SHINANOGAWA © 1973 by HIDEO OKAZAKI, KAZUO KAMIMURA

une société japonaise patriarcale et aux règles inflexibles, avec un souffle épique semblable à celui qui porte lesman- gasd’action. Pour bousculer lesmœurs, Kamimura s’échine à dépeindre les hommes et les femmes dans l’abandon sexuel, multipliant les scènes crues, les relations adultères, les rapports de force et les élans passionnels. Dans ses livres, le libertinage est l’un, si ce n’est le seul vecteur de sincérité, un acte authentique où les sentiments ainsi que la nature humaine reprennent enfin le dessus sur le diktat des conventions sociales et morales. Kamimura propose ainsi une vision dumonde où la sexualité sans contraintes est la plus pure des formes d’expression. Ce qui rend, par contraste, les nombreuses situations où il présente des femmes entravées par lemachisme d’autant plus destruc- trices et violentes. Aussi différents soient-ils l’unde l’autre, le thème de la vengeance et le langage des fleurs sont par ailleurs deux des motifs les plus importants de l’univers de l’auteur, et là encore, ils éclairent le récit. Le Fleuve Shinano apparaît finalement comme une per- formance d’écriture poétique qui doit beaucoup au dessin deKazuoKamimura. SiHideoOkazaki s’estchargéd’enrichir le contexte historique, de construire une trame narrative cohérente et d’écrire les dialogues, comme en témoignent les rares pages de script ayant survécu à cette époque, les personnages, leurs angoisses et leurs destinées, ainsi que la mise en scène et le découpage, sont entièrement de la main de KazuoKamimura. L’auteur parvient ici à décupler la puissance de sa peinture de la passion charnelle. STÉPHANE BEAUJEAN directeur artistique du Festival International de la Bande Dessinée d’Angoulême

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