Bungô Stray Dogs Vol.1 - Actualité manga
Bungô Stray Dogs Vol.1 - Manga

Bungô Stray Dogs Vol.1 : Critiques

Bungô Stray Dogs

Critique du volume manga

Publiée le Lundi, 17 Avril 2017

Critique 2

Plutôt axé sur la fantasy ou les jeux virtuels depuis quelque temps, le catalogue d'Ototo Manga accueille en début d'année 2017 une nouvelle oeuvre ne s'inscrivant pas dans ces registres et laissant deviner les ambitions nouvelles d'un éditeur qui est bien monté ces dernières années. Cette nouvelle oeuvre, mêlant action et surnaturel dans la ville de Yokohama, débarque dans notre pays d'ores et déjà auréolé d'une certaine réputation.

Débuté au Japon en 2012 dans le magazine Young Ace de la maison d'édition Kadokawa, Bungô Stray Dogs est un manga que l'on doit à Harukawa 35 (prononcez "Sango") pour les dessins, et Kafka Asagiri pour l'histoire.
Le premier semble signer ici sa toute première et à ce jour unique oeuvre, dont il a aussi illustré les light novels.
Le deuxième, lui, a pu signer quelques autres scénarios depuis les débuts du manga Bungô Stray Dogs (qui est son premier récit) : les deux mangas Minase Youmu to Hontou wa Kowai Cthulhu Shinwa et Shionomiya Ayane wa Machigaenai en 2013 (tous deux inscrits aussi dans le surnaturel, un genre que le scénariste semble apprécier, et faisant aussi des références à la littérature), puis à partir de 2014 et 2015 deux spin-off de Bungô Stray Dogs : les light novels (illustrés aussi par Harukawa 35, donc), et la comédie chibi Bungou Stray Dogs Wan! (qui, elle, est dessinée par Neko Kanai).
C'est à partir de 2016 que Bungô Stray Dogs voit sa réputation réellement décoller hors du Japon : fort de on succès au Japon, le manga se voit adaptée en série animée par les studios Bones. Avec une première saison diffusée au printemps et une deuxième en automne, cet animé compte au total 24 épisodes et fut bien accueillie sur sa plateforme de diffusion en simulcast, Crunchyroll, si bien que le timing pour la sortie française du manga semble parfait ! Il est toutefois bon de noter qu'Ototo Manga s'intéressait déjà au manga avant l'arrivée de l'animé et souhaitait déjà le publier.

Toute cette présentation, c'est bien beau, mais Bungô Stray Dogs, de quoi ça parle ? Hé bien, tout commence dans la (pas si) paisible ville de Yokohama, où le jeune Atsushi Nakajima, orphelin expulsé de son centre d'accueil, erre sans savoir pourquoi au bord d'une rivière, mort de faim. Prêt à tout pour survivre, il décide d'attaquer la première personne qui passera pour lui voler son argent... pas de bol pour lui, le premier gus qui passe semble être en train de se noyer dans la rivière, les jambes en l'air. Décidant de le sauver, Atsushi se fait enguirlander par le dénommé Osamu Dazai, qui essayait tranquillement de se suicider en ne gênant personne. Mais sans le savoir, le jeune Nakajima vient de faire son premier pas vers un autre univers : celui de l'Agence des Détectives armés, un groupe d'enquêteurs excentriques utilisant ses pouvoirs paranormaux pour résoudre des affaires délicates. Et ça tombe bien : l'agence est actuellement à la recherche d'un mystérieux tigre, et Atsushi semble avoir un lien étroit avec lui...

Le moins que l'on puisse dire est que Bungô Stray Dogs donne parfaitement le ton dès le début : avec cette scène improbable où les jambes de Dazai dépassent tranquillement de l'eau de la rivière où il essaie de se tuer, on plonge d'emblée dans un univers où l'on découvrira des personnages quelque peu excentriques, dont les caractères bien différents et très marqués seront un bon prétexte à de régulières notes d'humour et de cynisme. Jugez vous-même, entre Osamu Dazai qui ne pense qu'au suicide (mais toujours avec flegme), Doppo Kunikida qui note tout de façon scientifique (en plus de s'embrouiller souvent avec Dazai à cause de son caractère détaché), Jun'ichirô Tanizaki qui dit n'avoir rien de spécial et sa soeur ultra possessive Naomi constamment collée à son grand frère adoré... sans oublier les autres détectives qui ne sont pour l'instant que présentés, comme Ranpo Edogawa, Akiko Yosano, Kenji Miyazawa et le patron de l'agence Yukichi Fukuzawa. L'univers imaginé par Kafka Asagiri est malin en ceci qu'il tire bien parti des différents caractères pour créer des situations décalée ou mouvementées où ils'opposent, se crêpent le chignon, font équipe... au vu des caractères mis en place, les possibilités sont déjà assez nombreuses.

Mais ces différents noms ne vous disent-ils pas quelque chose ? Ce ne serait absolument pas étonnant, et on arrive ici à la principale spécificité de l'oeuvre : ses personnages sont inspirés de célèbres écrivains japonais du 20ème siècle (et de la fin du 19ème), qui se voient "ressuscités" à la sauce détectives paranormaux ! Exception faite pour Naomi Tanizaki, "Naomi" étant le titre d'une nouvelle de Jun'ichirô Tanizaki.
Loin de se contenter de reprendre simplement des noms connus, Kafka Asagiri (dont on ressent l'intérêt pour la littérature jusque dans son nom d'auteur "Kafka") joue avec certains traits de personnalité connus de ces écrivains (par exemple, l'attrait de Dazai pour le suicide), et puise également leur pouvoir respectif dans leur vie, leur carrière, leur style littéraire.... Le nom de leurs capacités paranormales, leur comportement, leur caractère ne sont pas forcément un hasard, et le scénariste s'amuse bien en glissant pas mal de références.
Notez que ces références ne sont pas primordiales pour profiter de l'oeuvre : bien que ce soit là sûrement sa plus grosse marque de fabrique, Bungô Stray Dogs peut se lire sans problème sans connaître les différents écrivains d'origine. Disons que cet aspect bien référence est une sorte de gros plus, qui peut inviter les lecteurs à essayer de dénicher toutes les petites références en allant faire des recherches. Si vous pensez que ne rien connaître de ces écrivains est handicapant pour la lecture, soyez donc rassurés, ce n'est pas le cas et vous pourrez profiter sans mal d'un divertissement qui s'annonce efficace Quoi qu'il en soit, Ototo Manga a bien cerné l'intérêt que comporte cet aspect, en offrant avec chaque tome deux marque-page présentant chacun un peu plus un écrivain. Une excellente initiative, qui devrait pousser les esprits peu renseignés mais curieux à aller voir un peu plus loin.

Et à part ça ? Hé bien, au-delà d'une première moitié de volume qui pose vraiment les bases en montrant comment Atsushi se retrouve enrôlé dans l'agence, puis une deuxième moitié offrant une première affaire classique mais bien rythmée qui permet de mieux voir agir certains visages de l'agence, on a un tome d'introduction qui fait bien le job et qui parvient déjà à poser une figure ennemie très prometteuse en la personne de Ryûnosuke Akutagawa (un autre écrivain bien connu), un "homme de l'ombre" au bras long, à la fois charismatique dans ce qu'il dégage, et un brin effrayant dans son pouvoir.

Sur le plan visuel, il serait presque difficile de croire que Harukawa 35 signe là son premier travail, tant il parvient à offrir quelque chose de très efficace. Plutôt discrets mais soignés quand il le faut, les décors font le job quand nécessaire. Côté découpage, c'est vraiment propre et clair, et capable d'être beaucoup plus dynamique quand il le faut, on notera simplement des scènes d'action qui restent pour l'instant un limitées dans leur rendu. Là où le dessinateur excelle est au niveau du design des personnages, qui sont tous bien travaillés et aisément reconnaissables avec pour chacun une dégaine spécifique, des expressions faciales soignées, et un style qui colle bien à leur caractère respectif, alors même que les silhouettes sont un brin épurées et assez élancées. C'est donc dans l'ensemble franchement agréable à l'oeil, et prometteur.

Bien que ce premier volume ne soit qu'une longue mise en place classique dans son déroulement, Kafka Asagiri et Harukawa 35 mettent déjà tout en place avec efficacité, que ce soit dans les spécificités de leur oeuvre, dans le ton général et dans certains enjeux qui se dessinent. une bonne entrée en matière, servie dans une édition très plaisante : joli vernis sur la jaquette (comme toujours, n'oubliez pas de la soulever pour découvrir quelques blablas sur la couverture), papier épais, souple et sans transparence, bonne qualité d'impression en Italie chez Lego... Officiant depuis de nombreuses années, le traducteur Nicolas Pujol trouve le bon ton pour les différents personnages et propose un travail soigné.


Critique 1

La grosse sortie des éditions Ototo pour ce début d’année 2017, c’est bien Bungô Stray Dogs. Si en dans l’hexagone nous avons d’abord connu l’œuvre par l’adaptation animée en deux saisons par le célèbre studio Bones, l’épopée des détectives est avant tout un manga scénarisé par Kfka Asagiri et dessiné par Harukawa 35. Si le premier scénarise différents titres y compris les light-novel autour de Bungô Stray Dogs, le second signe ici sa toute première œuvre, fait étonnant étant donné l’habilité de son dessin. Notons au passage que l’enquête démarre en grande pompe puisque Ototo propose les deux premiers tomes en simultanée pour le lancement de la série, ainsi que d’autres petits bonus sympathiques…

L’Agence des Détectives armés est mystérieuse, elle se compose d’une poignée de membres dotés de facultés hors du commun et entre en scène uniquement lorsque la police ou l’armée se montre impuissante face à des affaires aux frontières du réel. Atsushi Nakajima, orphelin expulsé de son établissement, rencontre l’étrange brigade lorsqu’il croise la route d’Osamu Dazai, un individu singulier qui cherche par-dessus tout… à se suicider. Lui sauvant la mise, Atsushi apprend alors l’existence d’un titre sauvage qui met la ville en alerte. Et c’est par cette première enquête à la résolution surprenant qu’Atsushi va devenir un membre à part entière de l’Agence des Détectives armés dont les membres, aux caractères des plus particuliers, gardent bien des secrets…

Le pitch de Bungô Stray Dogs n’est pas forcément le plus inventif qui soit. Une histoire de détectives excentriques dotés de pouvoirs farfelus, la recette n’est pas la plus originale. Mais là où la série de Kafka Asagiri et Harukawa 35 tire son épingle du jeu, c’est bien dans la conception des personnages. Derrière leurs noms se cachent en réalité des écrivains nippons, une facette qui n’apportent pas forcément au récit en tant que tel, mais qui donne un certain côté ludique à la lecture. Ainsi, le caractère et les pouvoirs de chaque membre de l’Agence des Détectives n’ont rien d’un hasard, tout a un sens, mais il n’est pas forcément aisé pour un lecteur occidental de le comprendre… C’est là qu’intervient l’éditeur Ototo qui, à la sortie de chaque tome, proposera gratuitement un marque-page à l’effigie d’un personnage dont le perso s’avère riche en informations concernant l’écrivain affilié au personnage. Avec les deux premiers volumes, ce sont donc quatre marques-pages qui sont disponibles, un nombre idéal pour présenter efficacement quatre des figures principales de la série.

Mais Bungô Stray Dogs peut bien être lu sans prendre cette facette en compte, comme récit en tant que tel. Et à ce titre, c’est un volume d’introduction plaisant qui s’offre à nous. Dans son schéma, le tome s’avère assez classique, mais son point fort est d’aller à l’essentiel. Ainsi, la première moitié du pavé est une pure mise en place des éléments majeurs qui entourent l’Agence des Détectives et la manière dont Atsushi rejoindra le groupe, tandis que la seconde partie embraye sur une mission pour la fine équipe, une aventure qui aurait pu rester classique pour guider le lecteur dans l’univers, mais qui va bien au-delà de ça, notamment en plantant d’ores et déjà une sévère menace pour nos camarades. Il est donc trop tôt pour savoir véritablement comment sera développée la suite de l’œuvre ou quelle forme elle prendra sur le long terme. Néanmoins, les mystères déjà introduits ont de quoi piquer la curiosité du lecteur.

Et ces mystères, ils passent le plus souvent par les personnages eux-mêmes, ainsi que les différentes mécaniques de la série. Ainsi, les pouvoirs des personnages ont-ils une origine au sein même de l’intrigue ? Et à côté de ça, nombre des figures présentes ont à dire sur leurs origines, des origines auxquels on s’intéressera par les côtés attachants dont font preuve la plupart des membres de l’Agence, donnant d’emblée envie d’en savoir plus sur eux. Et à côté d’eux vient Ryûnosuke Akutagawa, antagoniste charismatique et intrigant qui effraie aussi bien par sa personnalité que son design. Par son allure remarquable, la tension naît dans la série dès la fin de ce premier opus, le choix d’Ototo et publier simultanément les deux premiers volets de l’œuvre est donc amplement justifié.

L’autre aspect aguicheur de la série est sans contexte le dessin élégant de Harukawa 35. Si les personnages sont représentés de manières assez classiques par leurs caractéristiques épurées et androgynes, une certaine classe se dégage d’eux et le dessinateur parvient suffisamment bien à les doter de particularités physiques personnelles pour que chacun soit clairement identifiable, et que leurs designs soient le reflet de leurs caractères. Notons que sur la fin du tome, la série s’oriente vers de l’action, une action représentée de manière assez claire, mais c’est véritablement sur la suite de la série qu’on pourra juger le talent du dessinateur en termes de découpage des combats.

Du côté de l’édition, Ototo a fait un travail remarquable et on ressent fortement l’attachement qu’a l’éditeur envers ce titre, et sa volonté d’en faire une œuvre porteuse du catalogue. La couverture, faite d’un papier couché mât et bénéficiant d’un vernis sélectif, a fière allure et la qualité du papier des pages n’a rien à lui envier, sans compter la présence de quatre pages couleur en début de titre. Côté traduction, Nicolas Pujol livre un texte efficace dont la particularité est de faire ressortir le caractère des personnages et le cynisme de certaines figures de l’œuvre. Enfin, l’idée des marques-pages, évoquée plus haut, est aussi astucieuse qu’intéressante, permettant au lecteur d’avoir entre les mains à la fois un récit d’action ainsi qu’un véritable jeu de pistes.

Sans être une révolution, Bungô Stray Dogs montre déjà une certaine couleur dans son volume d’introduction, le tome se montrant habile pour planter son décor et ses personnages et ne perdant jamais de temps pour aller à l’essentiel. Néanmoins, on en attend plus de l’œuvre et à ce titre, l’envie de se jeter sur le deuxième opus est bien là. Ototo proposant les deux premiers tomes pour le lancement du titre, on aurait tort de ne pas voir ce que la suite nous propose.

Critique 2 : L'avis du chroniqueur
Koiwai

14.5 20
Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Takato
14.5 20
Note de la rédaction