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Manga Rencontre avec Dominique Véret

Mardi, 09 Octobre 2012 à 09h58 - Source :Akata / Delcourt

Présent à Japan Expo 2012, Dominique Véret, directeur de la collection manga chez Akata / Delcourt, a accepté de nous rencontrer. Avec son franc-parler connu, il nous donnera son bilan après 10 années à la tête d'Akata, mais aussi son avis sur le marché du manga.
  
   
 
Manga-News : Bonjour M. Veret ! Vous êtes à la tête d’Akata, société existant au sein de Delcourt, depuis environ une décennie. Pourriez-vous revenir un moment en arrière et faire un petit bilan de ces dix dernières années ?
Dominique Véret : On aurait tendance à se retirer littéralement à la campagne. On voudrait juste pouvoir travailler sur notre ligne éditoriale. Ce que je trouve désagréable, c’est que les éditeurs qui font du manga et veulent avoir une politique originale bien définie ont du mal à la construire, parce que le marché est purement économique. Ca devient de plus en plus difficile. Par exemple, quand les éditeurs japonais te proposent un titre, qu’il t’intéresse, parce qu’il collerait bien à ta politique éditoriale, s’il fait partie du top 10 des ventes, tu ne pourras l’avoir que si tu paies le plus cher et non pas parce que tu es l’éditeur qui sera le plus à-même de réaliser la meilleure version française pour le mettre en valeur. C’est très pénible. Avec tout le respect que je dois à mon éditeur, Delcourt, lui aussi subit la loi du marché. Cela fait dix ans qu’on est entré chez Delcourt grâce à la réputation du travail que j’ai fait chez Tonkam, où j’étais libre de faire absolument ce que je voulais. Maintenant, quand on présente trois titres à Guy Delcourt, c’est parce qu’on veut en avoir un d’accepté. Il y a vraiment une période où j’avais l’impression de subir la pression de M. Delcourt, c’est un peu comme s’il s’immisçait dans mon job. Bon, heureusement j’ai compris qu’il avait aussi du discernement. Donc ce que je peux dire par rapport à ces dix ans avec les Éditions Delcourt, 24 ans en fait depuis que j’ai commencé à aller vers le manga, on est écrasé par le poids du marché, qui nous tire vraiment vers le bas, et ça, c’est vraiment ennuyeux.

 
Est-ce que le fait qu’il y ait beaucoup d’éditeurs sur le marché est aussi un facteur ?
Je dirais oui. Oui, dans la mesure où tout le monde peut être éditeur, ce qui est une mauvaise nouvelle pour le métier. Je m’aperçois qu’aujourd’hui, il suffit juste d’avoir fait une école d’édition, alors que c’est en forgeant qu’on devient forgeron. En plus de cela, se prétendre éditeur sur la seule base de travailler sur une culture qui est très éloignée de la nôtre, à un moment où tout cela intervient dans un contexte de changement géopolitique, c’est un peu du domaine du n’importe quoi.


 
Ai Yazawa est une auteure emblématique du catalogue Akata-Delcourt. Cela fait quelques années, hélas, qu’elle est absente de la scène manga. Elle revient chez vous avec la parution d’anciens titres, avec Tempête aux Couleurs de Cerisiers ainsi que la version Deluxe de Gojinko, une vie de quartier. Est-ce qu'on peut imaginer le retour de Nana prochainement, comme cela s'est produit avec Coq de Combat ?
Pour Coq de Combat, c’était dans le cadre d’une histoire de tribunal, de plaintes déposées, et qu’on sait bien que la justice est lente aussi bien au Japon qu’en France, donc à l’échéance de la décision, on savait qu’on avait de fortes chances de recommencer la série. Tandis que là, on est dans la situation d’une personne qui a une grande sensibilité, à tel point qu’elle a écrit une œuvre qui aura marqué beaucoup de jeunes dans beaucoup de pays. Donc, on ne le sait pas du tout.


Est-ce que le fait que la série soit en pause a fait du mal aux éditions Delcourt et au catalogue ?
Oui, évidemment, cela a été un coup dur, parce que le public a peut-être un peu compris qu’on avait une certaine exigence dans les choix éditoriaux, qu’on a envie de dire des choses, de participer un peu au monde et à la société à travers nos choix éditoriaux. Et donc entre le marché qui est devenu un « supermarché » et l’attitude des lecteurs qui sont devenus des « super-consommateurs », plus le fait de perdre Nana, la fin de Fruits Basket, qui nous ont permis de monter en chiffres d’affaire, il a fallu essayer de trouver des séries qui montent aussi haut. Cependant, on est passé dans une époque qui a vu naître de plus en plus d’éditeurs. On a été les pionniers et les leaders de ceux qui misent à fond sur le shôjo, et donc tout le monde s’y est mis un peu. Donc oui, cela a donné lieu à des moments difficiles. Par rapport à la saturation du marché, et par la décision de Guy Delcourt, on est passé de 90 bouquins par an, on a diminué le nombre de sorties. Tout cela a été douloureux pour nous. Depuis trois /quatre ans, on a vécu pas mal de difficultés.
 
 
 
 
C’est un pari risqué, non, que de décider de baisser le nombre de vos sorties comme vous l’avez fait, alors que d’autre au contraire les augmentent ? Est-ce que commercialement parlant, ce n’était pas un peu se tirer une balle dans le pied ?
Totalement, mais ce n’est pas moi qui décide. On a beau être Akata, on est chez les Éditions Delcourt. Le patron, c’est Guy Delcourt. Chez Akata, on est une société indépendante, sous contrat. Guy Delcourt a pris cette décision parce qu’il avait des craintes.
En contrepartie, comme on a une démarche de vouloir exprimer des choses à travers des choix éditoriaux, là-dessus on est un peu protégé par rapport à celui qui serait habitué à ne faire que du business, et qui donc ne serait pas habitué à réfléchir pour essayer de trouver une BD qui ne sera pas trop chère à l’achat de la licence et qui peut devenir un succès éditorial. Ce qui nous a bien réussi en choisissant Switch Girl !!. Quand on a vu la série, on l’a remarquée parce qu’on a du métier, qu’on est un peu attentif à comment ça fonctionne dans la tête des jeunes. Personne n’avait osé s’adresser aux nanas de cette façon auparavant. C’est le métier qui nous sauve la mise. Par exemple, on a quand même réussi avec Ascension, on a cru en cet auteur, on a suivi ses seinens, et donc aujourd’hui, Ascension est une série qui monte bien, on est dans des bonnes ventes.
On a aussi bien réussi notre pari en sortant Une sacrée mamie.
 
 


Soleil Manga a depuis été intégré à Delcourt, et ils marchent un peu sur vos platebandes parce qu’ils éditent aussi pas mal de shôjo, n’est-ce parfois pas trop difficile d’être à trois au sein d’un même groupe (Akata, Soleil, Tonkam ndlr) ?
Tout le monde me pose cette question, mais je ne vois pas trop pourquoi. Nous, Akata, on est « manga des champs », et on s’en revendique de plus en plus. Nous vivons en province, à la campagne. Nous ne sommes pas dans un système de concurrence. Guy Delcourt ne nous met pas en concurrence, et chacun fait selon sa personnalité. Et puis le côté gothique, ce n’est pas ma tasse de thé. Donc on peut dire que c’est une complémentarité totale. Ca fait longtemps que je roule ma bosse dans le manga et je ne fais pas attention à ce qu’il se passe chez les autres. Je suis un ancien libraire, et pour moi c’est la pénétration de la culture marketing et des termes propres au marketing qui est difficile. Depuis qu’on appelle un livre un « produit », je trouve qu’il se passe des trucs graves dans la culture. Je suis un peu « Old school », je n’utiliserais jamais le mot « produit », je n’ai pas de vocabulaire marketing, et je trace simplement ma voie dans la BD. Je n’ai pas de jalousie, je ne suis pas en compétition. Je sais que je peux être un petit malin et ça me suffit. Je suis capable de sentir un truc avant les autres, parce qu’on a plus de retrait. Je prends toutes les informations concernant la culture urbaine, parisienne, branchée, j’y réfléchis le matin par exemple en promenant mon chien, donc j’ai de la distance.


Shueisha a annoncé en avril dernier que sa filiale française Kazé Manga allait avoir le monopole sur les titres de leur catalogue. Vous avez pas mal de titres Shueisha dans votre catalogue, est-ce que cela va changer quelque chose pour vous au niveau des relations, allez-vous devoir vous « rabattre » sur de plus petits éditeurs ?
Il y a beaucoup de gens qui sont fâchés par rapport à cette histoire. Par exemple, je viens de la bande dessinée franco-belge, et je me suis beaucoup investi dans le manga par intérêt personnel pour la culture asiatique. Je vis à côté d’une pagode. Il est connu que depuis le début de l’histoire du manga en France, je suis une des personnes qui s’est le plus défoncé pour faire admettre la culture japonaise en France. Je voulais que les jeunes Français puissent mieux comprendre la culture asiatique en passant par le Japon, puis choisir leur propre chemin et s’intéresser à l’aspect plus large de ce qui la constituait, c’est-à-dire le cinéma coréen, la BD chinoise, etc. J’ai fait ça dans une optique culturelle. C’était vraiment important qu’ils comprennent les cultures asiatiques pour la paix, vu la montée en puissance de l’Asie, c’était bien qu’on se comprenne. Shueisha vient à Paris, c’est bien. Après, ils prennent Kazé, et on vient nous dire « on ne vous vend plus nos bouquins, c’est pour Kazé », même s'ils nous vendront encore des bouquins, je ne trouve pas ça normal que Kazé ait la priorité absolue.
Parce qu’objectivement, soyons clairs, il y a pour l’instant une grande vague de cinéma de super-héros. Marvel fait de la grosse production, il y a un gros engouement pour les comics américains actuellement, qui est énorme. Mais est-ce que Marvel s’est installé en France ? Et DC ? Non, ils vendent des licences aux éditeurs français.
Chez Akata, je fais des histoires de samouraïs. Mais si je fais ce genre d’histoires, c’est pour apprendre à me faire respecter. Kazé qui dit, « voilà, je vais sortir 25 manga par mois pour affirmer ma part de marché » et Shueisha qui dit « voilà, je vais vendre mes super titres en exclusivité à Kazé ». Glénat, Kana et Pika sont nos concurrents, mais dans une compétition entre Français, j’ai toujours une chance d’avoir le prochain Naruto. Que nos éditeurs soient pénalisés par un éditeur japonais qui s’installe en France, je ne trouve pas ça correct. Mais je connais la mentalité chinoise et la mentalité japonaise, c’est un peu ma façon de penser, je côtoie des Asiatiques depuis 1991. Et donc je sais que eux, ils ont capté des trucs sur les intérêts commerciaux en France mieux que les commerciaux français, mieux que nos éditeurs, et mieux que nos directeurs de collection ou de festivals.
  
    
 
Nous avons travaillé à faire comprendre au public l’importance de la culture japonaise. Aujourd’hui, si la culture japonaise est reconnue sur la planète dans la partie anglo-saxonne, c’est parce que  les Français ont fait le boulot. C’est l’éditorial français qui a permis de rendre accessible aux occidentaux. Par exemple, un éditeur de bande dessinée brésilien qui ouvre un secteur manga va passer par la lecture des mangas en français pour détecter ce qui est bon. Si ça marche en France, ça marche auprès des gens de culture occidentale. Ca fait un moment que les éditeurs de Taïwan viennent à répétition à Angoulême parce qu’ils savent que s’ils font reconnaître la BD taïwanaise en France, ça va se vendre plus vite à l’international.
Si les qualités du seinen ne sont pas reconnues en France, qui en sera capable ? Je suis désolé, c’est peut-être vexant pour les journalistes manga, mais ce sont les journalistes de la BD franco-belge qui sont capables le mieux d’appréhender les qualités du seinen, parce que c’est ce qu’on appelle chez nous de la BD adulte. Si on prend le cas d’Animeland. On peut compter sur eux pour lancer un shônen ou un shôjo très vite. Si je veux lancer un seinen très vite, je vais me tourner vers les journalistes de la BD franco-belge. Tu regardes le prix de la BD asiatique que donne l’ACBD à Japan Expo, tu regardes la liste des nominés, et bien tu vois plus de BDs asiatiques que de japonaises.




Vous avez une orientation très shôjo, très seinen depuis quelques années, pourtant vous êtes revenus au shônen avec Hadès, Chasseur de Psycho-démons et Undead. Pourquoi ce choix, alors que le secteur est déjà bien fourni ?

De nouveau, c’est une question d’histoire éditoriale. Quand je suis venu travaillé avec Guy Delcourt, mon projet était de construire un catalogue qui soit représentatif de comment on construit le catalogue d’un éditeur de manga au Japon. Donc il me fallait une partie shônen, une partie shôjo, une partie seinen, une partie Josei, et au fil des ans, des évolutions et des aléas du marché, il s’est fait qu’on n’a pas réagi assez vite. J’ai peut-être été trop vite à me mettre sur le seinen, et j’ai négligé à un moment le shônen.
Et il s’est passé un truc incroyable : j’ai fait des bons choix de shôjo, parce que j’ai quand même une part féminine. En fait, j’ai exprimé ma sensibilité à la BD féminine à travers des titres qui ont eu du succès, et j’ai été piégé (rires). Et donc Guy m’a dit « On cartonne dans le shôjo, et je veux qu’on soit les premiers ! ». Alors on a continué à en faire, et Bruno Pham est arrivé, qui est connu pour être un grand amateur devant l’éternel de shôjo et de josei. C’est quelqu’un de très sensible à tout cela, je l’ai laissé s’exprimer, il a amené des sensibilités, et on est devenu très bon du côté shôjo.
Mais un jour, j’ai ouvert le site Akata et on ne voyait que des trucs de filles... C'est en voyant cela que j'ai eu envie de revenir vers le shônen ! (rires)
Mais le problème pour moi, c’est que le shônen se porte mal et se compose de titres majoritairement dispensables. Mais le monde est en train de changer depuis Fukushima. Et là on va entrer dans une période de l’histoire qui va connaître la pollution, la crise économique, etc. Donc il faut revenir à une bande dessinée adolescente qui propose des histoires pour préparer ces adolescents à devenir des adultes, et donc des hommes dans un futur incertain.


Et pour vous, Hadès, Chasseur de psycho-démons et Undead y participent ?
(Hésitation) Je dirais plutôt, qu’on a fait Shinjuku Fever pour essayer d’amener à un autre shônen. C’est pour ça qu’on a fait ce titre. On ramène un peu le lecteur dans le réalisme, avec des choses qui peuvent arriver à un ado qui vient de quitter son lycée, qui descend à Paris. On a aussi fait de la SF, mais on a eu un gros problème, avec Tokyo, fin d’un monde. Le problème, c’est qu’on l’a sorti quelques jours avant le tsunami du 11 mars et on a fait une promo en déconnant sur ce genre de choses, et c’est arrivé trois jours après la parution de notre newsletter (rires gênés). Donc ça a glacé tout le monde...
Dans Hadès, il y a encore un vrai fond : c’est toi qui produit ton karma. On veut sortir du schéma imaginaire avec des divinités dont les noms sont inventés alors qu’il y a un panthéon de divinités accessibles aux auteurs japonais, qui sont celles issues du shintoïsme. Au lieu d’aller chercher dans les RPG, qu’ils prennent dans leur patrimoine ! Maintenant on va faire Jinbe Évolution. On revient au samouraï. Ce sont deux titres qui peuvent bien exploser à mon avis. Là on a une petite pile de shônen qui ramènent à de la vie, du réalisme.

Comme quand on a démarré chez Tonkam, on avait fait Video Girl Aï, et à l’époque ça sortait en même temps que Dragon Ball, et ça parlait des problèmes des ados. J’ai envie de refaire du shônen comme ça. C’est un peu évoqué à la fin de notre charte de catalogue. Je veux me lancer dans de l’éditorial post-Fukushima. Le prochain éditorial manga va parler de la mort, qui est très présente dans la société. Préparons-nous à un éditorial morbide. 
  
     


Vous avez repris la publication de Coq de Combat, qui a subi une très longue interruption de parution et publié la suite de Ki-itchi avec Ki-itchi VS. Est-ce que le public est resté en plan ou avez-vous retrouvé un public intéressé par ces projets ?
Tout ça, c’est calculé, c’est orchestré pour fêter les dix ans. Normalement, l’année prochaine, c’est la fin du contrat qu’on a avec les Éditions Delcourt, donc on va voir ce qu’on va faire. Continuez avec les Éditions Delcourt ça ne nous pose pas de problème, parce que de toute façon quand on vieillit ensemble, c’est là que ça passe de mieux en mieux. Ce qu’on a voulu dire, c’est que ça fait dix ans de manga chez Delcourt, et je peux citer plein de titres qui ont été fait trop tôt.
Par exemple, Dossier A. Même Flic à Tokyo, ça n’a pas été capté, et ça reste à découvrir. Et aussi Subaru, Charisma, Syndrome 1866, etc ...
 



Exemple concret avec Les Fils de la Terre. La nouvelle série de l’auteure de Fullmetal Alchemist (Gin no Sanji – Silver Spoon, ndlr), est l’histoire d’un garçon de la ville qui part à la campagne pour aller en lycée agricole. Et nous l’avions déjà fait avec Les Fils de la Terre ! J’ai demandé à Shogakukan de l’avoir, parce que c’est notre éditorial, on est « mangas des champs ». Et ils l’ont donné à celui qui a payé le plus cher… Donc Coq de Combat et Ki-itchi VS, c’est une façon de dire, «retournez dans notre catalogue ».
Tous les livres de Hiroshi Hirata, les jeunes ne les ont pas compris, parce que c’est devenu un produit le manga, et on n’a pas considéré le lectorat comme des adultes. Hirata, ce n’est pas compris du tout !
Et les journalistes dans le manga, il faudrait qu’ils se mettent sur ça, c’est clé. Il y a tout un pan du manga qui s’adresse aux éditeurs qui publient des bouquins art-de-vivre, bien-être et autres. Mitsuko Attitude, c’est ça ! Et on va faire aussi Les Secrets de Léa, et c’est ça aussi ! On explique aux jeunes filles comment sont les mecs, les premières pertes blanches, les premières règles, les petits seins qui poussent. On revient à aider les jeunes à grandir, et si on le fait bien, ça va donner des best-sellers.On fait un travail pour faire sortir les lecteurs du virtuel. On est vraiment en train de préparer le manga post-Fukushima. Nous on est en train de préparer le manga « je regarde la mort avec le sourire, et elle va venir de tous les côtés ».
 
 
 

Ce n’est pas une perspective très gaie…
Mais si ! Parce que c’est ça le guerrier, le samouraï. Le samouraï, pourquoi on l’admire, parce qu'il a pas peur de la mort, parce qu’il la regarde, et est prêt à mourir à chaque instant.


Mais le samouraï combat pour ses valeurs, subir Fukushima et affronter ses conséquences, ce n’est pas vraiment la même chose…
Mais si ! Ce sont les conséquences de ce qu’a fait ma génération, mes parents, mes grands-parents. Les enfants actuels vont subir une morbidité qui va les encercler, qui est la conséquence des choix de vie de leurs parents. Et ça donne Fukushima. Oui, ils subissent. Comme je suis le directeur éditorial, je vais au Japon à la fin de l’année, et je vais aller à Fukushima. Je vais m’approcher de la radioactivité.


Est-ce que vous pensez que les générations actuelles de mangaka partagent aussi votre ferveur ?
Mais oui, ça va aller vers ça ! Mais oui, c’est obligé. À la station de Tokyo, les trains qui viennent de la région de Fukushima, la radioactivité est plus importante parce que ça passe avec les semelles. Donc quand les gens qui travaillent dans le manga vont à Tokyo, quand on va boire de l’eau, ou un saké, ou manger, à un moment ou à un autre, on va croiser la radioactivité. Donc moi j’ai des copains du Japon qui m’ont dit rapidement, « ben oui à Tokyo on s’en est pris plein la gueule ! » J’ai un copain qui vit plus au Nord au Japon, et il m’a dit, « oui, on s’en est pris plein la gueule », et je l’ai senti à travers mes relations avec eux, bien sûr que je l’ai senti. Donc voilà, on est dedans, maintenant. Et pour moi ce qui est marrant c’est que pour l’instant on est dans une concurrence qui est purement de marché, et donc d’une culture de produits et tout, et moi je suis super content parce que on va aller maintenant vers une concurrence "de couilles et de mort". Donc on va vraiment faire du manga !!


Est-ce que Hiroshi Hirata va revenir dans votre catalogue prochainement ?
Oui, c’est évident !


Un petit mot sur Kei Toumé ?
Ben Kei Toumé elle ne se vend pas, c’est super triste ! Alors que c’est génial. Mais c’est pareil que pour Hirata, c’est trop fin.
 

 
 
Mais ça rentre dans l’optique de ce que vous voulez transmettre dans votre catalogue.
Tout ce que je demande, c’est de pouvoir faire du manga avec mon cœur et pour communiquer de bonnes sensations, de bons feelings, de bonnes réflexions aux lecteurs. Dans le marché du manga, on a vraiment besoin de sortir de la compétition, de la série Z, parce que maintenant on est quand même dans une période qui fait monter la série Z.


Mais si le marché reste dans l’état actuel des choses, cela va être difficile pour vous.
Non, parce qu’on est dans la tradition. Moi, je suis sûr qu’on va gagner. Mon attitude éditoriale correspond à une façon de vivre, parce que c’est quelque chose que je vis. Si ce n’est pas moi qui gagne, ce sera mon fils (Naguy Véret, qui va s'occuper de la collection shônen du label Akata, ndlr), c’est mon clan.
  
 
Remerciements à Domique Véret et aux éditions Akata / Delcourt.
 

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commentaires

Kimi

De Kimi [3391 Pts], le 14 Octobre 2012 à 22h12

Interview très intéressante. Le franc parler de Dominique Veret se ressent parfaitement lors de la lecture !

 

asami

De asami [1111 Pts], le 12 Octobre 2012 à 20h32

Merci pour l’interview et vraiment dommage pour Kei Toumé !

Lina Inverse

De Lina Inverse, le 11 Octobre 2012 à 10h12

"Parce qu’objectivement, soyons clairs, il y a pour l’instant une grande vague de cinéma de super-héros. Marvel fait de la grosse production, il y a un gros engouement pour les comics américains actuellement, qui est énorme. Mais est-ce que Marvel s’est installé en France ? Et DC ? Non, ils vendent des licences aux éditeurs français."

 

Ce monsieur soit disant le GRAND DOMINIQUE VERET ; oublie un peu DISNEY - et meme l'implantation d'un futur parc a thème - et donc en effet DC ne s'installe pas encore en france car ce n'est pas porteur pour eux mais Marvel y rentre petit a petit . 

Q'une editeur veuille entrer sur le marché et en tenir les rennes cela parais logique . Pourquoi sous traité a d'autres et faire un travail de m.... eventuellement alors que la Shopro a le pouvoir de venir sur paris et de faire exactement ce quelle veux au niveau de ses mangas et de fermer le marché au niveau des autres editeurs humm cela porte un nom ahhh oui "la loi du marché " . Il ne faut pas etre hypocrite . Pour rappel TONKAM a commencé a distribué ses titres a l'epoque a la FNAC  et autres distributeurs , ce qui a eu pour but  de couler la boutique de bastille - de meme les guerres intestines au sein du groupe Tonkam n'ont point facilité les choses .

Alors apres tout nous restons dans un monde cruel et injuste (irronie ) et oui Dalllaas ton univers impitoyable . Le client standard manga est un mouton maintenant mais cela permet a contrario aux editeurs de survivre : un gros titre pour qques titres plus "fins" cest la realité

TheSpy22

De TheSpy22 [2036 Pts], le 10 Octobre 2012 à 21h51

Je ne possède qu'un seul manga de cette editeur (Beck) et c'est le meilleur manga de tout ceux que j'ai lu (avis personnel). Franchement merci pour cette magnifique serie Akata!

Shaedhen

De Shaedhen [782 Pts], le 10 Octobre 2012 à 21h30

C'est triste pour Kei Toume ; ;

En tout cas, interview très intéressante !

 

Yuminekoi

De Yuminekoi [2166 Pts], le 10 Octobre 2012 à 11h55

très bonne interview, j'ai certains titres de Akata, qui sont sympa comme tout.

Par contre triste pour Kei toumé, j'aime bien les mystères deTaisho, Luno aussi, j'attends surtout Acony.

bonne continuation.

tsubasadow

De tsubasadow [4303 Pts], le 09 Octobre 2012 à 23h22

Interview très intéressante. Je ne suis pas un grand lecteur des titres de Delcourt et c'est surement une erreur mais j'ai du mal à m'intéresser à leurs titres, je sais pas si ça vient de moi ou du manque de communication autour de leurs titres mais il faudrait que je m'interesse un peu à leurs séries car j'ai l'impression de passer à côté de qq chose.

yaku

De yaku [1340 Pts], le 09 Octobre 2012 à 21h27

Triste d'apprendre que Kei TOUME ne se vend pas bien :( C'est pourtant une auteure proposant des oeuvres d'une grande sensibilité... (Il me manque quoi de ses oeuvres françaises? "Kuro gane", mais c'est à cause du format et du fait que c'est stoppé)
Sinon à quand la sortie du dernier tome des "Mystères de Taisho"?

 

Bon, à part ça, Akata n'est peut être pas l'éditeur dont j'ai le plus de titres, mais les titres que j'ai chez eux sont absolument sublimes! 

Hitsuji

De Hitsuji [5896 Pts], le 09 Octobre 2012 à 20h02

Excellente interview, passionnante de bout en bout !
mink

De mink [1248 Pts], le 09 Octobre 2012 à 18h01

Waouh, c'est rassurant de constater qu'il y a des gens comme lui qui travaillent dans le secteur de l'édition et qui ont la valeur des vraies choses ! Et comme il le dit, cette société de consommation va finir par nous étouffer et au final on aura toujours droits à une avalanche de titres mais dont la valeur restera moindre et dont les histoires ne nous prendront pas aux trippes comme nos premières lectures de mangas ! C'est un constat alarmant qui a commencé, je drirais il y a 3 ans, où les histoires de vampires, de butlers, de yaoi ... et même les sônens ont pullulé et se sont au final transformés en clones, car très peu de titres sortent vraiment du lot et beaucoup font du copié collé ... on dirait que c'est la seule façon qu'on trouvé les japonais pour conserver leur lecteurs, alors qu'à nous rabacher toujours les mêmes histoires, ils vont finir par nous lasser, et ça aura pour effet l'overdose !!!! Quand au seinen, il commence à prendre de l'empleur et il serait peut être temps car c'est un genre qui me paraît plus sûr et plus interessant à l'heure actuelle, même si on reste toujours attachés aux shonens, aux shojos, yaois et autres genres ... Pour ce qui est d'Akata, ce n'est pas mon éditeur préféré, même si je compte également dans ma collection les titres les plus populaires chez eux, (comme la plupart d'entre nous), mais je reste admirative devant la détermination de cet homme !

elie31

De elie31 [2964 Pts], le 09 Octobre 2012 à 15h19

Sympa a lire cette interview ^^

Kamineko

De Kamineko [203 Pts], le 09 Octobre 2012 à 15h02

Très bonne interview 

Toujours aussi franc chez Akata ça fait plaisir :)

J'ai hâte de voir les prochains Hiroshi Hirata

 

LadyKya

De LadyKya [1414 Pts], le 09 Octobre 2012 à 14h10

Je suis d'accord vec "Panyo3", Akata fait parti des éditeurs qui ont une vrai personnalité, après on aime ou on aime pas....

Effectivement, interview très franc parlé!!

Orla

De Orla, le 09 Octobre 2012 à 13h36

Bonne interview avec du franc praler à revendre. Contente aussi d'apprendre que Silver Spoon va sortir en France mais du coup j'ai peur que ce ne soit pas chez Kurokawa. Je vois bien Pika avoir misé de l'argent dessus, j'espère sincèrement me tromper...

Sigma6

De Sigma6, le 09 Octobre 2012 à 13h12

Content d'apprendre que Silver Spoon est vendu! Bientôt une annonce on espère!

Rouge

De Rouge [358 Pts], le 09 Octobre 2012 à 12h13

Tout comme geoff, je suis déçu d'apprendre que Kei Toumé ne se vend pas bien. Mais je suis également fautif, il faut dire que je n'ai que Luno de cette auteur. En vérité, je ne savais pas qu'il y avait tant d'oeuvres d'elle éditées oO
Je tâcherais que remédier à ça.

rocketwarrior

De rocketwarrior [2127 Pts], le 09 Octobre 2012 à 11h35

Ils sont super motivé ! Cool cette interview, marchi. Faut que je regarde les oeuvres de Kei Toumé !

Panyo3

De Panyo3, le 09 Octobre 2012 à 11h09

Excellente interview ! J'ai toujours beaucoup aimé le travail éditorial d'Akata/Delcourt, ils ont une vraie identité, contrairement à un Kazé, un Glénat ou un Pika !

shinob

De shinob [127 Pts], le 09 Octobre 2012 à 11h05

Interview passionnante !

geoff

De geoff [1327 Pts], le 09 Octobre 2012 à 11h00

Encore une superbe interview ! Ca m'a deprimé un peu de lire que Kei Toumé ne se vend pas. Enfin je m'en douté un peu. 

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