Test rétro - Resident Evil

A l'heure où sort aux éditions Kurokawa le manga Resident Evil - Marhawa Desire, nous vous proposons, grâce au test de la version PlayStation par Rogue Aerith, de revenir sur le jeu par lequel tout a commencé : Resident Evil !




Tout a déjà été dit sur le chef d'oeuvre du studio Capcom, sorti en mars 1996 au Japon et aux Etats-Unis, et le 1er août 1996 en France, exclusivement sur Playstation. Nous ne pouvons que réitérer les louanges autour de ce jeu devenu mythique, mais nous vous devons bien quelques explications. Pourquoi Resident evil est-il génial ? Et si vous ne connaissez pas, pourquoi vous devez craquer ? Réponses dans les lignes qui suivent.

Appelé Biohazard au Japon, Resident evil a été le premier vrai choc technique de l'ère Playstation, s'imposant comme LE system seller de la console de Sony à ses débuts. Les graphismes étaient époustouflants. Pour bien se rendre compte, à l'époque, seuls quelques jeux PC proposaient une expérience équivalente, et les développeurs eux-mêmes avaient été surpris par les capacités de la console de Sony. Resident evil a sans doute d'ailleurs permis de sceller le destin de la Playstation, en attirant les créateurs à elle, en les encourageant à se surpasser. Bien sûr, l'ensemble des textures ont pris un gros coup de vieux. Néanmoins, le tout reste très agréable à jouer encore aujourd'hui, les décors étant constitué d'arrière-plans en 3D précalculée, ce procédé étant réputé pour vieillir moins vite que la full 3D. Et si les décors paraissent de nos jours assez vides, cela fait aussi leur charme, et cela laisse toute une part d'imagination au joueur. De plus, cet aspect dépouillé rend le jeu encore plus flippant qu'il ne l'était à sa sortie, puisque nous sommes aujourd'hui habitués à de véritables oeuvres d'art au niveau de détails toujours plus poussé, mais qui finalement n'offrent pas une ambiance claustrophobe aussi puissante que certains jeux d'antan. Car en termes de peur, de "trip dans la flippe", ce premier Resident evil restera toujours le meilleur ! L'ambiance du jeu de Capcom est absolument phénoménale. Tout commence d'ailleurs avec une séquence d'ouverture originale, dont on s'est beaucoup moqué, mais qui possède désormais un charme désuet indéniable. Hommage à la série B, délicieusement kitsch (et pourtant, ce n'est pas mon truc), la scène d'introduction n'est rien d'autre en effet qu'un clip vidéo tourné avec de vrais acteurs.

Hormis cette particularité, intéressons-nous à l'ambiance du jeu à proprement parler. Et quelle ambiance ! Comme nous le verrons plus tard s'agissant du scénario, Resident evil se rapproche clairement du cinéma, ce qui se retrouve dans la mise en scène et le gameplay. Les angles de caméra, à défaut d'être pratiques, sont choisis pour produire l'effet de surprise, et certaines séquences sont devenues cultes. La plus célèbre d'entre elles ? Le fameux angle de caméra zoomant sur les fenêtres donnant vers l'extérieur du manoir, qui peuvent exploser à tout moment et laisser apparaître des ennemis, alors qu'on n'a plus de balles ! Resident evil s'est aussi distingué à l'époque de sa sortie par ses choix résolument matures : une violence visuelle assumée, du gore (humains dévorés, décapitation ou démembrement en tirant sur les ennemis), du malsain avec des notes présentes dans les journaux personnels des employés du manoir qui décrivent leur fin de vie... Encore une fois, Resident evil se pose comme un précurseur, celui qui a osé le premier une vraie violence visuelle réaliste dans le jeu vidéo, permise par les capacités de la Playstation.

Attardons-nous maintenant un peu sur le scénario. L'histoire prend place en juillet 1998. La ville de Racoon City, aux Etats-Unis, est en panique. Des rapports de la police signalent des meurtres sauvages dans les collines surplombant la cité. Les victimes semblent avoir été partiellement dévorées. Une enquête est diligentée. L'équipe BRAVO du S.T.A.R.S. (groupe d'intervention et d'investigation) est envoyée en reconnaissance mais est rapidement portée disparue. La seconde équipe, ALPHA, est à son tour envoyée, pour secourir leurs collègues et comprendre ce qui s'est passé dans les hauteurs de la ville. A cause d'une attaque par des chiens amateurs de chair humaine, les membres du S.T.A.R.S sont contraints de se réfugier à l'intérieur d'un manoir. L'aventure commence. Vous avez deu.x possibilités : diriger Chris Redfield ou Jill Valentine, tous deux membres de l'équipe Alpha. Notons que le déroulement du jeu s'avère plus difficile aux commandes de Chris, à cause d'un inventaire comportant moins d'emplacements. Vous découvrez tout au long du jeu qu'un virus s'est échappé, des personnages qui essaient de rester fidèles à leurs principes, des trahisons... Plutôt classique, le scénario s'avère particulièrement efficace, et lorsqu'on voit l'évolution de la série, on est pris d'une franche nostalgie, tant on se dit que les suites ont altéré ce qui aurait pu être une grande histoire. Car à partir de Resident Evil : Code Veronica, Capcom en a trop fait, avec des intrigues toutes plus clichées les unes que les autres, et toujours plus orientées série B hollywoodienne. Car s'il est pris au premier degré, le scénario de Resident Evil n'a rien à envier à un thriller... et tout est plutôt bon et convaincant. Si Metal Gear Solid est souvent cité pour avoir opéré un rapprochement entre jeu vidéo et cinéma, c'est Resident Evil qui a été le premier, et il n'est pas assez connu pour cela.

En termes de gameplay, Resident evil offre une variété de situations vraiment appréciable, mélange d'action et d'exploration. L'essence du survival-horror est là : survivre aux assauts et continuer d'avancer en explorant l'environnement, ce qui implique de résoudre des énigmes, de bien analyser les décors pour y trouver des mécanismes, indices, objets. De plus, Resident evil peut être résolument qualifié d'old school en 2012, un aspect du survival horror ayant presque totalement disparu des jeux actuels se réclamant de ce genre : l'aspect gestion de l'inventaire et des sauvegardes. En effet, le personnage contrôlé ne peut transporter qu'une quantité d'objets limitée, et ne peut sauvegarder indéfiniment, puisqu'il doit pour cela récolter un objet permettant de sauvegarder (les fameux rouleaux pour machine à écrire, un clin d'oeil non pas au cinéma, mais à la littérature, preuve que Resident evil était aussi destiné à engager le média jeu vidéo vers une nouvelle voie). Tout cela oblige le joueur à faire des choix. Ces choix seront déterminants, au vu du panel d'ennemis rencontrés, un des gros points forts du jeu, puisqu'il est très varié, à faire pâlir (et oui) bon nombre de productions actuelles.

Malheureusement, Resident evil avait aussi ses tares, certes renforcées aujourd'hui par le poids des années, mais déjà très claires en 1996. La plus gênante d'entre elle, c'est la maniabilité, rigide, lourde, parfois insupportable... Aujourd'hui clairement obsolète (dur, dur, de reprendre une partie plus de quinze ans après), on avait dû s'en contenter en 1996. Beaucoup de joueurs ont argué du fait que cette maniabilité était finalement une qualité, puisqu'elle permettait de flipper encore plus, notamment parce que l'on peine à déplacer nos personnages, ce qui est particulièrement énervant dans des situations d'urgence... Mouaif... Mauvaise foi, quand tu nous tiens... Non, définitivement non, la maniabilité gêne l'expérience de jeu. Le demi-tour rapide n'apparaîtra que dans Resident evil 3, ce qui est particulièrement préjudiciable au titre puisqu'on évolue souvent dans des milieux clos. Pas de possibilité de tirer en marchant : là encore, c'est rageant et cela suivra la série jusqu'à ce que les producteurs comprennent que cela flingue le gameplay (voir Resident evil 5). L'autre déception, c'est la durée de vie, assez courte, bien que la rejouabilité soit absolument énorme tant ce premier opus est une expérience à part.




Graphismes :
Même si les graphismes ne font pas tout, vous connaissez ces jeux qui vous décrochent la mâchoire, capable de vous faire investir dans une console ? Resident evil était de ceux-là. Ce premier opus a beaucoup plus vieilli que les deuxième et troisième opus, aux couleurs plus vives et aux décors plus détaillés, mais il possède ce petit quelque chose, ce fameux charme des anciens jeux. Car les décors sont encore immersifs, variés. L'ambiance quant à elle reste toujours excellente, froide, dépouillée, malsaine. Si le malsain de Silent hill, autre survival horror culte de la Playstation, tire son épingle de l'aspect psychologique, le malsain de Resident evil joue sur l'enfermement, le danger permanent.

Sons :
On pourrait dire que Resident evil manque d'ambition dans ce domaine. L'absence de musiques anxiogènes marquantes, notamment dans le manoir, est dommageable pour certains. Je considère pour ma part que c'est justement l'absence de véritable ambiance musicale qui confère au jeu son ambiance si particulière. Tout passe par les bruitages (qui ont vieilli, mais là encore, conservent un certain charme). On se sent seul. On n'entend que ses propres pas, les tirs des armes, l'orage... ou des bruits moins identifiables qui glacent le sang, annonciateurs (ou pas !) de l'apparition d'ennemis : craquements, râles...

Maniabilité :
On ne parvient jamais à totalement s'adapter, même après plusieurs parties. La maniabilité de Resident evil est tout simplement injuste. Injuste parce qu'elle gâche une expérience de jeu à cause de son manque de souplesse et d'idées.

Durée de vie :
8-9 heures pour une première partie. Le fait de pouvoir jouer deux personnages donnent lieu à deux scénarios, qui comportent néanmoins très peu de différences. 8 fins sont disponibles selon les personnages aidés ou non au cours de la partie.

Scénario :
Le scénario n'est pas un prétexte, on sent une véritable volonté de créer de l'attachement aux personnages, de l'angoisse.

En résumé :
Resident evil est un monument du jeu vidéo. Premier vrai system seller de la Playstation, choc visuel, oeuvre ambitieuse tournée très habilement vers un aspect cinématographique, ambassadeur d'un nouveau genre vidéoludique, le jeu de Capcom n'est pour autant pas dénué de maladresses, dont l'une lui sera préjudiciable longtemps : sa maniabilité. On imagine ce qu'aurait pu être Resident evil avec une maniabilité plus souple, un système plus élaboré... sans doute le jeu parfait ! A noter que des remakes sont sortis sur Gamecube en 2002, puis plus tard sur Wii et DS. Le premier atteint d'ailleurs au moins (si ce n'est plus) le même niveau de qualité ! Attention, jeu culte, qui mérite encore aujourd'hui 1000 fois sa réputation.