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I'm in Love with the Villainess Volume 1 Inori. Illustrations : Hanagata Traduction : Boris Lecourt

Chapitre 1 — Réincarnée dans un Jeu de Drague 5 Chapitre 2 – Les Chevaliers de l’Académie 87 Chapitre 3 – Le Mouvement du Peuple 156 Chapitre Bonus – Ma Maîtresse, Claire François 214 Postface 228 Notes du Traducteur 230 Lexique 234 Illustrations Préparatoires 235

5 Chapitre 1 — Réincarnée dans un Jeu de Drague — Comment une roturière telle que toi peut oser s’asseoir à côté de moi ⁉ D’un seul coup, je me retrouvai dans un endroit étrange. Une fille aux cheveux blonds bouclés me regardait l’air irrité pour je ne sais quelle raison. OK, restons calme. Ça sert à rien de paniquer, analysons plutôt la situation, pensai-je. Je jetai un œil autour de moi et compris que j’étais dans ce qui semblait être une salle de classe. Comparée à celles de mon ancien lycée, il y avait moins de bureaux, ce qui donnait une impression de grandeur à la pièce. En plus de la fille qui venait de crier, il y avait d’autres personnes autour de nous. Le problème était qu’aucune d’elles n’avait l’air d’être japonaise. Je mis tout ça de côté et essayai de me souvenir ce que je faisais avant d’arriver ici. Après avoir fini mes heures, un peu trop supplémentaires, à la petite compagnie où je travaillais, j’étais rentrée chez moi et avais joué à un jeu. Les jeux étaient le seul plaisir que j’avais dans ma vie terne et monotone. Peu importe le type, je les aimais tous. e ce soit ceux de société, ou même des MMO en 3D. Et parmi eux, ceux que j’appréciais tout particulièrement étaient les jeux de simulation romantique. On y incarne une fille, l’héroïne, et le but est de la faire se

6 Chapitre 1 — Réincarnée dans un Jeu de Drague mere en couple avec l’un des garçons disponibles. Bien que ma raison d’y jouer soit un peu différente de la norme… Soudain, je me rendis compte que je connaissais la demoiselle devant moi. — Ah, tu es Claire ? lâchai-je. — Incroyable ! Tu te permets de me tutoyer ! répliqua-t-elle, furieuse. Cee voix stridente ne laissait aucun doute. Il s’agissait bien de Claire François, un personnage de Revolution, mon jeu de drague préféré. Ça veut dire que… c’est pas possible, si ? C’est ce truc à la mode, la réincarnation dans un autre monde ? — Excusez-moi, Lady Claire, me corrigeai-je en ajoutant le titre honorifique utilisé dans le jeu. — Très bien. C’est ainsi qu’une roturière doit parler. — Vous souvenez-vous de mon nom ? demandai-je. — Tu te moques de moi ? Tu es Rae Taylor, répondit-elle. Ça confirme la chose, je suis bien dans un autre monde. Dans Revolution, le nom de l’héroïne était forcément Taylor, et on ne pouvait choisir que le prénom. Mon vrai nom étant Rei Ôhashi, mon prénom avait été gardé, bien que légèrement anglicisé, pour devenir Rae Taylor. Cela voulait donc dire que ce monde était celui du jeu, et que j’en étais la protagoniste. — Super ! m’exclamai-je. — Pourrais-tu t’abstenir de crier comme cela ? Vous autres, roturiers, n’avez vraiment aucune manière…, souffla-t-elle. Cependant, ma tête était totalement ailleurs. J’avais rêvé que ça puisse m’arriver des tonnes de fois, et maintenant, c’était le cas. J’allais pouvoir parler avec mes personnages préférés pour de vrai, et non à travers des choix. Et aussi… — Lady Claire. — oi donc ? De plus, j’aimerais qu’une roturière telle que toi évite de m’adresser la parole aussi familièrement. — Je vous aime.

7 — Hein… ? laissa-t-elle échapper, les yeux écarquillés. Elle n’avait pas l’air de comprendre, alors je me répétai : — Lady Claire, je vous aime. Non, je vous adore. — Ma… ma… m-mais…, balbutia-t-elle. Considérant son agitation, mes mots devaient enfin l’avoir aeinte. Elle était vraiment mignonne. Comme on pouvait s’y aendre de mon personnage favori. En effet, plutôt que les garçons avec lesquels il était possible d’avoir une relation, mes vues se tournaient vers la méchante et rivale de Revolution, Claire François. En général, dans les jeux, ce genre de personnage vient d’une bonne famille, a un mauvais caractère, et persécute l’héroïne avant de finalement perdre à la fin de l’histoire. Et pourtant, j’étais totalement sous son charme. e ce soit sa personnalité autoritaire, sa voix stridente ou même ses méfaits, me souvenir d’elle dans le jeu suffisait à me faire sourire. Je savais qu’elle était faite pour être détestée, mais je n’y arrivais pas. Sa grande fierté, son comportement intimidant pour cacher son cœur fragile, sa méchanceté due à sa jalousie envers celle qui veut voler l’homme qu’elle aime. Cela la rendait très humaine et donc tout à fait mon genre. En comparaison, la protagoniste était tellement parfaite que ça me dégoûtait. Vous connaissez le proverbe, on ne choisit pas ses goûts. — Mais que dis-tu ⁉ Elle avait enfin réussi à finir sa phrase. — J’exprime juste mon amour pour vous. — O… oh, je vois. Tu essaies de t’airer mes grâces. Inutile, je ne compte pas me rabaisser au niveau d’une roturière, lâcha-t-elle en tournant le visage de côté. — Trop mignonne… Oups, ma bouche a bougé toute seule. Lady Claire est toute tremblotante. — Se pourrait-il que tu sois ce genre de personne ? me questionna-t-elle. — Non, ce n’est pas le… oique… Peu importe, vous êtes mignonne et c’est ce qui compte. Elle fit un mouvement de recul avec un petit cri.

8 Chapitre 1 — Réincarnée dans un Jeu de Drague Sa réaction était si pure que c’en était adorable. — Vous me détestez ? — É-évidemment ! — Cela me convient très bien. Insultez-moi, j’adore ça, insistai-je. — Co… comment ? Elle commençait à être vraiment effrayée. — C’est le début de notre excitante vie à l’école, Lady Claire ! Profitons-en le plus possible ! — Pourquoi parles-tu comme si nous étions ensemble ⁉ Ainsi, je dis au revoir aux heures supplémentaires, et commençai à penser aux jours heureux que j’allais passer avec Lady Claire. J’étais bien décidée à profiter de cee réincarnation pour être avec elle et lui montrer mon affection. Ma nouvelle vie semblait radieuse. ◆◇◆◇◆ — Rae, j’ai entendu dire que t’avais airé l’aention de Lady Claire ? Cee voix rauque appartenait à ma camarade de chambre, Misha Yur, assise sur son lit. Elle avait une allure mature et de longs cheveux argentés. Nous étions actuellement dans notre chambre du dortoir de l’Académie Royale. L’espace d’environ 15 m² comprenait des lits superposés, ainsi qu’un bureau pour chacune, et quelques meubles de rangement. Malgré son air antique comparé au Japon moderne, c’était une chambre comme une autre. L’histoire de Revolution se passait dans l’école la plus prestigieuse du pays, l’Académie Royale. La vie en dortoir était obligatoire, et tous les étudiants étaient traités comme égaux. Naturellement, la réalité en allait autrement, considérant l’aristocratie. Toutefois, tout le monde devait vivre en chambre, par deux. Et dans mon cas, ma colocataire n’était autre que Misha, la meilleure amie de l’héroïne. — Plutôt que le résultat, c’était le but ? — ’est-ce que t’essaies de faire au juste ? demanda-t-elle en soupirant. La

9 maison des François ne ferait qu’une bouchée de toi. Tu ferais mieux de ne pas t’approcher d’elle. Les François demeuraient l’une des familles nobles les plus influentes du royaume. Ils s’occupaient du poste de ministre des Finances depuis des générations, ce qui voulait dire que seuls le Roi et le Premier ministre étaient audessus d’eux. Comme ils avaient des membres mariés à la famille royale, certaines personnes colportaient même que c’étaient eux à la tête du pays. Une roturière comme moi n’était rien à côté. Dans ce cas, pourquoi me retrouvais-je dans la même école ? Eh bien, tout d’abord, il fallait savoir que le monde de Revolution ressemblait à l’Europe du Moyen Âge, et que le Royaume de Bauer, où se déroulait l’histoire, était plutôt corrompu. Les nobles avaient accès à tous les postes hauts placés, et les bureaucrates étaient engagés grâce à leurs connexions. Cee disparité entre la noblesse et le peuple s’était agrandie d’année en année, jusqu’à ce que les plaintes de ce dernier soient impossibles à ignorer. Ainsi, le roi avait décidé d’installer une méritocratie. Peu importe sa famille et ses richesses, tant que l’on était talentueux, on pouvait être recruté. Bien qu’il ait demeuré nombre de problèmes, cee nouvelle politique avait gagné le soutien du peuple. Pour revenir à ma question, ma présence ici était due au système de bourse d’études qui permeait à ceux qui en avaient les capacités d’intégrer l’Académie Royale sans avoir à payer le moindre sou. J’étais l’un des rares étudiants boursiers. — Mais Misha, j’aime Lady Claire. — Cee fille égoïste ? T’as vraiment des goûts bizarres. Surtout qu’elle t’aime pas, elle. Pour les aristocrates, nous ne sommes que des parvenues. Pour le peuple, il s’agissait d’une aubaine, mais pour l’aristocratie, le système de bourse avait été très mal reçu. Sans compter la perte de leur monopole, pour eux, qui estimaient les traditions et le statut social avant tout, avoir des roturiers dans l’Académie Royale était impardonnable. Misha était aussi une boursière. Elle avait beau venir d’une famille noble, des

10 Chapitre 1 — Réincarnée dans un Jeu de Drague troubles financiers avaient ruiné cee dernière, ce qui leur avait fait perdre leur statut. Elle restait néanmoins plus aisée que la plupart des familles plébéiennes. Grâce à cee expérience, elle comprenait le monde bien mieux que les autres aristocrates. En tout cas, depuis notre rencontre à l’école pour roturiers il y a quelques années, elle avait toujours été juste envers moi. Elle était peut-être même un peu trop gentille à mon goût. — Je préère qu’elle me déteste plutôt qu’elle m’ignore, affirmai-je. — T’as vraiment un problème. — Dis, qu’est-ce que je dois faire pour être avec Lady Claire le plus possible ? — Depuis quand t’es aussi pénible, murmura-t-elle, la main sur le front comme si elle avait mal au crâne. Deviens quelqu’un qu’elle ne peut pas ignorer. — Comment ça ? — Elle a une grande fierté et veut absolument être la meilleure. Donc si tu la bats sur un point, elle sera obligée de reconnaître ton existence. — Mais oui, c’est ça ! m’écriai-je. C’était simple. Il suffisait de faire pareil que dans le jeu. Plus je ferais de mon mieux, plus elle m’embêterait. Et comme elle était persévérante, même si ça ne marchait pas, elle continuerait quand même. Comme ça, elle me tourmentera, et moi je l’admirerai. Tout le monde est gagnant ! réalisai-je. — Merci, Misha. T’es vraiment d’une grande aide. — Pourquoi est-ce que tu me remercies de t’avoir donné un moyen d’être haïe ? Misha était confuse, et j'en comprenais la raison. Bref, j’avais décidé de mon objectif : faire de mon mieux et me faire embêter par Lady Claire. Ou plutôt, j’allais la harceler moi aussi ! — Un quotidien où Lady Claire et moi nous tourmentons l’une et l’autre… el bonheur ! — Sérieusement, qu’est-ce qu’il t’arrive… ? ◆◇◆◇◆

11 Alors que je marchais dans le couloir de l’académie, je fus poussée par-derrière. Je réussis à retrouver mon équilibre avant de tomber, et me retournai. — Oh, excuse-moi. Comme tu étais debout à ne rien faire, j’ai pensé que tu étais une statue. Il s’agissait de Lady Claire. Son air satisfait avec sa main pour cacher son sourire était le parfait exemple d’une méchante. Et à partir d’aujourd’hui, je la verrai comme ça tous les jours. — Lady Claire. — ’y a-t-il ? Ne demande pas d’excuse, c’est de ta faute si tu es une roturière qui… — Vous êtes géniale ! — Hein… ? laissa-t-elle échapper, les yeux grands ouverts. — Vous avez des laquais, et pourtant vous faites le sale boulot vous-même ! J’en aendais pas moins de vous ! — Hein… ? oi ? — Vous êtes différente du tyran ordinaire. C’est pour ça que je vous aime ! — Mais que dis-tu… ? Tu me dégoûtes, proféra-t-elle avant de partir. — Aaah, elle s’en est allée. — Pourquoi t’es aussi triste ? m’interpella Misha, perplexe. — Parce qu’elle ne m’a pas assez insultée. — Ne sois pas aussi directe, ça donne l’impression que c’est moi qui suis bizarre, se plaignit-elle. — Tu ne trouves pas qu’elle est rayonnante quand elle me tourmente ? — Alors, au moins, t’es consciente de ce qu’elle te fait. Ça me rassure, avoua-telle. Allez, on va être en retard pour le cours, dépêche-toi. Ainsi commença la journée. — Oh, excuse-moi. Je croyais que c’était un insecte. Cee fois, elle avait marché sur mon pied.

12 Chapitre 1 — Réincarnée dans un Jeu de Drague — … fort. — Je ne t’entends pas, roturière. Si tu as quelque chose à dire, parle plus… — ie à me marcher dessus, faites-le plus fort ! — oi ⁉ Elle prit peur. ’est-ce qu’elle est mignonne. — ’y a-t-il ? Tu es pauvre au point de ne pas pouvoir t’acheter les manuels scolaires ? Elle avait caché mes bouquins. — Je suis désolée de ne pas avoir remarqué vos sentiments, Lady Claire. — Hein ? — Vous voulez qu’on s’assoie ensemble pendant le cours, c’est ça ? Si l’on utilise le même livre, on pourra se coller l’une à l’autre ! — Je ne comprends rien de ce que tu racontes ! Elle s’était mise en colère. ’est-ce qu’elle est mignonne ! — Oh, tu n’as personne avec qui te mere en groupe ? C’est parce que tu n’es qu’une vulgaire roturière. J’étais ostracisée. — Monsieur, Lady Claire veut bien se mere avec moi. — Non ! — Pourquoi ? — Ne joue pas à l’idiote avec moi ! Elle s’enfuit. ’est-ce qu’elle est mignonne ‼ — Oh, tu es tellement sale que j’ai cru que tu étais de la boue. Elle avait jeté de l’eau sur moi.

13 — J’ai froid. — Oh ho ho, ma pauvre petite ! — Réchauffez-moi, s’il vous plaît. — Ne t’accroche pas à moi ! Lâche-moi ! Elle était chaude. ’est-ce qu’elle est mignonne ‼! — Oh ho ho, que penses-tu de ceci ? Un vase rempli de fleurs était posé sur mon bureau. — Un cadeau de la part de Lady Claire ! — Non ! — C’est le premier que vous me faites. Je vais en faire des fleurs pressées et les porter avec moi. — Pourquoi ⁉ Elle avait l’air contrariée. ’est-ce qu’elle est mignonne ‼‼ — Tu n’es pas un peu trop résistante ⁉ — Comment ça ? Après les cours, Lady Claire m’avait interpellée en tapant le sol du pied, frustrée. On dirait que mes réactions ne lui plaisaient pas trop. Pourtant, je ne faisais que lui répondre honnêtement. Au passage, c’était marrant d’avoir des techniques de harcèlement du Japon utilisées dans un monde de fantasy. Le coup du vase pour me faire passer pour morte, en particulier. Mais bon, le jeu ayant été créé par une compagnie japonaise, cela paraissait assez logique. — Comment peux-tu être aussi calme alors que je suis cruelle avec toi ⁉ s’exclama-t-elle. — Cruelle ? Vous ne voulez pas plutôt dire affectueuse ? — Non !

14 Chapitre 1 — Réincarnée dans un Jeu de Drague — ’est-ce que c’était, alors ⁉ — Pourquoi c’est moi qui me fais crier dessus ⁉ Hausser la voix à plusieurs reprises semblait l’avoir essoufflée, puisqu’elle s’arrêta un instant pour respirer. C’est parce que vous réagissez à tout que ça vaut le coup de vous taquiner. — Si c’est comme ça, je vais être franche, commença-t-elle avec un regard perçant. Une roturière parvenue telle que toi ne devrait pas être ici. Retourne travailler dans ton champ de paysanne ! — Mon seul travail… Non, mon devoir est de vous aimer, Lady Claire, affirmaije. — Je n’en peux plus d’elle, aidez-moi, geignit-elle, les larmes aux yeux. — N’abandonnez pas. Ce qui ne nous tue pas nous rend plus forts, vous savez. — Mais que me veux-tu à la fin ⁉ Lady Claire se mit à pleurer pour de vrai et partit en courant avec ses laquais. — Ha, ha ! C’était une victoire facile. — Honnêtement, je la plains, compatit Misha. — Voyons, Misha, ne me sous-estime pas. Si j’étais sérieuse, ce serait pire. — Oh, vraiment… ? Contrairement à Lady Claire, qui aurait eu une réaction exagérée, Misha avait répondu sans enthousiasme et passa à autre chose. — Blague à part, ça n’est vraiment pas trop dur pour toi ? me demanda-t-elle sérieusement. — Nope, pas du tout. — Parce que tu la trouves affectueuse ? — Oui, mais pas que. Il ne faisait pas de doute que ses actions étaient celles d’une méchante. Toutefois, sa façon de faire me paraissait juste charmante. Comme mentionné précédemment, elle agissait par elle-même, sans demander l’aide de ses larbins, contrairement à la plupart des nobles. De plus, elle n’en faisait pas trop. Elle m’avait poussée, mais ce n’était pas près d’un escalier, ou d’un

15 coin de couloir, donc je n’aurais couru aucun risque même si j’étais tombée. Pareil pour les livres, elle les avait seulement cachés, et non jetés ou même déchirés. Bien sûr, si nous avions été au Japon, cela aurait posé problème. Or, ce n’était pas le cas, et la cible, c’était moi. Non pas que je cherchais à la défendre. C’était juste que, si la victime était heureuse de sa situation, où était le mal ? — ’est-ce que tu penses qu’elle va me faire demain ? — J’en sais rien. Je profitais à fond de ma nouvelle vie dans un autre monde. ◆◇◆◇◆ — Bonne journée, Lady Claire ! J’étais entrée dans la salle de classe et avais salué Lady Claire qui était entourée par ses larbins. À dire vrai, il s’agissait plutôt d’un amphithéâtre avec de longues tables, qui allaient de plus en plus haut à chaque rangée, face au tableau installé derrière le bureau du professeur. La salle était deux fois plus grande que celles du lycée où j’étais allée. Alors que je m’approchais de ma douce bien-aimée, une fille de son entourage me coupa la route. — Pourrais-tu arrêter de nous adresser la parole ? Nous vivons dans un monde différent du tien. N’est-ce pas, Lady Claire ? affirma-t-elle d’un ton hautain, accompagnée par le support des autres parasites. — Euh, j’en ai rien à faire de toi, l’ignorai-je. Bonne journée, Lady Claire ! — Mais quelle impolitesse ! i penses-tu avoir en face de toi ? J’appartiens à la maison des Kugre, au service des François depuis des générations ! — Donc une servante, quoi. — La… Lady Claiiire…, pleura la fille. elle mauviee. — Encore cee roturière…, rumina-t-elle, avant de se tourner vers moi. Tu

16 Chapitre 1 — Réincarnée dans un Jeu de Drague ferais bien d’arrêter de t’emballer comme ça. Nous n’avons pas de temps à perdre avec toi. De plus, « bonne journée » est employé au moment de se séparer, et non pour… Ah, c’est ça que je veux. Ses suivantes ne font vraiment pas le poids, Lady Claire est d’un tout autre niveau. Au passage, j’avais fait exprès d’utiliser cee expression, tout était calculé. — Et au final vous me parlez quand même et m’apprenez de nouvelles choses. Je vous aime. — T-tais-toi ! Tu te moques de moi ⁉ — Oui ! confirmai-je avec un grand sourire. — Aucune hésitation ⁉ Bonne réaction, comme d’habitude. Aujourd’hui encore, je suis au paradis. — Calme-toi, Rae, me réprimanda Misha en m’arapant par le col. Bonjour, Lady Claire. — Lâche-moi, je suis en train de jouer à Lady Claire. — Tu ne veux pas plutôt dire « avec » ⁉ me corrigea cee dernière. Elle a vraiment un talent de comique. — Arrête, je te dis, me gronda Misha avec une tape sur la tête. — Misha, tu devrais mieux discipliner ton chat, sermonna Lady Claire. — Rae n’est pas mon animal de compagnie, vous savez. — Mais j’aimerais bien être celui de Lady Claire, glissai-je. — Tu ne peux pas te taire ne serait-ce qu’une minute ⁉ Ah, elle est à bout de souffle. Elle commence à fatiguer. — Lady Claire, vous n’avez pas l’air bien. Courage ! — À qui la faute ⁉ Va-t’en ! ordonna-t-elle. Je faisais la moue en signe de protestation, quand soudain… — Vous avez l’air de bien vous amuser, résonna une douce voix de ténor. — Lord Yu… — Bonjour, Claire. C’est rare de te voir aussi agitée, remarqua-t-il avec un rire. Il s’agissait du troisième prince du royaume, Yu Bauer. Ses cheveux blonds,

17 légèrement frisés, son sourire serein et gentil, sa voix, ainsi que l’air qu’il dégageait criaient « Je suis un prince ». Il était bien sûr l’un des choix disponibles dans Revolution. Deuxième du classement en termes de popularité, la plupart des commentaires disaient : « Il est trognon », « Je veux le protéger », ou bien « Épouse-moi ». — Lord Yu, j’essayais seulement de corriger l’aitude de cee rotu… de Rae. — Vraiment ? me demanda-t-il. — J’exprimais juste mon amour inconditionnellement, déniai-je. — Encore avec tes soises ! Lord Yu se mit à rire en voyant la réaction de Lady Claire. — Rae Taylor, c’est ça ? Comme tu as obtenu la première place à l’examen d’entrée, je pensais que tu étais studieuse et que tu serais plus sérieuse, mais tu es plutôt marrante, en fait. — Merci, répondis-je sèchement, n’ayant aucun intérêt pour lui. — Rae, c’est malpoli, me reprocha ma meilleure amie. Bonjour, Lord Yu. — Bonjour, Misha, retourna-t-il chaleureusement. La gentillesse du prince se dirigeait vers tout le monde, toutefois, Misha était spéciale à ses yeux. En effet, ils se connaissaient depuis l’enfance, avant que la famille Yur fasse faillite. Même maintenant, Misha brûlait toujours d’amour pour lui. De ce fait, en plus des harcèlements de Lady Claire, l’héroïne devait aussi faire face au conflit entre son amitié avec Misha et ses sentiments envers Lord Yu, dans le cas où elle le choisissait. Il s’agissait d’ailleurs de la raison pour laquelle les fans considéraient que ce scénario était le meilleur. — Excusez Rae, s’il vous plaît. — Ne t’en fais pas. Au contraire, tu devrais l’imiter. On est tous égaux dans cee école. — Je vais y réfléchir… Face à cee discussion connotée d’insinuations… — ’en pensez-vous, Lady Claire ? Sont-ils en train de raviver les flammes de leur passion ? l’interrogeai-je.

18 Chapitre 1 — Réincarnée dans un Jeu de Drague — Pourquoi as-tu toujours des idées aussi vulgaires… ? J’étais occupée à la taquiner. — Hé, Yu, Claire. Salut les gens, nous interrompit un beau gosse aux courts cheveux noirs. — Bonjour, Lord Rod. — Bonjour, Rod. Lady Claire et Lord Yu venaient de saluer le premier prince du royaume, Rod Bauer. Naturellement, il était lui aussi l’une des cibles disponibles. — ’est-ce que vous faites ? J’veux participer, lança-t-il d’un ton franc en s’infiltrant dans la conversation. — Rien d’intéressant. Juste une certaine personne qui perturbe la moralité publique. — Se pourrait-il que vous vouliez me rejoindre ? ’on fasse des trucs pas bien ensemble ? Allons-y ! aaquai-je. — Non ! — elqu’un peut m’expliquer… ? Lord Rod me regardait bizarrement. — Voici Rae Taylor, une boursière et première place à l’examen d’entrée, me présenta Lord Yu, avec un gloussement. Marrante, non ? — C’est sûr qu’on en voit pas des comme ça chez les nobles. On dirait que la nouvelle politique de notre vieux a produit un résultat amusant. — Hmm… Je ne savais pas s’il me complimentait ou non, donc je ne fis qu’un bruit en guise de réponse. — Première fois qu’on me la fait, celle-là. Rae, c’est ça ? J’m’en souviendrai. — Merci, répondis-je pour la deuxième fois, toujours sur un ton sec. — Encore une fois, c’est malpoli, Rae, me réprimanda Misha. — N’importe qui à ta place serait aux anges de se faire remarquer par Lord Rod…, ajouta Lady Claire, stupéfaite. Désolée, mais il est pas du tout mon genre.

19 Lord Rod était du type sûr de lui, très optimiste, avec une personnalité enjouée et allant toujours de l’avant. Honnêtement, ne serait-il pas fatigant d’être avec lui à longueur de journée ? Sa première position au classement de popularité restait un mystère pour moi. Mais bon, je suppose qu’à partir du moment où mon cœur appartient à Lady Claire plutôt qu’à l’un des garçons, je ne suis pas vraiment une référence, pensai-je avec ironie. — Seine, ramène-toi. — Non merci…, refusa une voix irritée à l’appel de Lord Rod. Le détenteur de celle-ci était prostré sur un bureau au fond de l’amphithéâtre, immobile. — Tu sais bien que Seine n’aime pas ce genre d’ambiance. — Faudrait déjà savoir ce qu’il aime. Il suffisait de voir le sourire gêné de Lord Yu et la grimace de Lord Rod pour comprendre que Lord Seine n’était pas particulièrement bien vu. Deuxième prince du royaume et dernier choix possible dans le jeu, il était le moins populaire des trois. Si Lord Yu était le prince parfait, et Lord Rod le gars sûr de lui, Lord Seine, quant à lui, était plutôt… compliqué. D’un côté se trouvait Lord Yu, le génie capable de tout faire sans effort. De l’autre, Lord Rod réussissait tout ce qu’il entreprenait tant qu’il y meait du sien. Et au milieu, Lord Seine n’arrivait qu’à des résultats juste au-dessus de la moyenne, peu importe ses efforts. Comparé sans cesse à ses frères, il avait développé un gros complexe d’infériorité, le rendant asocial. Cependant, il était mon favori pour cee raison. Tout comme Lady Claire, ça le rendait humain. Pour moi, quelqu’un comme lui avait plus de charme qu’une personne sans défaut. Sans doute, être une adulte connaissant la dure réalité plutôt qu’une adolescente pleine de rêves y jouait beaucoup. De plus, j’étais un peu spéciale. — Lord Seine…, souffla ma douce Lady Claire, l’air inquiet. Eh oui, en fait, elle en pinçait pour lui. C’était une autre raison de

20 Chapitre 1 — Réincarnée dans un Jeu de Drague l’impopularité de Lord Seine. Durant son scénario, Lady Claire était encore plus embêtante que dans les autres. S’ajoutait à ça qu’il se montrait compréhensif et excusait son comportement à la fin du jeu. En comparaison, les deux autres scénarios avaient un grand retournement de situation contre elle, provoquant un sentiment exaltant à leur complétion. Toutefois, ce n’était pas mon truc, et je préférais la clémence de Lord Seine. — Pourquoi ne pas aller le voir ? proposai-je à Lady Claire, puisqu’il n’était pas du genre à faire le premier pas. — C-comment ça ? — Vous l’aimez, non ? Je regreai aussitôt d’avoir ouvert la bouche. — P-pas du tout ! Je me fiche éperdument de lui ! cria-t-elle, embarrassée. Sa voix résonna dans la pièce, et aeignit les oreilles de ce dernier. Il se leva silencieusement, puis sortit de la salle, le visage inexpressif. — e faire… ? Ce n’est pas ce que je voulais dire…, marmonna-t-elle, perdue. Elle est vraiment maladroite. — Lady Claire, vous devriez vous excuser. — Sale roturière ! Arrête de parler comme si tu savais tout ! — Lady Claire, déclarai-je d’un ton ferme en la regardant droit dans les yeux. — … quoi… ? — Lord Seine est très sensible. — J’en suis bien consciente. — Alors vous devez vous excuser. — T-tais-toi ! hurla-t-elle en se levant brusquement. Je ne me sens pas bien ! J’ai besoin de rentrer chez moi ! — Aendez ! l’appela une de ses suivantes. — Laissez-moi seule ! Elle partit sans ses larbins. Et je savais où elle allait. Elle était sûrement en train de courir après Lord Seine. — ’est-ce qu’elle est mignonne…

21 C’est pour ça que vous êtes la meilleure, pensai-je, le sourire aux lèvres en voyant ses boucles dorées se balancer au loin. ◆◇◆◇◆ — Tu es très insolente pour une roturière ! — Oui ! Je le suis, donc insultez-moi davantage ! Une nouvelle matinée commençait avec Lady Claire, et moi-même, au top de notre forme. Au passage, ma réincarnation avait eu lieu le premier jour d’école. Depuis, une semaine s’était écoulée. Je m’étais habituée à l’académie, et ma relation avec ma bien-aimée avançait favorablement… ou du moins, j’espérais. L’échange précédent était le résultat de mes salutations du matin. D’ailleurs, depuis la veille, son entourage avait arrêté de se préoccuper de moi en voyant que peu importe combien on me tourmentait, je n’en avais rien à faire. Vraiment des mauviees. Vous devriez prendre exemple sur Lady Claire. Cela rendait les choses plus faciles pour être avec elle, donc ça m’arrangeait. — Je ne me ferai plus avoir, annonça-t-elle soudainement. — Hmm ? Je m’aendais à une de ses réactions comiques, mais je reçus un sourire audacieux à la place. Elle n’était pas comme d’habitude. — Nous avons des examens demain, non ? — En effet, approuvai-je. Des tests avaient lieu à des périodes similaires aux écoles japonaises, à la seule différence que ce n’était pas les mêmes sujets. En l’occurrence, la culture, l’étiquee et la magie. D’après les documents du jeu, la magie n’était pas incluse avant l’instauration de la nouvelle politique au mérite. Le monde de Revolution était en pleine évolution suite à la découverte des pierres magiques. Il s’en était suivi l’invention d’objets les utilisant, changeant

22 Chapitre 1 — Réincarnée dans un Jeu de Drague totalement l’industrie. Maintenant, chaque pays se baait pour être le meilleur dans leur utilisation, et c’était notre aptitude à nous en servir qui était testée. D’ailleurs, dans ces documents se trouvait une version enfant de Lady Claire, et elle était à croquer. Cee dernière, qui ne pouvait naturellement pas lire mes pensées, leva le menton et… — Je te défie ! Si je gagne, tu devras partir de l’académie. — Hein ? Je n’ai pas envie, refusai-je instantanément. — Il t’arrive de réfléchir avant de répondre ⁉ s’énerva-t-elle. Je n’avais aucune raison d’accepter, après tout. — La première place de l’examen d’entrée est une peureuse ? — Si je pars, je ne pourrai plus jouer à vous. — Je t’ai déjà dit que c’était « avec » ! — Ha ha ha ! Je ne vois pas le problème. — C’est moi qui suis bizarre ⁉ Aaah, qu’est-ce que je m’amuse. Alors que je la taquinais, je me rendis compte que c’était l’un des évènements du jeu. Tout au long de l’histoire, Lady Claire défiait l’héroïne, et ici était le premier cas. Lors de la première partie, le joueur n’avait pas suffisamment de connaissances, ce qui rendait le combat difficile. — Allez, accepte ! — Hmm… Dans ce cas, si je ne perds pas, vous devrez réaliser mon souhait. — Pourquoi devrais-je ? — Oh ? La première place du classement intérieur est une peureuse ? L’Académie Royale allait de la maternelle jusqu’à l’enseignement supérieur. Ceux qui y étaient depuis le début appartenaient au groupe intérieur, et ceux qui arrivaient en cours de route au groupe extérieur. L’héroïne se situait dans le top de ce dernier, et Lady Claire dans celui du premier. Il allait sans dire que son groupe ne voyait pas le mien d’un bon œil, considérant qu’il était majoritairement composé de gens du peuple. Imaginez la tragédie lorsqu’un aristocrate se retrouvait dans la même chambre qu’un roturier au dortoir.

23 — Tu me provoques ? Très bien, je suis partante. — Merci beaucoup. — Pourquoi me remercies-tu ? Va plutôt préparer tes bagages. — Merci de m’encourager ! — Je ne l’ai pas fait ! cria-t-elle, avant de soupirer. Misha ! — Oui ? répondit cee dernière, qui était restée spectatrice jusque-là. — Tu veux bien être notre témoin ? Si j’obtiens une meilleure note qu’elle, elle devra partir d’ici. Si je n’y arrive pas, je réaliserai un de ses souhaits. — C’est le Roi qui décide de qui peut être dans cee école. Je ne pense pas que vous puissiez changer ça, remarqua Misha. — Voyons, je ne ferai rien. Cee roturière s’en ira de son plein gré, embarrassée par son manque de talent, se moqua Lady Claire, comme si elle avait déjà gagné. — Ça te va, Rae ? me demanda ma meilleure amie. — Pas de souci, approuvai-je. — Et pour être certaine qu’elle ne brise pas sa promesse, tu es notre témoin, Misha. Tu as tout compris, roturière ? — Oui ! Je suis tout excitée rien que de penser à ce que je vais vous faire faire ! — Il est impossible que je perde ! Maintenant, jure sur Dieu ! — Je jure sur Dieu ! — J’ai bien été témoin de votre accord… Dans ce pays, jurer sur Dieu avait une énorme signification. Briser un serment était très mal vu, que l’on soit noble ou roturier. Ainsi commença notre bataille. Le jour J arriva. Tout d’abord, la culture. Le test incluait l’histoire du pays, sa liérature, et autres connaissances. Par exemple : Expliquez les points négatifs de la réforme instaurée par le Roi Koulie III lors de la grande famine de 1927, puis proposez des solutions.

24 Chapitre 1 — Réincarnée dans un Jeu de Drague Expliquez les défauts d’une des industries du royaume, puis proposez des solutions. Créez un poème dans le style ancien. Et plein d’autres encore. Ces questions n’avaient rien à voir avec le quotidien. Contrairement au peuple, qui avait un taux d’alphabétisation faible, les aristocrates tels que Lady Claire avaient l’avantage. Comme cela valait un tiers du score total, ce n’était pas rien. — C’était compliqué…, soufflai-je. Il était possible d’étudier pendant le jeu, ce qui permeait d’élargir ses connaissances petit à petit avant l’examen. Heureusement, bien que les questions soient sous forme de rédaction, les réponses étaient à choix multiples. Cependant, il y en avait une tonne, aussi la plupart des joueurs trichaient avec un guide. Pourquoi s’embêter, après tout. Ensuite vint l’étiquee. Nous étions jugés sur notre aitude et nos manières lors d’un banquet. Le test commençait même avant, puisque le choix de notre tenue, notre façon d’entrer dans la salle et nos salutations étaient inspectés. Pendant le repas, il ne fallait pas seulement faire aention à notre utilisation des couverts, mais aussi à où nous regardions. Comme le précédent sujet, une noble telle que Lady Claire avait un avantage écrasant. La différence entre les groupes intérieur et extérieur demeurait flagrante. — C’était fatigant de le faire pour de vrai… Cee fois encore, c’était des choix dans le jeu. elle couleur choisir pour la robe, quelle salutation utiliser à l’entrée, où regarder, et autres. Bien sûr, le guide restait le meilleur ami des joueurs. Jusque-là, tout était en faveur du groupe intérieur. Mathématiquement parlant, mes chances de gagner étaient quasi nulles. Toutefois, le test de magie changeait la donne. Le peuple pouvait bare la noblesse. Après tout, il s’agissait du seul élément nécessaire pour intégrer l’académie de l’extérieur.

25 La méritocratie du roi était surtout fixée sur l’aptitude magique. Le pouvoir d’utiliser des objets magiques pouvait être inné, ou obtenu a posteriori, mais le premier cas était le plus nombreux, sans différenciation entre les aristocrates et les roturiers. Le prétexte de cee politique était de calmer les plaintes du peuple. Cependant, la réalité était que le roi avait surtout peur que Bauer soit abandonné dans les vestiges du temps. Il s’agissait d’ailleurs d’une autre des raisons de l’opposition de l’aristocratie à cee politique, puisque l’aptitude magique n’avait rien à voir avec la famille ou la lignée. Bien sûr, quelques rares roturiers étaient doués en culture et en étiquee. Toutefois, ces précieux cas convoités restaient des exceptions. L’examen de magie équivalant à un tiers du score total montrait le changement d’époque, et son importance allait sûrement grandir au fil des années. Le test avait lieu en extérieur et était divisé en deux parties. L’aptitude magique et l’utilisation d’objets magiques. La capacité magique était mesurée avec un outil spécial permeant de connaître son affinité entre terre, eau, feu et vent. En général, chaque personne possédait une affinité, et l’ampleur était classée entre aucune, légère, moyenne, grande et immense. Il existait une possibilité de l’améliorer, mais le facteur de naissance était immuable. Au fait, Lady Claire a une grande aptitude pour le feu. Ça lui va bien, non ? On ressent l’intention des créateurs. L’utilisation se faisait avec une baguee magique. Il s’agissait d’un outil multiusage permeant de nombreuses choses. Pour l’examen, le but était de tirer une boule d’énergie de notre affinité le plus loin possible. — C’était le plus facile des trois, affirmai-je. Dans Revolution il fallait choisir l’action d’entraîner sa magie avant le test, qui était un jeu de rythme. Pas de choix, ni besoin de tricher. Juste avoir le bon timing, rien de compliqué. Au passage, certains fans rivalisaient pour la plus grande distance. C’était même affiché sur le site officiel, et le premier du classement gagnait des goodies.

26 Chapitre 1 — Réincarnée dans un Jeu de Drague Mais honnêtement, considérant que lors de ma dernière vérification, il avait un score dix fois plus haut que la moyenne, il devait être plus intéressé par la frime que les cadeaux. Bref, voici comment s’était passée ma journée. J’étais lessivée. — Et donc, je suis venue vous voir pour reprendre des forces ! m’exclamai-je. — Pourrais-tu retourner dans ta propre chambre… ? Lady Claire semblait fatiguée, et elle me chassa aussitôt. elle tristesse… ◆◇◆◇◆ Trois jours plus tard, les résultats étaient sur le point d’être affichés. — Tu as des cernes sous les yeux. Après les cours, Lady Claire m’adressait la parole alors que j’aendais devant le panneau d’affichage. — Oui, je n’ai pas réussi à dormir… — Oh ho ho, ma pauvre. Toutefois, une promesse est une promesse. — C’est parce que je pensais à ce que j’allais vous faire faire que je n’ai pas fermé l’œil de la nuit. — C’est ta raison ⁉ Après tout, il s’agissait d’une situation inédite et impossible dans le jeu. — Tu crois pouvoir gagner ? Tu es bien optimiste. Elle était sûre d’elle et ne doutait pas de sa victoire. Ce qui était tout à fait logique de son point de vue. — Nous verrons bien les résultats, déclarai-je. — Je ne pense pas que ce soit nécessaire. — Ha ha ! Vous vous entendez bien toutes les deux, nous interrompit Lord Yu. Tu es confiante, Rae ? — Plutôt. — Ha ha ! J’ai hâte. Et toi, Misha ? — J’ai fait de mon mieux.

27 Celle-ci n’avait pas l’air très heureuse de la présence du garçon dont elle était amoureuse. La faillite de sa famille et le talent de ce dernier lui faisaient croire qu’elle n’était pas digne de lui. Et pourtant, son cœur brûlait toujours pour lui. L’amour, c’est pas facile. — J’me demande bien qui va être deuxième, s’incrusta Lord Rod à son tour. Sa réplique empestait la confiance en soi et le fait qu’être premier lui paraissait l’évidence. J’ai vraiment du mal avec lui… Plus loin, dernière nous, se tenait Lord Seine, découragé. Il ne devait pas avoir hâte que son incompétence soit exposée devant tout le monde. Cependant, aention, il ne fallait pas se méprendre. Lord Seine n’était pas mauvais, ses frères étaient juste exceptionnels. — L’heure est venue, nous prévint Misha en voyant un membre du personnel s’approcher avec plusieurs rouleaux de papier. — Prête ? me provoqua Lady Claire. — Prête à profiter de vous. En premier fut collée la feuille contenant les résultats de la culture. Résultats du Test de Culture 1er : Rod Bauer (100 pts) 2e : Yu Bauer (98 pts) 2e : Rae Taylor (98 pts) 4e : Claire François (95 pts) … … 7e : Misha Yur (90 pts) … … 10e : Seine Bauer (87 pts)

28 Chapitre 1 — Réincarnée dans un Jeu de Drague — Comment ⁉ s’écria Lady Claire. De mon côté, j’étais déçue d’avoir raté deux questions. — Oh ! J’savais que j’allais être premier et Yu deuxième, mais tu te démerdes bien, Rae. — En effet, bien joué. — Merci à vous, retournai-je aux princes en regardant Lady Claire. Cee dernière, en tant qu’aristocrate, semblait choquée d’avoir été baue par une roturière. Précédemment, j’avais mentionné que la plupart des joueurs utilisaient un guide. Ce n’était pas mon cas. J’avais appris toutes les questions et réponses de l’examen par cœur. La raison était simple : j’écrivais et vendais des fanfictions de Revolution. Ainsi, il fallait que mes connaissances soient parfaites. Bien sûr, il n’y avait pas besoin d’être aussi hardcore que moi en temps normal. Simplement, mes romans portaient sur Lady Claire après la fin du jeu, et sur la façon dont elle pourrait sauver son territoire après sa ruine. Pour ça, je devais connaître chaque détail du monde de Revolution. J’avais acheté tous les documents existants et les avais lus tellement de fois que j’avais abîmé les livres. Honnêtement, je crois même que je suis plus calée sur ce monde que les créateurs. Bref, mes chances de perdre sur la culture étaient donc nulles. Aucune surprise sur ma victoire. ant à Lady Claire, elle tremblait, serrant son poing si fort qu’il était blanc. Ensuite vint l’étiquee. Résultats du Test d’Étiquee 1er : Yu Bauer (100 pts) 2e : Rod Bauer (98 pts) 3e : Claire François (97 pts) 4e : Seine Bauer (95 pts) …

29 … … 8e : Misha Yur (90 pts) … … … 22e : Rae Taylor (75 pts) Le visage de Lady Claire reprit des couleurs, et elle se tourna vers moi, l’air triomphant. Trooooooop mignonne. — Le premier était un coup de chance. Ta véritable valeur se révèle. — En effet, confirmai-je. Elle avait raison. Je connaissais tout ce qu’il fallait faire, mais savoir et pouvoir étaient deux choses différentes. Au lycée, j’étais allée au club d’étiquee en kimono. Cependant, les cultures du Japon et de ce monde demeuraient distinctes. Il m’était donc impossible de m’y habituer en si peu de temps. Je ne faisais pas le poids face à Lady Claire, une noble. Au contraire, avoir aeint la vingt-deuxième place constituait la preuve de ma persévérance. Enfin, la magie. Résultats du Test de Magie 1ère : Rae Taylor (immensurable) 2e : Misha Yur (98 pts) … … … 6e : Claire François (92 pts)

30 Chapitre 1 — Réincarnée dans un Jeu de Drague … 8e : Seine Bauer (90 pts) 9e : Rod Bauer (88 pts) 9e : Yu Bauer (88 pts) — Co… comment ? Lady Claire fut choquée pour la deuxième fois. ant à moi, j’étais aux anges. Pour vous dire la vérité, le résultat était scripté. En effet, l’héroïne avait une affinité pour deux éléments : la terre et l’eau. En avoir plusieurs était impressionnant en soi, et encore plus sachant qu’elles se situaient au rang d’immense. L’aptitude à utiliser les objets magiques étant généralement équivalente au rang de l’affinité, j’étais le top du top. Mon destin voulait que je sois première. Pour finir, la note finale. Score Total 1er : Rod Bauer (286 pts) 1er : Yu Bauer (286 pts) 3e : Claire François (284 pts) … 5e : Misha Yur (278 pts) … … … 10e : Seine Bauer (272 pts) *Les résultats de Rae Taylor étant spéciaux, nous sommes contraints de la retirer du classement. L’académie a pour objectif de revoir ses méthodes d’évaluation d’ici les prochains examens.

31 C’était parce que mes notes de culture et d’étiquee étaient suffisamment hautes que l’on obtenait ce résultat. Il fallait donc quand même faire un effort pour y arriver. — Je ne comprends pas…, marmonna Lady Claire en mordant sa lèvre. — Mais vous êtes troisième juste après les deux princes ! — Tout à fait ! C’est impressionnant ! Ses suivantes la rassuraient. — En… en effet, vous avez raison. Et au moment où elle commençait à aller mieux… — Laaaadyyyyy Claiiiiire ! l’approchai-je, lui faisant pousser un petit cri. Voyons, n’agissez pas comme si j’étais un monstre ! — Ce n’est pas le cas, réfuta-t-elle. ’y a-t-il ? Comme tu peux le voir, notre défi est invalide. — Non ? Vous n’avez pas gagné, après tout. — Hein ? Elle n’avait toujours pas remarqué. — La promesse était que je parte si vous obteniez une meilleure note, et que vous écoutiez mon souhait si vous n’y arriviez pas, citai-je. — Je me répète, notre défi est invalide. — Et donc, ça veut dire que vous n’avez pas gagné. — Ah… Elle comprenait enfin. Ma condition de victoire n’était pas sa défaite. Il suffisait qu’elle ne triomphe pas. — C-c’est déloyal ! se plaignit-elle. — Je sais, c’était le but ! — Dans ce cas, cela ne compte pas ! — Vous brisez votre promesse ? Alors que vous avez juré sur Dieu ? Son joli visage grimaça. Elle n’était pas d’accord ; or, sa fierté d’aristocrate l’empêchait d’aller à l’encontre de son serment envers Dieu. — el est ton désir… ?

32 Chapitre 1 — Réincarnée dans un Jeu de Drague — Je savais que vous accepteriez ! Je vous aime ! — Arrête tes soises et parle ! hurla-t-elle, emportée par la colère. — N’abandonnez pas. — Hein ? — oi qu’il vous arrive et peu importe combien vous souffrez, n’abandonnez pas jusqu’à la toute fin. Elle écarquilla grand les yeux en entendant mes mots. C’était un souhait gentillet, mais très important. — C’est… tout ? — Oui. — Je pensais que ta demande serait plus… excessive. — Vous voulez que je change ? — Non, c’est bon ! s’empressa-t-elle. Toujours aussi franche. Elle se remit de sa surprise, redressa son dos et me regarda droit dans les yeux. — Je jure sur Dieu de ne jamais abandonner et de garder espoir jusqu’à la fin, déclara-t-elle. — C’est merveilleux, Lady Claire. Tout comme sa beauté lors de ce serment. — Je ne perdrai pas la prochaine fois, lança-t-elle galamment, avant de se retourner pour partir. — Ah, aendez, l’arrêtai-je. — Autre chose… ? — Je vous aime ! — Et moi je te déteste ! Au revoir, bonne ambiance. Bonjour, la Lady Claire habituelle. ◆◇◆◇◆ Revolution était une simulation romantique.

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