Youth Litterature 1 - La déchéance d'un homme - Actualité anime

Youth Litterature 1 - La déchéance d'un homme : Critiques

Critique du dvd : Youth Litterature 1 - La déchéance d'un homme

Publiée le Mercredi, 23 Mars 2011

« J'ai vécu ma vie dans la honte ».

Dans le Japon d'entre-deux-guerres, un homme cherche un sens à son existence. Enfant, Yozo parvient à se faire accepter en jouant le pitre. Renié par son père, il décide de ne revenir le voir qu'une fois devenu un grand peintre. Jeune homme, il vit différentes histoires d'amour, dont l'une le conduira à sa perte. Subissant l'influence malsaine d'un de ses camarades, sombrant dans l'alcool, la folie l'emporte.

Tiré d'un roman de Osamu Dazai, un des auteurs nippons les plus célèbres, l'adaptation en anime de la Déchéance d'un homme a fait beaucoup de bruit dans l'Archipel. A l'origine de cette adaptation, le studio Madhouse, qui a décidé de lancer un nouveau type de séries, les Aoi Bungaku (Youth literature), inspirées des nouvelles et romans les plus reconnus au pays du Soleil levant. La Déchéance d'un homme étant présenté comme le roman le plus lu au Japon, un poids important pesait sur les personnes en charge du projet. Parmi celles-ci, on retrouve Takeshi Obata (dessinateur de Hikaru no Go et Death Note) au chara-design ainsi que Morio Asaka à la réalisation (Mermaid Forest, Gunslinger girl). L'adaptation du roman est plus ou moins fidèle. L'essence-même de la Déchéance d'un homme est sauvegardée puisqu'on retrouve un pessimisme mêlé à l'ironie, pour un résultat tout en contraste.

Cet anime, comme le roman, reprend un aspect autobiographique. La vie de Yozo ressemble à s'y méprendre à celle de l'écrivain Osamu Dazai. Dans le roman, on peut clairement faire la différence entre l'enfance, la jeunesse et la tentative de suicide et enfin la fin de vie de Yozo, entouré par les femmes. Même si l'anime se décompose en trois parties, tout n'est pas aussi clair dans la séparation narrative que peut l'être le roman, mais cela n'est pas un problème. L'histoire commence donc avec un Yozo militant politique dans un Japon des années 30 en pleine crise sociale. Son enfance sera narrée par flash-backs, et on comprendra vite que l'origine de ses maux sont des rapports pathologiques avec son père. Si Yozo parvient à se sortir des influences néfastes d'un père dominant et d'un camarade d'enfance pernicieux, un facteur déclencheur aura raison de sa stabilité psychologique : la rencontre avec une femme avec qui il entreprendra de se suicider. Elle mourra. Lui survivra. Il sera accusé par « le monde » autour de lui d'avoir tué cette femme. Yozo ne s'en remettra pas. Suivront des relations avec d'autres femmes et une longue descente aux enfers.

Au niveau de la narration, on dénote une certaine lenteur en première partie, jusqu'à la tentative de suicide. Puis on enchaîne sur quelques lourdeurs, à savoir que la réalisateur a vraiment voulu insister sur l'importance de la tentative de suicide et son impact. S'ensuivent par conséquent des hallucinations multiples... et trop nombreuses. Pour autant, la seconde partie de la Déchéance d'un homme est excellente. Le parcours de Yozo dans les déceptions toujours plus accablantes est un régal sadique pour le spectateur. Le ton pessimiste et ironique de l'oeuvre originale est parfaitement retranscrit à l'écran. Malgré un rythme faiblard au début, la Déchéance d'un Homme s'en sort donc avec brio en tant qu'excellent film sur la douleur humaine. Ce constat peut s'appuyer sur pas mal de trouvailles du réalisateur. L'une de ces trouvailles notamment doit être soulignée. Ainsi Yozo ne cesse d'entrevoir une entité difforme, qu'il cherche à fuir, présentée comme un fantôme : celui du chagrin, de la haine, du désespoir ? On ne sait pas vraiment, toujours est-il que ce drôle de bonhomme peu engageant apparaît tel Nemesis chaque fois que Yozo est au bord du gouffre. Chaque apparition intrigue en plus d'inquiéter, contribuant à renforcer l'aspect le plus réussi du film : la retranscription du style sombre et pesant de l'écrivain. L'aspect graphique de cette entité, aspect qui tranche avec le reste de l'anime, donne toute une puissance particulière à ce drôle de personnage.

S'agissant de l'aspect graphique justement, le réalisateur a su donner un cachet particulier à l'ambiance générale. L'atmosphère oppressante s'appuie sur un filtre graphique, donnant un aspect flouté, tel un brouillard, présent tout au long du film. La dualité des décors impressionne. L'on a affaire soit à des décors froids, conçu à partir d'un gris cassant, soit à une atmosphère faite de couleurs chaudes suintantes rappelant à s'y méprendre le cultissime Jin-Roh. L'animation n'est pas en reste avec tantôt une impression de vitesse s'agissant des phases de course, tantôt des corps démembrés sombrant dans la folie. Le réalisateur a fourni un travail impeccable qui permet de servir l'oeuvre à merveille !

Côté sonore, tout s'avère discret, contribuant là encore à transcender une ambiance inquiétante. On préfèrera évidemment la VO, parfaite, avec un célèbre doubleur pour Yozo qui joue son rôle tout en abnégation, puisque jamais les cris poussés ne sont déplaisants. La VF n'est pas en soi mauvaise : Kaze a fait bien pire, et on se situe dans le cas présent plutôt dans le haut du panier. Mais la Déchéance d'un homme étant issue du patrimoine littéraire japonais, opter pour la VO permet de se plonger davantage dans l'ambiance.

Les bonus proposent un entretien entre le réalisateur Morio Asaka et le réalisateur d'une autre série Youth literature qui s'avère court mais très instructif. L'on a aussi droit à 4 clips replaçant l'adaptation animée dans son contexte. Tout cela permet de continuer l'expérience d'enrichissement littéraire/cinématographique. Notons aussi la présence des habituels bonus Kaze (bande-annonces anime et mangas, clips musicaux...).

Excellente initiative donc de la part de Kaze de nous proposer ce titre dans une nouvelle collection très prometteuse : Kaze Neo, destinée à un public plus mature à la recherche d'expériences atypiques.

La Déchéance d'un homme est à réserver à un public averti, initié à la littérature nippone, qui pourra saisir toute la richesse de ce genre d'adaptation. Accepter un rythme particulier et quelques lourdeurs ne peut se faire qu'en connaissant les grandes lignes de l'oeuvre originale et le parcours de son auteur.

Un anime passionnant et enrichissant, qui jouit d'une ambiance générale très travaillée, qui donne vraiment envie de découvrir l'oeuvre originale et son auteur.

Critique 1 : L'avis du chroniqueur
RogueAerith

17 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs