Un drôle de père - Actualité manga
Dossier manga - Un drôle de père
Lecteurs
20/20

Ils grandissent trop vite !

    
 

Poussée de croissance

  
A l'exception de l'image finale du dernier volume nous présentant une Rin fière de perdre ses dents de lait, témoignage du temps suivant son cours, rien ne nous avait préparé à ce qui nous attendait à l'ouverture du suivant... Un bond de dix ans dans le futur, nous faisant découvrir une Rin autrement plus élancée et un Kôki passant de petit garnement à bel éphèbe ténébreux !
    
Ce changement, personne ne l'avait senti venir, pas même Akata/Delcourt, le titre français perdant soudainement de sa pertinence dans cette deuxième partie ou Rin prend véritablement le premier rôle. En effet, la demoiselle étant devenue autonome, Daikichi a bien moins de souci à se faire et se conforte ainsi dans une certaine tranquillité, jusqu'à atteindre la quarantaine. D'un autre côté, s'il était ardu de suivre la psyché de Rin lors de son enfance, la voilà qui arrive à un âge où arrivent les premiers tourments, les prises de conscience, les questionnements menant vers notre vie d'adulte.
   
Les tracas de trentenaires laissent ainsi place à des tourments juvéniles beaucoup plus classiques, et l'on pourra ainsi rester perplexe face à ce tournant shojo. Yumi Unita se concentre en effet, dans un premier temps, à la relation tumultueuse qui lie Rin et Kôki. Si ce dernier n'a d'yeux que pour la belle, Rin est au contraire beaucoup plus réservée sur le sujet. Loin de la simplicité des émois d'enfants où l'on peut aimer quelqu'un juste parce qu'il « court vite », nos deux héros sont liés par un sentiment trouble, en particulier depuis que Kôki s'est montré instable dans ses années collège. Mais il faudra pour cela attendre un peu pour le savoir, la mangaka dévoilant au compte-goutte les zones d'ombre de la décennie perdue. Entre déclarations, trahisons et regrets, nous découvrons peu à peu que les liens entre nos protagonistes n'ont pas été aussi stables que nous pouvions le croire...
       
 
     
Fort heureusement, le récit ne se résume pas qu'à cet éternel « je t'aime moi non plus » et nous fait découvrir davantage les ambitions de la demoiselle. Poursuivant les valeurs inculquées par son tuteur, Rin s'occuper du logis et prend soin de Daikichi qui, mine de rien, commence à se faire vieux. Si quelques indices nous avaient montré l'affection que Rin portait aux enfants plus jeune qu'elle, ce sentiment se confirme dans ses aspirations futures. Mais, pour pouvoir continuer à avancer, Rin exprime peu à peu un besoin naturel de vérité, ayant atteint un âge où elle est en mesure de comprendre les raisons qui ont mené à son abandon. Yumi Unita nous fait découvrir avec justesse cette frustration, cette angoisse à l'approche d'une inéluctable révélation qui, à son tour, offrira un nouveau tournant inattendu dans la vie de nos héros...
    
 
   

Crises d'adolescence...

   
S'il convient de ne jamais dévoiler la fin d'une œuvre dans une analyse pour laisser au lecteur le loisir de la découvrir par lui-même, il semble impossible d'étudier Un drôle de père dans son entièreté sans évoquer sa conclusion. Une conclusion qui aura perturbé la majorité, si ce n'est l'unanimité des fans de la série, devant une orientation qui a de quoi laisser perplexe.
  
Aussi, si vous souhaitez conserver l'ivresse de la surprise apportée par cette fin, nous vous invitions à vous rendre directement à la section suivante du présent dossier. Vous voilà prévenus !

        
Le dernier arc d'Un drôle de père s'ouvre au milieu du septième volume, s'installant lentement mais sûrement. Comme nous l'avons évoqué précédemment, Rin, emplie de gratitude envers Daikichi, cherche à lui rendre la protection qu'il lui a assuré pendant dix ans, en étant aux petits soins envers lui. Mais avec le temps, il arrivera bien un moment où la demoiselle devra quitter le nid pour voler de ses propres ailes et, qui sait, laisser Daikichi à d'autres mains protectrices. Une situation qui, étrangement, ne lui convient pas. Mais ce sentiment latent se confirme après la première rencontre avec sa génitrice, cette autre famille qu'elle n'a jamais connue. La demoiselle remet alors en question sa position dans la relation qu'elle entretient avec son tuteur, et l'affection filiale évolue peu à peu en un émoi bien plus profond. Consciente de l'impossibilité de cet amour ambigu, Rin aurait gardé ces tourments pour elle, avec pour espoir de veiller sur son protecteur jusqu'à la fin de ses jours. Au vu du caractère de la jeune fille, ce complexe d'Electre émerge d'une manière naturelle et quelque peu attendue, devant son approche de la gent masculine qui a toujours été houleuse. On se réjouissait alors de voir comment Yumi Unita allait résoudre cet ultime élément perturbateur. Hélas, ce qui devait être seulement le nœud du problème de la série fera aussi partie intégrante de son dénouement...
      
 
  
Yumi Unita affirme (dans l'entretien à la fin du dixième volume) qu'elle a toujours voulu aboutir à cette fin. A y regarder par deux fois, certains éléments, comme le fait que Rin n'ait jamais appelé Daikichi « Papa », pouvaient déjà prédire une telle direction... sans que nous pouvions nous autoriser à l'imaginer honnêtement. Certes, l'auteur avait déjà fait barrage à la fin idéale, mais sans doute trop attendue, consistant à rapprocher notre carré de célibataires pour former une nouvelle famille. Mais la maladresse du récit, habituellement très touchante et offrant à la série son cachet humain et sensible, ne prend pas dans cette dernière ligne droite qui aurait du s'armer de lourds arguments pour convaincre. On s'étonnera par exemple que Kôki laisse filer la belle vers d'autres bras, même s'il les sait surs, et Daikichi lui-même ne semble pas pleinement convaincu par la solution à laquelle il se résigne. Sans oublier quelques révélations bien pratiques pour atténuer le tabou, mais... le problème est-il vraiment là ?
  
Peut-être est-ce une histoire de clivage culturel, mais le final proposé par la mangaka a bien du mal à passer au-delà de notre modèle de valeurs. La famille que nous avions vu évoluer pendant tant de chapitres, dans la douceur et l'innocence, se retrouve ici complètement chamboulée, vers un nouveau modèle beaucoup moins convaincant, malgré l'émotion qui baigne dans les dernières pages du neuvième tome. Car voir nos héros ainsi réunis dans le bonheur, même si ce n'est pas celui que nous imaginions, reste tout de même très attendrissant. Il est vraiment difficile de les quitter sur une note aussi amère, mais doit-on pour autant regretter tout le reste ? Évidemment que non, bien sur, mais il semble bien difficile de passer au-delà de cette tournure qui jure avec le message initial de l’œuvre.
  
  

USAGI DROP © YUMI UNITA 2006 ­ SHODENSHA Publishing Co., Ltd

Commentaires

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raitto

De raitto [2150 Pts], le 11 Novembre 2013 à 11h27

J'avais adoré les 4 premiers tomes et la relation père/fillette et j'ai malheureusement décroché à partir du tome 5 car les tribulations d'ado ne m'intéressait pas du tout (sans parler de la fin...). Bref un peu déçu par la tournure qu'a pris cette série. Très bon dossier en revanche.

Tehanu

De Tehanu [205 Pts], le 10 Novembre 2013 à 19h52

Dossier fort lyrique qui vire presque à l'eau de rose et carrément à la béatification des valeurs familiales. :-) C'est un parti pris comme un autre sur le focus de l'oeuvre, mais ça diminue un rien l'objectivité du chroniqueur et son propos.

 

En ce qui me concerne, la série est agréable jusqu'à son tome 4 et s'arrête là pour moi qui appréciait surtout le thème de l'homme qui doit remettre en question son mode de vie pour le bien-être de son enfant. La suite explore davantage le tourment de l'enfant qui a perdu ses parents et tourne plus vers l'enquête et l'introspection de l'adolescente, et se termine sur une note réellement dérangeante d'un point de vue plus psychologique que moral. 

 

Peu importe qu'il n'y ait aucun lien de sang entre les deux. Daikichi représente la figure paternelle depuis que la petite a six ans, et il l'a élevé pendant dix ans, comme un père, et il se considérait lui-même comme son père. Il s'agit clairement d'un complexe d'Electre non résolu (et mal amené), et qui aurait dû être traité très sérieusement par Daikichi, pour le bien-être de Rin, au lieu d'accepter simplement cette situation de manière très passive et presque résigné, quasiment incompréhensible même quand le même personnage s'inquiétait pour des raisons bien plus "triviales" et communes dans les premiers tomes sur son rôle de parent.

 

Bref, très déçue par la tournure prise par le titre d'un point de vue du choix narratif, alors que j'adore le style de la mangaka et ai beaucoup apprécié son histoire sur les quatre premiers volumes. La dernière image du itre pour moi, c'est donc une photo de Rin qui montre une bouche édentée, et c'est très bien comme ça. 

blablate

De blablate, le 10 Novembre 2013 à 10h44

20/20

merci pour ce dossier. Sa m'a donner envi de me lancer et j'ai deja commander le premier tome^^

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