© 1971 by The Hoshi Library / SHINCHOSHA Publishing Co.,Tokyo

Ça y est ! Je suis désormais suffisamment proche pour distinguer son vaisseau en- dommagé à l’œil nu. « Hé ! Bonne nouvelle ! Je te vois ! J’y suis presque ! » Je corrige subtilement ma trajectoire et continue de me rapprocher avec la plus grande prudence. L’homme n’a toujours pas réagi à ma précédente remarque. Alors je le relance. « Hé ! Réveille-toi ! » Toujours aucune réponse. Se serait-il endormi ? Paniqué, j’insiste de plus belle. Deux fois, trois fois... « Oui... », finit-il par prononcer. Que je suis rassuré, il est encore vivant ! Mais sa voix est à la limite du perceptible. Au moindre temps mort de ma part, il est clair que son cerveau finira par lâcher prise. Et là, il ne se réveillera plus. Il doit donc parler ! Parler ! Dire quelque chose ! N’importe quoi ! « Et où habites-tu dans le District A ? Parce qu’il me faudra bien une adresse plus précise si je veux qu’on trinque un bon coup ! - Le building 302... » Mon vaisseau n’est plus qu’à quelques mètres du sien. À cette distance, si nous avions été sur Terre, il aurait même pu m’entendre l’appeler. Je pianote du mieux que je peux sur une tripotée de boutons sur mon tableau de bord, de façon à stopper mon appareil à côté du sien. « Voilà, je suis juste à côté ! Tu tiens bon là-dedans ? Au fait, je ne t’ai même pas demandé comment tu t’appelais ! » Je tente d’entretenir le dialogue, tout en enfilant ma combinaison spatiale au plus vite. Un chuchotement inaudible me parvient au moment où je m’apprête à enfiler mon casque d’astronaute. « Quoi ? Je n’ai pas bien entendu ! Tu veux bien répéter ? » Il répète. Cette fois, bien que sa voix soit des plus faibles, j’ai parfaitement compris. Je repose finalement mon casque et me sers un verre d’eau de vie. Je n’ai finalement plus qu’à attendre quelquesminutes que le froid fasse sonœuvre et emporte ce naufra- gé dans un sommeil irréversible. Ensuite, je n’aurai qu’à remorquer son vaisseau abîmé vers la Terre. Tant pis, ma cinquante-et-unième luciole peut bien attendre encore un peu. Au diable humanisme, chauvinisme et autre patriotisme ! Je vous le demande. Qui serait assez bête pour secourir celui qui a jadis osé poser ses mains sur votre femme ? L’EXPÉRIENCE «  Chéri ? ». La jeune femme interpella sonmari. Ce dernier releva la tête et lui répondit avec une moue passablement contrariée. - Quoi encore ? Tu vois bien que je suis occupé, non ? - Justement, peux-tume dire quand tu comptes en finir avec tes expériences qui ne mènent visiblement à rien ? - Je ne sais pas ! Il m’est difficile d’évaluer si je suis proche ou encore très loin du but… - Et qu’est-ce qui est le plus important ? Moi ou tes recherches ?, lui lança-t-elle au visage. - Écoute, tu sais bien que… là n’est pas la question ! - Si, justement !, cracha-t-elle avec véhémence. L’homme tenta de se justifier calmement. - Bon, j’admets que j’ai du mal à expliquer clairement pourquoi je suis à ce point obnubilé par mes recherches. Mais il y a quelque chose… comment dire…mon instinct me hurle que si je réussis, alors ce sera révolutionnaire ! - Mais tu vois bien que tout cela ne te mène à rien !, finit par s’emporter la femme. Occupe-toi plutôt demoi au lieu de perdre ton temps à ces expérimentations stupides ! - Mais…, se contenta de répondre l’homme, visiblement piqué au vif. - Je veux que tu cesses tes gamineries, tu m’entends ? Et trouve-toi un vrai travail ! Et j’ai envie d’une nouvelle fourrure… - Sois patiente ! Je t’ai promis que tu l’aurais, ta nouvelle fourrure… - Non, j’en ai assez d’attendre !, insista-t-elle. Si jamais tu continues comme ça, je te préviens, je m’en vais !

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