HANA OTOKO Volume 1 by Taiyou MATSUMOTO © 1998 Taiyou MATSUMOTO
Comme dans L’Idiot de Dostoïevski, le personnage du père n’a pas une once de sens commun. C’est à l’enfant d’incarner la maturité. Ces motifs de l’enfance entravée et de la complémentarité des relations humaines – proche de la notion du Yin et du Yang – apparaissent ici pour la première fois dans l’œuvre de Matsumoto. Dès lors, ils reviendront invariablement structurer les histoires à venir. Malgré sa cellule familiale dysfonctionnelle, Le Rêve de mon père se fait plus joyeux et optimiste que les précédentes créations. L’innocence surnage, portée par un dessin qui s’éloigne du réalisme pour s’engou rer dans l’imaginaire et l’allégorie. Le trait se fait plus libre, l’encre noire qui maculait les pages s’évanouit, des pointes d’humour fleurissent dans le décor, et la représentation de l’environnement devient extravagante, voire onirique. La mise en scène évolue de concert : des gros plans excessivement resserrés, des plongées et contre-plongées vertigineuses, des déformations de perspectives apparaissent et préfigurent un style bientôt inimitable. L’exubérance poétique du dessin étonne terri- blement, tant elle contraste avec la noirceur réaliste et désespérée des premières œuvres, baignées par la violence et la mort. Désormais, la peinture du monde, quand bien même elle se montre sombre, s’ourle d’un imaginaire visuel luxuriant. Pour raconter cette relation filiale, véritable mystère pour un mangaka qui a grandi loin de ses parents, mon analyse est que Matsumoto va puiser en partie dans ses références artistiques. De l’oscarisé Fields of Dreams , avec Kevin Costner, Matsumoto reprend le thème du base-ball, loisir parmi les plus populaires au Japon et aux États-Unis, comme passion fédératrice, trans- cendant les classes sociales comme les conflits de générations. Du film Over the Top , avec Sylvester Stallone, il emprunte le thème des retrouvailles entre un père marginal et son fils marqué par une éducation bourgeoise : deux êtres qui ne se connaissent pas et doivent apprendre à vivre ensemble. Enfin, du roman Papa tu es fou de William Saroyan, il extrait la touchante excentri- cité du père, aussi virtuose avec une batte de base-ball à la main que démuni devant les préoccupations les plus élémentaires de la vie quotidienne.
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