l’animation comme dans le scénario. De l’humour que les anglo-saxons appellent « slapstick », et qu’on peut rapprocher de la Commedia dell’arte : un humour « tarte à la crème » un peu bouffon, un peu violent, mais très efficace.

La même recette a été appliquée pour la suite, Maria Holic Alive. Ça devrait forcément être sympathique, alors, non ?

Maria Holic Returns

Comme on pouvait s’y attendre, Maria Holic Alive reprend les personnages de la série précédente. C’est avec un plaisir certain qu’on retrouve Kanako, Mariya, Matsurika, Sachi, Ryûken, et les autres. Et Dieu aussi. N’oublions pas Dieu. L’absence de continuité scénaristique d’un épisode à l’autre fait que le spectateur qui n’a pas visionné la première saison au préalable ne sera pas tant perdu que ça. Et donc, on suit toujours le quotidien de Kanako, troublée par Mariya le travesti(e), et égayée par la présence de bishôjo.

Maria Holic Alive a le droit au même staff technique que Maria Holic. Normal : on ne change pas une équipe qui gagne. Nous avons donc toujours une réalisation générale menée par Akiyuki Shinbô (Sayonara Zetsubô Sensei, Puella Magi Madoka Magica). Au character design, c’est Hideyuki Morioka qui s’y recolle. La musique sautillante alternant entre chœurs et orgues chrétiens et easy listening new age 80’s est le fait de Tatsuya Nishiwaki. Une équipe made in SHAFT 100% pur beurre, à un élément près. Et quel élément ! La réalisation de cette suite a été assurée par Tomokazu Tokoro (NieA_7, Les Ailes Grises), et plus par Yukihiro Miyamoto, bras droit de Shinbô, qui travaillait alors sur Denpa Onna to Seishun Otoko (un autre anime signé du studio), diffusé au printemps 2011 lui aussi.

Il est un fait que les animes estampillés SHAFT font bien souvent preuve d’une inventivité et d’un sens de la prise de risques certains, que ce soit dans les choix esthétiques ou scénaristiques. Que ces efforts fonctionnent ou pas, ou même qu’on les apprécie ou qu’on les abhorre, on ne peut nier que depuis 2005 (et l’arrivée de Shinbô dans la maison), SHAFT est synonyme d’originalité, dans l’acceptation large du terme. Cette créativité a depuis été copiée par d’autres studios (Silver Link, Kyoto Animation), injectant un nouveau souffle à une animation japonaise qui continue de se renouveler pour notre plus grand plaisir.

Et alors qu’on attend l’inventivité et la prise de risques comme normes auprès du mètre étalon – SHAFT – on est déçu par ce Maria Holic Alive.
La réalisation n’est plus aussi fantasque et originale. Les persos, pourtant hauts en couleur, se sont quelque peu affadis pour laisser la place à une nouvelle fournée de personnages secondaires voire tertiaires passables qu’on découvre, et parfois redécouvre, tellement ils n’avaient pas marqué dans la première série. Par ailleurs, si le scénario - rédigé une nouvelle fois par Masahiro Yokotani – parvient à conserver la psychologie absurde des protagonistes et à créer des situations plus invraisemblables les unes que les autres, l'humour est moins frappant, moins brutal, moins rentre-dedans… Et on ne sait pas vraiment où l’histoire va, même si on ne s’attendait pas à ce qu'elle soit développée sur 12 épisodes (c’eut été absurde et impossible, de toute manière, avec une licence comme Maria Holic).

De manière imagée, Maria Holic a égaré son mojo sur un sentier et emprunté le grand chemin des séries humoristiques assez conventionnelles.

Maria Holic Rises

Grand chemin, mais pas autoroute. Car il ne faut pas se méprendre : Maria Holic Alive reste une série intéressante. Une personne n’ayant jamais vu la préquelle pourra trouver la suite tout à fait plaisante à regarder. Par ailleurs, malgré les reproches qu’on peut lui faire, ce second volet est parsemé de quelques bonnes idées, comme les épisodes 5 et 6 qui se répondent l’un l’autre, décrivant les mêmes évènements de points de vue différents, ou le 9 où Kanako n'a pas le droit de parler parce qu'elle a été trop bavarde dans les épisodes précédents.

Les séquences avec le petit personnage de Nandarô, quant à elles, sont vraiment amusantes et apportent une coupure absurdo-éducative à l’anime.

Mais, surtout, rendons hommage aux openings et endings qui signent le talent du studio. À titre d’exemple, le générique de début des 4 premiers épisodes parodie les thèmes et les paroles des vieux super sentai type Goranger. Et celui de l’épisode 6 est tout bonnement hilarant.

Enfin, SHAFT a eu la bonne idée de conserver les bonus post-génériques et post-tsuzuku (séquences à suivre) parodiant publicités, bandes-annonces ou animes de manière très drôle. Puella Magi Madoka Magica, Les Experts, Photoshop, le Petit Chaperon Rouge… Ça fleure bon l’absurde, et ça n’apporte rien à l’œuvre globalement. C’est juste là pour faire rire, et tant mieux.

Autant de petits éléments disséminés çà et là qui rendent la série pas si anodine que ça.

Il faut donc le reconnaître, Maria Holic Alive reste suffisamment intéressante pour se pencher dessus et passer d'agréables moments. Pas moins, pas plus.
En dehors des facteurs propres à la série (staff, délais, budget…), peut-être en attendait-on trop de la suite d’un premier volet qui nous avait tant fait rire. Ou alors le contexte de diffusion était-il moins favorable ? La saison printemps 2011 n’a rien à voir avec l’hiver 2009 en terme de qualité, avec des séries comme Nichijô, Ano hi Mita Hana no Namae o Bokutachi wa Mada Shiranai ou, dans une moindre mesure, Hanasaku Iroha, vraiment de très bonne qualité, faisant passer, en comparaison, une série tout à fait correcte comme Maria Holic Alive pour passable (le dur diktat de la qualité pensée comme norme)…