Critique de la série manga
Publiée le Mercredi, 26 Octobre 2011
Promeneur perdu, vieil habitué ou curieux particulièrement tenace, le Wakusei Drops vous accueille en plein centre de Tokyo, bien camouflé au fin fond d’une ruelle d’un quartier calme. Peu de chance de tomber sur ce vieil immeuble qui tombe en ruines et ses trois propriétaires tous plus originaux les uns que les autres. Au rez de chaussée, le bazar de Ranko, plein de merveilles et objets mignons ou insolites. Au premier étage, le café où Tomoya fait des merveilles, et tout en haut le mystérieux salon de voyance de Mikimoto. L’argent ne coule pas à flots pour ces trois jeunes gens un peu marginaux, mais leur plus grand trésor reste leur devise : que tous les clients repartent de chez eux le sourire aux lèvres ! Dans une association de petites nouvelles plus ou moins liées entre elles par les personnages secondaires, on découvre ces trois gérants au sourire éternel et à la bonne humeur omniprésente. Quel sera le prochain client au Wakusei Drops ? Quel sera celui qui verra ses peines apaisées dans ce capharnaüm de joie de vivre ? Yuana Kazumi est bien connue pour ses différentes séries courtes récemment sorties, et elle signe ici avec Bienvenue au Wakusei Drops une très jolie fable du quotidien sans réel fil rouge, sans réelle intrigue, sans réel but autre que celui de nous faire passer un bon moment.
Cette petite série de deux volumes est un rêve éveillé pour nous lecteurs. Un rien de pages, et pourtant tant d’histoires, tant de destins qui se croisent, tant d’émotions qui se créent ! Déjà, on a la chance d’avoir plusieurs personnages principaux, tous également représentés ce qui fait que, par une narration judicieuse, on peut s’attarder successivement sur les uns ou les autres, et que tout le monde a son moment de gloire. Personne n’est oublié, et c’est tant mieux car derrière la très dynamique et enjouée jolie fille, on aurait encore pu apercevoir le beau garçon souriant et charmeur sans le vouloir mais il aurait été dommage d’oublier le mystérieux ténébreux au regard de braise, qui a aussi son rôle à jouer ! Tous ces caractères sont un peu exagérés, tournés en dérision pour notre plus grande satisfaction puisque cela les rend sympathiques, on s’attache très rapidement à eux et si les thèmes abordés frôlent parfois des sujets de société actuelle, l’auteur les choisit avec soin. Pas question de faire rentrer l’amour au milieu de ce trio si serein et soudé, cela créerait des liens fragiles, ravageant la douce insouciance des jours heureux de la boutique. On se délecte alors simplement du principe de ce petit coin de monde à part, bien différent du reste de l’univers. Redonner le sourire à leurs clients, les alléger du poids qu’ils trimballent au quotidien sur le cœur. Tout mettre en œuvre, même l’impossible, pour les soulager et les accompagner vers un bonheur plus simple, plus vrai. C’est une idée récurrente chez la mangaka, mais c’est la première fois qu’elle l’exploite avec autant de pertinence. Les personnages, candides, portent à merveille cette idée du Carpe Diem, ils semblent venir d’un autre monde pour toucher les plus curieux de leur grâce, de leur bonheur et de leur simplicité. On aimerait beaucoup avoir un Wakusei Drops au coin de la rue, parfois ...
Et même quand ce dernier est confronté à une bien triste destinée, l’auteur parvient à nous faire toucher du doigt l’essence même de son histoire : distribuer des sourires par des dons comme la gentillesse et la patience n’a pas de limites, pas même physiques, et cela peut se faire n’importe où. Même en quittant un endroit de rêve, pour en rechercher un autre. La vie continue ! Mais c’est au niveau de l’esthétique qu’on sera le plus surpris. L’auteur s’améliore de titre en titre, et c’est ici un trait absolument superbe auquel on a droit. Les dessins couleurs sont vifs, plein de couleurs pastel à la fois douces et imposantes, et on a rapidement envie de contempler encore et encore cette très attirante couverture. Quant aux dessins en noir et blanc, si l’on retrouve un graphisme plutôt enfantin et rondouillard, les personnages sont très typés, bien différenciés et leurs expressions changent du tout au tout en quelques cases. Les décors sont travaillés, le cadrage parfaitement adapté à la dynamique ou la poésie du manga et on remarque jusqu’à la diversité vestimentaire des personnages principaux. De même, les premières pages de chapitre sont tout bonnement superbes, par leur dynamisme et leur esthétique. L’édition, elle, est particulièrement agréable sauf peut être sur les onomatopées qui chargent un peu trop certains pages.
