Le Conte de la Princesse Kaguya - Actualité manga
Dossier manga - Le Conte de la Princesse Kaguya

Quelques limites ?


Même si le film suit son cours avec une logique certaine, travaille très joliment Kaguya, et distille suffisamment bien les éléments importants de son histoire, le spectateur exigeant pourrait dénicher certaines lacunes assez flagrantes.

Ainsi, les indices sur le mystère de Kaguya sont parfois trop passe-partout, et on peut trouver la rupture trop nette juste avant le final, un final captivant côté ambiance sonore mais sans doute un peu trop théâtral.

On peut également regretter des personnages secondaires peu voire pas du tout mis en avant malgré certains qui sont excellents (en tête, la petite servante de Kaguya et ses bouilles inimitables), des personnages de premier plan finalement très limités (surtout l'Empereur et ses façons d'agir peu finaudes, ou même le père de Kaguya qui est surtout cantonné à un rôle de comique peu clairvoyant)... mais après tout, n'oublions pas que l'histoire est un conte, et que, bien souvent dans ce genre d'oeuvre, les personnages sont des figures peu travaillées, presque iconiques.





Maestria visuelle et sonore


Et quoi qu'il en soit, en plus du travail admirable sur les décors, le film peut compter sur une animation somptueuse à de nombreuses reprises.

Petite ironie, il a fallu passer par la modernité du numérique pour rendre si joliment l'ancienneté de l'époque, et de ce côté-là le travail effectué est superbe. Les images fixes sont extrêmement rares, il y a toujours de jolis effets de caméra, des décors qui défilent, des petits éléments qui bougent avec beaucoup de réalisme (par exemple, le faisan, les herbes quand Kaguya rampe, le gros sac que la petite servante porte sur sa tête, le papillon...), alors inutile de signaler l'extrême beauté des mouvements de Kaguya elle-même, que ce soit quand elle fait ses premiers pas, quand elle se déplace ou quand une simple mèche de cheveux retombe de sa coiffure. Il y a, à chaque instant, un grand souci de mise en scène, cette impression que chaque plan est soigné. Et quand on connaît le caractère perfectionniste d'Isao Takahata, on peut aisément comprendre que tout cela a demandé un travail colossal expliquant sans doute en partie les retards de production.

L'aspect "croquis" du design des personnages, travaillé avec le dessinateur Osamu Tanabe, révèle par ailleurs de grandes qualités assez inédites dans l'univers de l'animation, offrant constamment aux personnages un côté "pris sur le vif, dans l'instant" très saisissant. L'un des meilleurs exemples est sans doute le passage où le visage de Kaguya se décompose peu à peu quand elle entend les médisances au banquet.

Certaines scènes en particulier bluffent par leur animation approfondie, par leur esthétisme poussé et par l'intensité qui s'en dégage, et ce sont généralement celles signées Shinji Hashimoto. En tête, la fuite de Kaguya lors du banquet, que l'on a pu voir dans la bande-annonce.

Enfin, n'oublions pas l'impact sonore. Les musiques de Joe Hisaishi, comme toujours, trouvent le ton juste et touchent là où il faut, en jonglant généralement sur la mélancolie et sur les sonorités traditionnelles.

Le doublage japonais est excellent, y compris dans les courtes scènes chantées, et il ne faut pas oublier le très beau travail effectué sur les bruitages : bruissement des feuilles, souffle du vent, bruit de pas, parquet qui craque, notes de koto... tout le travail sonore bénéficie d'un grand soin, pour un résultat très immersif.

Un mot également sur le doublage français. S'il ne vaut évidemment pas le doublage original, il reste très bon, notamment en ce qui concerne la voix française de Kaguya, qui dégage toute la douceur et la beauté dont avait besoin le personnage. Les autres personnages, à commencer par les parents adoptifs de Kaguya, bénéficient eux aussi de voix prenantes, très correctes. On note toutefois quelques lacunes : une tendance à souvent légèrement surjouer, à trop appuyer certains dialogues... le plus problématique restant les quelques passages chantés, qui ont été traduits en français et où le résultat n'est pas à la hauteur. On devine ces quelques choix un peu plus dommageables par une volonté d'adapter le film aux plus jeunes...





Quel public ?


Se pose alors la question du public visé par le film : les enfants français sauront-ils s'adapter au film ? Le Conte de la Princesse Kaguya étant purement japonais et pas excessivement connu en Europe, la question peut se poser, Isao Takahata ne faisant pas grand-chose pour le rendre accessible au grand public non japonais et ne connaissant pas le conte. Avant de voir le film, il pourrait alors être sympathique d'offrir à votre enfant une "première initiation" s'il ne connaît pas le conte, par exemple en jetant un oeil à l'album jeunesse "Kaguya, princesse au clair de lune" paru aux éditions nobi nobi!, bien qu'il offre une version plus gentille et optimiste. Mais même avec ça, il faut dire que le film d'Isao Takahata, de par son ancrage dans le réalisme malgré les éléments fantastiques, par son ton très mélancolique et par son évocation même brève de thèmes durs, s'avère très différent de la plupart des films d'animation pour enfants dont on nous abreuve en Occident.
  
  
  

© 2013 by Ghibli / Walt Disney Studios Entertainment

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