Edgar de La Cambriole - Film 2 - Le Château de Cagliostro (Kaze) - Actualité anime

Edgar de La Cambriole - Film 2 - Le Château de Cagliostro (Kaze) : Critiques

Critique du dvd : Edgar de La Cambriole - Film 2 - Le Château de Cagliostro (Kaze)

Publiée le Mardi, 31 Mai 2011

On connait beaucoup le Hayao Miyazaki de Ghibli, et l’on a forcément entendu parler du grand Isao Takahata par le splendide Tombeau des Lucioles, entre autres. Ces deux amis se sont rencontrés pourtant bien avant la création du studio, et dans Le Château de Cagliostro c’est de leur association que nait un excellent film. Lupin III, le nom original de la série, aura de nombreuses fois été adapté en séries ou en longs-métrages, mais seul Cagliostro aura réussi à se trouver un certain public, quoiqu’encore assez modeste. Remis au goût du jour sous une excellente initiative de Kaze, c’est l’occasion de découvrir non seulement l’origine des inspirations de Miyazaki mais aussi son talent, déjà débordant. On part alors à la découverte des aventures d’Edgar (alias Lupin III, à l’origine), gentleman cambrioleur très doué, coureur de jupons et particulièrement aventureux. Son prochain but ? Enquêter sur le petit royaume de Cagliostro, qu’il soupçonne être responsable d’un commerce de faux billets particulièrement ressemblants. Mais il va tomber sur une jeune fille en détresse qu'on souhaite marier de force, et son sang de sauveur au grand cœur ne fait qu'un tour ...

On découvre immédiatement que le décor, loin du Japon, se place dans une Europe imaginaire que les réalisateurs japonais affectionnent tout particulièrement. On pourrait se trouver en France ou en Allemagne au vu des décors, mais Cagliostro est un véritable monde à part retenant toutes les attentions, par ses châteaux alambiqués, ses secrets moyenâgeux et ses paysages stupéfiants. C’est d’ailleurs là bien une des marque principale du réalisateur, les décors ! On sent que le tracé des architectures a été fait avec soin, et les plans réalisés tout au long du film sont simplement magnifiques, chatoyants de couleurs et se figeant parfois dans le temps, nous offrant un aperçu des esquisses de Miyazaki ... C’est un cinéma autrement, avec un soin tout particulier apporté à l’environnement de nos héros, qui a lui seul nous permet de rêver et de se retrouver dans un monde qui, si nous le connaissons, fera voyager plus d’un étranger ! Mais les décors à eux seuls ne font pas toute la réussite du film, loin de là ! Dans cette idylle pastel, l’histoire se bouscule à nos yeux tout comme le charisme de ses personnages ! Une richesse incroyable, digne du talent de cambrioleur d’Edgar, nous attend dans le scénario, nous faisant constamment sombrer quelque part entre action, humour et émotion. L’équilibre entre le drame et le rire est d'ailleurs une chose très importante dans le film, et les réalisateurs s’en sortent très bien ! On pourra évoquer les hilarités déclenchées aux courses poursuites ou alors sur les postures et attitudes d’Edgar complètement loufoques, mais aussi des moments plus forts comme les morts de certains sbires (écrasés par un rouage) ou du comte, assez violentes dans leur ensemble. Le duel entre les deux partis de l’histoire reste d’ailleurs un moment haut en couleurs, et la méchanceté du comte rend ce moment particulièrement fragile. Et à côté de cela, il y a la fin, merveilleuse ode à la poésie et à la beauté, lorsque le trésor des Cagliostro nous est dévoilé et qu’un nouveau commencement émerge de ce qui a disparu.

Notons que, contrairement aux récits assez linéaires qui peuplent à présent le studio Ghibli, le Château de Cagliostro se découpe nettement en deux parties, ce qui rend le tout d’un dynamisme à toute épreuve. En effet, il y a l’étape de la découverte et de la première bataille contre le Comte, avant que l’échec ne rattrape nos héros et qu’ils doivent, dans un second temps, s’armer de plus de patience et de stratégie pour venir à bout de leur ennemi. Clarisse se révèle d’avantage dans la seconde partie mais malheureusement, et c’est sans doute le réel point noir de ce film, elle n’a pas la force et le charisme des habituelles héroïnes de Miyazaki. Heureusement, « Magali » est là pour relever franchement le niveau, mais il manque cette dimension féminine qui, par la suite, influencera chacun des films du réalisateur. Et pourtant, sur la course en voiture du début, on y croyait presque ... On accède pourtant aux autres thèmes qui lui sont chers : nature, avec des paysages splendides et la révélation à couper le souffle du trésor des Cagliostro, mais aussi les « monstres étranges », qui ne sont ici pas des tas de boues en mouvement mais des ninjas dépersonnalisés, agissant comme des marionnettes automates et assez effrayantes, d’autant qu’elles sont particulièrement résistantes. Et bien sûr la liberté, le vol, avec un hélicoptère ou simplement l’impressionnante capacité d’Edgar à défier la gravité. Course de voitures sur le versant d’une falaise, nage dans le vide ou dans le courant d’une eau vive, bonds dans l’air qui le propulsent on ne sait comment ... Ce héros se joue des règles des hommes, quelles qu’elles soient, et c’est une des caractéristique qui lui convient le mieux. Il est, de plus, la stabilité dans ce monde manichéen et ce, malgré ce qu’on pourrait croire.

En effet, le Comte représente sans hésitation le mal, la force obscure de ce monde. Cupide, vil, menteur et traitre il s’entoure de sbires tout aussi mauvais et n’aspire qu’à la gloire et la richesse. De l’autre côté, Clarisse qui doit devenir son épouse sous la contrainte malgré sa pureté et sa représentation parfaite de la Bonté, de la lumière de cette histoire. Elle est pure, naïve, et c’est d’ailleurs pour cela que personne ne pourra la souiller, pas même Edgar. Car lui est la stabilité, entre les deux extrêmes, avec une certaine honnêteté et un sens de l’honneur et du courage avancés, tout en assumant parfaitement sa part d’ombre contre laquelle il lutte à la fin du film. C’est d’ailleurs parfaitement illustré dans la séparation des deux jeunes gens, puisque le jeune homme ne peut salir Clarisse qui, par sa gentillesse et son amour pour lui, serait prête à devenir une voleuse. Un moment rempli d’une émotion mélancolique comme on la connait déjà dans les futures œuvres du maître ... Il n’y a, pour Edgar, que les femmes instables, traitresses et insupportables, tantôt amie tantôt ennemie, comme Magali sait l’être. En parlant des autres personnages, notons que la répartition des rôles est simple de visu et bien dosée, en théorie. Jigen, par exemple, est le second, compagnon d’armes indispensable à la réussite du héros. A la fois confident et moraliste, c’est un personnage mystérieux de par son chapeau mais dégageant un important charisme, qui arriverait à certains moments à se montrer digne d’Edgar. Par contre Goemon est largement sous-estimé, arrive de nulle part et n’est pas réellement justifié autrement que par sa dévotion et sa capacité de combat. L’inspecteur japonais, enfin, a quelques apparitions remarquables et nous fait penser à un Javert poursuivant Jean Valjean, la dualité de choc pour un comique de situation réussi ! Miyazaki marque alors son idée très intime de Lupin III : un Edgar humain, drôle, généreux et chevaleresque avant tout et quel qu’en soit le risque. Bien loin de l’idée d’origine ...

Pour les traits graphiques, pas grand-chose à relever si ce n’est la beauté des paysages qu’on a déjà évoquée, ainsi que la clarté des couleurs et les très beaux contrastes qui rendent vivante l’image. On remarquera simplement que, contrairement à ses premières adaptations, notre gentleman est bien plus rondouillard et sympathique. Tous les traits sont alors adoucis par rapport à ceux que certains connaissent, rajeunissant les personnages et leur apportant un charme certain par l’air amical qu’ils dégagent. La musique, si ce n’est pas celle de Joe Hisaishi, est tout de même réussie : dynamique en diable, elle est souvent peu en accord avec le drame de certaines situations (la poursuite en voiture du début, par exemple, où elle est enjouée et très mutine), ce qui donne un décalage apprécié. Avec des accents jazzy ou européens, Yuji Ono place dans sa bande son des qualités certaines, inhabituelles mais bel et bien présentes. Celle-ci soutient efficacement l’action incessante du film, et on est loin des grands moments d’orchestre classique tout en romance et en voilages inutiles. Simple, efficace. Notons également qu’au niveau de l’adaptation, les voix françaises ont quelques choses d’étrange par rapport à la bande son japonaise : une certaine raideur, la voix choisie pour Clarisse est tout simplement en total décalage avec le dessin de celle-ci, et certaines intonations sonnent bizarrement. Toutefois, c’est toujours moins déstabilisant que d’écouter ces personnages, européens pour la majorité, parler en japonais, ce qui est au plus haut point étrange. A voir, donc, selon les préférences : les deux ont leurs qualités et leurs défauts.

Rien à dire au niveau de l’édition de Kaze, qui offre ici un CD de Bonus se constituant de : l’interview de Monkey Punch (l’auteur du manga), celle du directeur de l’animation et celle d’un animateur. Le plus intéressant, mis à part pour les fans inconditionnels, se situera pourtant dans les deux bandes annonces et surtout, la galerie d’images ! De très beaux croquis s’y trouvent ... Bref, en quelques mots pour résumer : Le Château de Cagliostro est un très bon film, trop souvent renié de par son âge, et la remise au goût du jour par Kaze permettra de ne pas passer à côté d’un si beau long-métrage, intéressant à plusieurs niveaux. Par sa qualité intrinsèque mais également par le travail de jeune artiste qu’est alors Miyazaki ...

Critique 1 : L'avis du chroniqueur
NiDNiM

18 20
Note de la rédaction