Conan Le Fils du Futur - Intégrale - Actualité anime
Conan Le Fils du Futur - Anime

Conan Le Fils du Futur - Intégrale : Critiques

Critique du dvd : Conan Le Fils du Futur - Intégrale

Publiée le Jeudi, 03 Septembre 2015

1978. Alors que Goldorak faisait sa première apparition sur les écrans cathodiques français, au même moment, au Japon, un animé marquait l’esprit des plus jeunes de l’époque et des plus vieux d’aujourd’hui. Conan, le Fils du Futur dessinait déjà une esquisse du futur glorieux qui attendait Hayao Miyasaki. On y trouvait ainsi pour notre plus grand bonheur thèmes, idéologies, décors fantasques et rythme soutenu, typiques de l’univers enchanteur de Ghibli.



Et après plus de quatre décennies d’existence, la puissance de son engagement et la finesse du script, de la réalisation et de l’environnement n’ont que très peu souffert du poids des années. Lançons-nous donc à sa rencontre, agiles et experts tel un kodama en furie.



Du roman à l'animé

Conan, le Fils du Futur (Conan, the Boy in Future) est une adaptation du roman The Incredible Tide (traduire "L’Incroyable Marée") d’Alexander Key paru en 1970 comme une réponse à la crainte atomique de la Guerre Froide. Comme l’indique son nom, il s’agit d’un scénario post-apocalyptique dans lequel l’homme s’apprête à répéter les erreurs de son passé. Une histoire fataliste issue d'un roman peu connu et adapté par un réalisateur à l’époque, novice. L’environnement ne semblait que peu propice à un succès d’envergure.



Bien sûr, c’était compter sans la relecture si singulière de Miyazaki qui va transformer, voire transfigurer, ce monde par sa vision avant-gardiste. Le scénario emprunte donc l’idéologie "antimilitariste" et les grandes lignes du roman sans tomber dans le plagiat grâce à la dimension unique que donne le réalisateur à sa création. Centré sur le regard insouciant et candide de Conan (aucun rapport avec le héros campé par "Schwarzi" ou le détective du même nom) et Lana, deux enfants dans la fleur de l’adolescence, Conan, le Fils du Futur est un animé porteur de messages forts. Il reste cependant extrêmement accessible par son histoire sur fond d’aventure très attractive pour les plus jeunes, et c’est en cela que réside le principal coup de génie de sa réalisation.




Miyazaki ou l’apologie de l’utopie


L’histoire, revisitée, pourrait paraître simple à première vue. Dans ce monde post-apocalyptique, une jeune fille est poursuivie par une nation tyrannique pour les secrets énergétiques que détient son grand-père. Conan, un jeune sauvage isolé de cette nouvelle civilisation, va alors se lancer dans une quête initiatique pour sauver la belle.




Le fil conducteur du sauvetage de la jeune fille en détresse ne quittera pas l’anime. Mais l’intéressant ne réside pas tant dans les chassés-croisés entre les forces d’Industria et la petite "coalition" qui se forme, que dans la complexité d’un anime grand public au service d’une idéologie bien arrêtée.



Au-delà de cette simple aventure, Miyazaki a en effet empreint la série de différents messages culturels, souvent précurseurs et toujours très engagés, qui feront sa marque de fabrique. Il nous délivre sa perception de la société moderne.



Le réalisateur gravite principalement autour de la nécessité écologique véhiculée par "cet enfant de la nature" qu’est Conan, qu’il oppose à l’influence néfaste de la cupidité humaine. On retrouve ainsi l'antagonisme entre la vision utopique d’une symbiose naturelle avec la société capitalistique et celle d’une société dévastatrice, obnubilée par son ambition (représentée par Lepka), et pour qui "la fin justifie les moyens". L’homme - et sa volonté du toujours plus - reste aveugle, alors qu’il répète les mêmes erreurs que par le passé en se protégeant derrière un objectif qu’il qualifie de noble.



D’autres thèmes plus annexes sont également évoqués comme l’adolescence, passage de l'insouciance à la dure réalité de la vie, ou encore un message qui se veut utopiste, d’influence communiste certaine, notamment quand on connaît les antécédents politiques de Miyasaki (cf. l'arc sur l'île de High Harbor).




Les ingrédients de la recette Miyasakienne


Un soupçon d’humour, un zeste d’héroïsme, une pincée d’amour, une cuillerée de trahison et de mystique donnent corps à un alliage qui renforce la crédibilité du scénario au fil des épisodes. Si on met à part une réalisation graphique soignée pour l’époque, la série nous offre un florilège de personnages tous aussi disparates les uns que les autres, chacun contribuant également à la scénarisation d’un anime riche en contenu. Des individus qui doutent et ne restent pas figés dans leur perception du monde, au-delà du simple manichéisme récurant dans le manga et l'animation où le Bien s’oppose au Mal. Et cette évolution des profils et des personnalités est d’autant plus bénéfique à l'œuvre que la vision des deux héros vis-à-vis de leur aventure change avec leur passage à la maturité.



Les notes savoureuses de ce cocktail reposent en grande partie sur l’univers qui joue de l’impressionnisme, se déclinent en décors aussi variés que complets - de la cité futuriste d’Industria à un High Harbor d’inspiration méditerranéenne - parsemés par d’étranges machines futuristes. Le tout sublimé par une musique en parfaite harmonie avec l’esprit. Car le point d’orgue de cet animé reste bel et bien l’OST signée Shinichirô Ikebe, qui donne puissance et dimension au voyage et nous permet d'en appréhender toute l’intensité, cela même en l’absence de paroles.



Des ingrédients que Miyasaki réutilisera tout au long de son parcours cinématographique en stéréotypant la société au travers d'un chara-design et d'un environnement choisis avec soin. On notera ainsi les nombreuses ressemblances avec Le Château dans le Ciel, en particulier l’incroyable similitude entre les personnages principaux (Pazu et Sheeta). Certaines machines et décors rappellent également Nausicaä de la Vallée du Vent où l’univers apocalyptique se prête fortement à la réutilisation des concepts qui avaient déjà fait son succès.



Une série qui dessina le futur de Miyazaki

Bien loin des futures créations du monument de la japanimation qu'est Hayao Miyazaki, Conan a cependant su convaincre par ses messages novateurs, sa réalisation originale et son scénario à double interprétation. Son succès au Japon fut tel qu’il eut droit à plusieurs rééditions ainsi que de nombreuses déclinaisons. Citons des retranscriptions sur papier, des adaptations en jeux vidéo, la création d’un film et même de timbres. Sans oublier la pléiade de louanges de la part des critiques.



Un succès qui a traversé les océans pour venir à notre rencontre. Notre version française, éditée par IDP Home Vidéo Music, a d'ailleurs eu le privilège d’être remasterisée et retraduite suite à la perte des enregistrements originaux diffusés par France 3 dans les années 90. Des DVD soignés dont les erreurs ont été corrigées, avec en prime un doublage de qualité qui ne vous laissera pas indifférents puisqu’on retrouve les voix de Brigitte Lecordier (Son Gôku dans Dragon Ball) ou encore d’Amélie Morin (Candy dans la série homonyme) respectivement dans les rôles de Conan et de Lana.



Hier comme aujourd'hui, Conan, le Fils du Futur surprend toujours autant par bien des aspects, signe de l'intemporalité de l'œuvre d'Hayao Miyasaki. Une grande expérience que nous vous conseillons de vivre ou revivre.


Rakui
Note de la rédaction