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Pokémon - la grande aventure : Critiques

Pocket Monsters Special

Critique de la série manga

Publiée le Jeudi, 15 Octobre 2015

Depuis la sortie des versions rouge et bleu en 1999 en France, Pokémon n’a jamais vu son succès décroître. Au contraire, nombre d’enfants ont grandi tout en gardant un profond attachement envers la franchise, se jetant allégrement sur chaque nouvelle version du jeu vidéo, tandis que les générations suivantes découvraient la licence avec le même enthousiasme que les bambins de 1999. L’attente d’une édition complète du fameux manga « Pokémon Special » était donc présente. Long de plus de 50 volumes à l’heure actuelle au pays du soleil levant, cette adaptation reprend les différentes versions du jeu vidéo à travers différents arcs scénaristiques plus ou moins indépendants. Sortie initialement en 2001 chez Glénat, la première partie adaptait en 7 tomes les versions rouge, bleu et jaune (verte y compris pour le Japon), mais fut abandonnée à un tome de sa conclusion par l’éditeur qui ne voyait pas le succès escompté. Mais au printemps 2014 et jusqu’à l’automne de la même année, Kurokawa marque le grand retour de ce premier arc à travers trois volumes épais, en parallèle de la continuité de l’arc Noir & Blanc.




C’est dans un monde où les humains cohabitent avec des créatures aux étranges pouvoirs du nom de « Pokémon » que l’aventure commence. Ces derniers font de ces êtres des animaux de compagnie ou encore des partenaires de combat. Dans le village de Bourg Palette, Rouge fait office de meilleur dresseur parmi son entourage. Lorsqu’il rencontre le Professeur Chen, expert en Pokémon, il se voit remettre un Pokédex, une encyclopédie électronique enregistrant les données des créatures capturées, motif pour Rouge pour partir en voyage à travers la région. Les rencontres seront multiples pour le jeune homme, allant de Bleu, petit-fils du professeur qui fera office de rival pour lui, la fourbe Verte qui excelle dans l’art d’extorquer son entourage, ou encore la maléfique Team Rocket qui fait des Pokémon un business…



L’objectif de « La Grande Aventure », c’était d’adapter la première génération de bestioles à travers une intrigue fidèle, mais repensée pour correspondre à une aventure au format manga. Ainsi, quelques chamboulements ponctuent la quête de Rouge tout en respectant les œuvres vidéoludiques. Compléter le pokédex, la collecte des badges, la lutte face à la Team Rocket… Tant d’éléments qui apportent à l’histoire un souffle lui permettant de se démarquer des jeux. Les auteurs vont même plus loin et tentent un pari osé : faire de certains personnages clefs des jeux des ennemis pour les héros. Ainsi, les combats ne seront pas forcément ceux de Rouge contre des dresseurs lambda, mais bien contre les champions d’arène ou d’autres ennemis marquants. L’aventure de Rouge marque ainsi une longue aventure et se distingue bien du dessin animé dans lequel chaque épisode correspond à des péripéties indépendantes, parfois ponctuées par la collecte d’un badge jusqu’à arriver à la Ligue Pokémon locale.



Mais arrivé à la moitié du titre, le Japon accueillait la version Jaune et inclure les influences de ce nouveau jeu au manga s’avérait essentiel, raison pour laquelle cette première partie de l’œuvre part sur un second arc narratif présentant un nouveau héros : Jaune. Les objectifs changent nettement, de même pour les adversaires qui sont nouveaux tout en faisant une nouvelle fois écho aux jeux. En somme, deux arcs scénaristiques constituent cette première phase du manga et il s’agit à chaque fois d’épopées aux enjeux clairement définis, rendant la lecture fluide et agréable. De même, « La grande aventure » trouve une conclusion et aurait pu en rester là… ou presque. Car sa suite directe est évidemment le cycle Or / Argent / Cristal qui correspond à sept nouveaux volumes de l’édition japonais.



Pokémon est et a toujours été un univers bon enfant, que ce soit l’anime ou le jeu vidéo. Les créatures ont pour le plus souvent un design simpliste et peu monstrueux, au mieux leur visuel sera impactant grâce aux créatures légendaires ou certaines bestioles particulières. Certes, certains épisodes du jeu vidéo ou encore les premières saisons de l’anime pouvaient pousser la maturité des scénarios, on peut notamment penser aux opus Noir & Blanc qui proposaient un récit plus construit et une Team ennemie aux ambitions poussant réellement à la réflexion par rapport au concept du pokémon. Ce premier acte de « La Grande Aventure » suit un peu cette lignée, c’est-à-dire que la tonalité et les thématiques exploitées iront au-delà de l’adaptation animée et des premières versions au scénario abstrait. Ici, les combats ne sont pas toujours présents dans un but compétitif et lorsqu’un duel sérieux a lieu, le dresseur peut être autant blessé de son compagnon, voir bien plus. La mort est une idée parfois présente ou qui, du moins, est évoquée et peut frapper un individu. A ce titre, l’introduction du second arc du manga est choquante pour quelqu’un habitué exclusivement au dessin animé, et il en va de même pour le passage de Lavanville et son de son combat morbide au cœur de la Tour Pokémon. Ainsi, tout en restant bon enfant, le manga a pour mérite de ne pas prendre son public pour un idiot et de proposer des éléments plus sombres, mais adaptés à un large lectorat.



Notons que cette trilogie s’ancre dans la catégorie du shônen classique. Bien souvent, le titre puise dans l’héritage laissé par des titres comme Saint Seiya, mais aussi Jojo’s Bizarre Adventure. Lors des grandes batailles, les héros sont souvent amenés à se séparer, d’autres fois faire équipe, et affrontent un adversaire défini dont ils viendront à bout en exploitant divers éléments techniques, allant des capacités de leurs pokémon à l’environnement avoisinant. Il est rare qu’un power-up surprise ait lieu, tout étant question de stratégie et de moyens du bord exploités astucieusement.

Les personnages de « La Grande Aventure » peuvent déstabiliser, que ce soit le lecteur non initié à Pokémon ou le grand fan des jeux vidéo. En effet, tous les personnages assez quelconques des jeux et jamais véritablement exploités se voient plus fouillés, mis en avant, dotés de réactions et interviennent régulièrement au cœur de l’intrigue. Leur schéma est finalement assez classique et aucun de surprendra véritablement, les amateurs de shônen classique resteront en terrain connu. Ils n’en sont pas moins attachants, surtout pour ceux que nous avons rencontrés dans les jeux et qui gagnent maintenant une plus grande personnalité. C’est le cas pour Rouge, Bleu, les champions d’arène ou encore le Conseil 4, ce dernier s’avérant surprenant dans le titre. Ces trois tomes s’imposent ainsi comme une redécouverte à tous les niveaux, et chaque choix d’adaptation est intéressant à apprécier.



Dans son dessin, le manga se présente comme rondouillard et peu détaillé pour séduire un public plus jeune. Les personnages sont fidèles aux visuels des jeux, mais un peu édulcoré pour les faire paraître souvent très jeunes. Il en va de même pour les pokémon, reconnaissables, mais esthétiquement très simplifiés, faisant perdre de la prestance à certains d’entre eux. Le dessin est agréable, mais provoque parfois un contraste : certaines séquences sont psychologiquement plus violentes, et un dessin plus aboutit aurait accentué cette dimension de maturité souvent présente dans le titre. Mais peut-être était-ce là l’unique moyen de permettre des intrigues plus sérieuses tout en destinant l’œuvre à un jeune lectorat ?



Rééditer « La Grande Aventure » en France, en parallèle à la parution d’arcs plus récents comme Noir & Blanc ou prochainement XY, était un projet ambitieux de la part de Kurokawa, et risqué sachant que la saga est longue et que lors de son propre essai, Glénat avait essuyé un cuisant échec. Afin de proposer l’intégralité de ce premier cycle en un temps record et à moindre coût, l’éditeur a opté pour trois volumes très épais, bien plus dense qu’un tome double, mais plus léger qu’un volume triple. En résultent trois volets aux couleurs rouge, bleu et jaune, chaque couverture présentant un des grands héros de la première génération. Le format est atypique et des pavés si épais pouvaient effrayer le potentiel lecteur, mais les ouvrages sont finalement faciles à manier et permettent de profiter en un temps record de la totalité du premier acte en un peu de temps, et pour 30€ tout juste.



Du côté de la traduction, on se rassure de voir une version bien plus fidèle que celle de Glénat en 2001, bien que nous ne pouvons pas totalement incriminer l’éditeur. En effet, Kurokawa s’est vu remettre une bible de termes précis à utiliser, notamment pour les noms des attaques, des villes et des personnages. Voilà la raison pour laquelle les termes employés par Glénat étaient farfelus et manquaient de précision, et pourquoi Kurokawa s’est vu imposé des intitulés de couleur français pour les noms de personnages. Le fan de la première heure aurait évidemment préféré Red à Rouge, tout comme les personnages de Bleu et Verte voient leurs noms intervertis en raison de la logique de sortie des jeux en France, mais le tout n’empêche pas d’apprécier l’aventure à sa juste valeur.



Treize ans après la tentative de Glénat, « La Grande Aventure » marque le retour du premier cycle de la saga manga de Pokémon, une publication inespérée que les fans ont accueillie à bras ouverts. L’aventure, évidemment destinée en priorité aux amateurs de la licence, s’avère plaisante et parvient à adapter de manière astucieuse les éléments des jeux tout en donnant une maturité que n’a pas l’anime, une ligne scénaristique dont les softs n’étaient pas pourvus ou uniquement de manière très légère, et des combats à la dimension tactique. Quelques défauts sont présents, notamment un manque de prise de risque au niveau du dessin et quelques éléments parfois vite retracés, mais le fan de Pokémon appréciera cette lecture qui constitue une excellente adaptation.



Bien souvent, lorsqu’on l’on questionne un fan, celui-ci dira que le manga mériterait d’avoir LE statut d’adaptation clef des jeux, à raison. Et en effet, ces trois tomes proposent une épopée dans laquelle on se plonge avec grand plaisir. Au final, on ne peut qu’espérer que le pari de Kurokawa soit une réussite afin de voir paraître la totalité de la série « Pokémon Special » chez nous. On semble être sur la bonne voie, preuve en est puisque trois nouveaux arcs sont déjà au programme : Noir & Blanc 2, XY et Rubis & Saphir pour apporter une touche rétro en cohérence avec l’actualité vidéoludique.

Chroniqueur: Takato

Note de la rédaction
Note des lecteurs
16.5/20

Evolution des notes des volumes selon les chroniques:

17.00,15.00,15.00,16.00,15.00,14.00,15.00,16.00

Les critiques des volumes de la série