Fake - Actualité manga
Dossier manga - Fake
Lecteurs
20/20

Fondateur du genre ?


Fake est, de par sa date de parution française, l’un des premiers yaois à débarquer dans nos régions. Avec Kizuna, ces deux mangas font office de référence pour les lecteurs qui se frottent à ce genre, afin de découvrir ce qui se faisait avant. Avant que les éditeurs ne surfent sur la vague de la rentabilité, avant que les sorties de yaois ne soient dirigées -et c’est pourtant bien normal- par les goûts de ceux qui achètent. Avant, aussi, que ce genre de série ne marche en France et donc à l’ère appréciée des essais, des surprises parfois bonnes, parfois moins. Et le moins qu’on puisse dire de ce manga, c’est qu’il est la base d’un certain nombre de nos lectures, actuelles ou plus anciennes. Que la série s’inspire de certaines ou qu’elle en fasse découler d’autres, peu importe et l’on se plait juste à retrouver les grands fondements du genre, à l’époque ou le paysage yaoiste n’était pas aussi étendu. Aux côtés de Kizuna, Zetsuai 1989, New-York New-York ou même Combination, Fake s’impose dans le palmarès des anciens. A noter que ces séries exploitent tous un thème suffisamment commun pour qu’on ne puisse passer à côté : la justice, et le contre pouvoir de la justice. Si Combination a déjà exploité ce côté policiers en goguette qui se rapprochent de plus en plus, c’est du domaine du shojo et seule l’imagination permettrait aux deux héros de s’étreindre comme Dee et Ryo dans Fake. Que ce soit du côté des représentants de l’ordre ou des voyous voire yakuza, le genre a toujours aimé utiliser ces deux notions pour se créer et prospérer. Dans Fake, on aperçoit les fondements de la création d’un univers policier créé autour du yaoi, et ses raisons. Ce sont l’ambiance désespérée et la facilité du scénario qui attirent, mais le danger permanent et la dévotion à une hiérarchie quelle qu’elle soit permet de beaux tiraillements dans les sentiments des principaux protagonistes. On retrouve par ailleurs et plus tard cette même ambiance dans d’autres œuvres ... On citera par exemple les CLAMP (dont l’auteur de Combination a un jour fait partie), qui aime exploiter cette ambiguïté dans Tokyo Babylon (l’exorciste qui représente l’ordre, et son opposé qui incarne le chaos) ou Lawful Drug (le duo qui tente de résoudre, ensemble, les mystères les plus complexes). Mais aussi dans The Top Secret, qui joue beaucoup sur l’univers policier pour rapprocher ses personnages et suggérer plus que montrer, soulever plus que réellement admettre. Un autre bon exemple, dans le camp adverse cette fois, est Totally Captivated. Les relations de pouvoir, de domination ont toujours convenu au yaoi et à la création des liens, des doutes.

Qu’on ne s’y trompe pas : ceux qui connaissent Fake depuis longtemps auront le plaisir de dire que leurs références en matière de yaois se sont en partie construites sur l’œuvre de Sanami Matoh. Mais pour les autres, qui reprennent et découvrent cette lecture, le constat sera évident : ça change ! On a en effet l’habitude, actuellement, de compter beaucoup sur les sorties de one-shot ou de séries très courtes, qui -admettons le- ont un but très simple : faire évoluer la relation des héros, vers, souvent, une relation sexuelle. Que ce soit bien ou mal traité, que ce soit construit ou délaissé de toute pertinence, ces petites séries ne sont que des bouts d’histoire que l’on aura malheureusement tendance à oublier facilement. Et, même parmi les meilleurs comme l’excellente Toko Kawai ou la très prometteuse Hyouta Fujiyama, les mangakas ne prennent pas le risque de se lancer dans des longues séries. Peur de lasser, peur de ne pas tenir le scénario, peur d’effacer la magie après le quatrième volume ? En tout cas, la grande majorité de nos sorties françaises se constituent ainsi et, même si la tendance revient avec Love Mode, Junjo Romantica, Ze, Viewfinder, No Money, The tyrant who fall in love et j’en passe, il n’en reste pas moins que le paysage est peuplé essentiellement de courtes histoires. Alors cela fait du bien de se replonger de temps à autre dans une série plus longue, de ces œuvres qu’on ne voit plus ou presque, là où la relation accompagne les intrigues et où le background des personnages était primordial. Un temps plus ou moins révolu, puisqu’on ne pense souvent plus qu’aux héros principaux : tout de suite, rapidement, et ce qui leur arrive comme pérégrinations n’est que détail.
 
 



C’est cela même qui est remarquable dans Fake : les deux jeunes gens ne tombent en aucun cas dans les bras l’un de l’autre pour copuler copieusement dès le premier chapitre et recommencer à tous les volumes. Ce n’est pas un regard qui va tout enflammer, mais une succession de petits riens qui va donner naissance à une belle histoire, qui ne se concrétisera que très tard dans la série. Les sentiments sont alors réellement peuplés d’obstacles et de difficultés majeures, et l’accomplissement des sentiments de Dee et Ryo laisse parfois un goût amer contre le palais. En effet, même à franchir des caps les deux jeunes gens peuvent revenir en arrière, hésiter, et c’est principalement le rôle de Ryo, qui a du mal à s’ouvrir à son coéquipier. On ne sent pas beaucoup de passion venant de lui, comme s’il n’avait fait que chercher et trouver un peu de réconfort lorsqu’il était dans une mauvaise passe. Ce qui, il faut bien l’admettre, est un peu le cas. Bouleversé, le jeune homme se laisse aller dans les bras de Dee, pour oublier et se sentir aimé, et leur première fois n’est pas réellement un partage, plus un présent en faveur de Ryo. On ne peut profiter de scènes érotiques entre eux qu’après une très longue construction, source de frustration pour Dee et aussi pour les lecteurs. Ils mettront du temps avant de s’aimer « pour de vrai », et cela fait un bien fou. D’autant que les scènes sexuelles restent très soft et naturelles, et surtout bien différentes de ce dont on a l’habitude à présent. Ceux qui ne seront pas rebutés par les premiers chapitres ne pourront qu’aimer ce yaoi n’ayant pas pour unique but d’expliquer la copulation homosexuelle …

Il nous faut à présent aborder ce qui est inhérent à une série de longue envergure, et qui est commun à Fake et Kizuna, par exemple. Ce que l’on ne trouve plus dans les très courtes séries proposées à présent, ce que l’on évite alors que dans le même temps on peut bâcler ou bien refuser le long travail d’exploitation qui est fait ici. Ce défaut, cette menace qui accompagne les premiers yaois que l’on a connu et aimé, c’est la répétition. Ce qui marche est répété, amplifié, réutilisé encore et encore, parfois à outrance puisque l’auteur se base sur sa seule appréciation. Ici, c’est le couple Cal - Vikky qui en souffre fortement. Ces deux là servent en chapitre bonus dans un contexte qui les montre enfin en adolescents (alors que dans le récit principal, Vikky a une dizaine d’années à peine mais semble déjà faire de la musculation et avoir subi une cure intensive, au vu des disproportions de son corps), ou bien en toile de fond de l’histoire principale. Mais leur rôle principal, outre de casser toute atmosphère sensuelle entre Ryo et Dee, se résume à se faire enlever, s’évader et causer des ennuis à tout le monde, à croire que les criminels de la ville se donnent le mot pour tomber sur Cal la nuit dans une ruelle sombre. Car si l’on peut comprendre le fait que Dee et son partenaire subissent un nombre impressionnant d’affaires criminelles, de meurtres, d’enlèvements, ce n’est pas le cas pour les deux adolescents. Ils ne sont pas policiers, et au final vivent presque plus d’expériences criminelles que les représentants de l’ordre, juste pour le spectacle. Dérangeant. Le pire étant que ces épisodes, indispensables (ou pas) à la narration de l’auteur, ne perturbe même pas les principaux concernés. Notons enfin que dans un yaoi, on trouve souvent plusieurs couples homosexuels mais là, la concentration de ceux-ci est bien trop exagérée ! Les personnages secondaires ne servent alors qu’à vouloir séduire les principaux, et c’est le cas de beaucoup de yaois dépassant les deux tomes (Love Mode, No Money, Viewfinder, Ze ...). Les femmes en danger, le comique de situation lorsque quelqu’un interrompt Dee et Ryo pile au bon moment, les triangles amoureux et l’univers très « gay » de la série, autant de répétitions qui sillonnent le scénario, le construisant et ce dernier s’appuyant sur ces indémodable. Dans Kizuna, c’est le doute d’un couple secondaire, la jalousie, le regard de l’autre, le danger couru par l’un ... Chaque thème revient plus ou moins selon les séries mais c’est, dans le paysage des plus longs mangas yaois, un apanage qu’ont toutes les œuvres qu’on a pu découvrir à l’époque. 



FAKE © Sanami Matoh/BIBLOS Co., Ltd.

Commentaires

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Aigakin

De Aigakin [4138 Pts], le 23 Septembre 2011 à 14h23

20/20

Fake est une très belle oeuvre et fort heureusement pour moi,j'ai eût la chance que qu'elle qu'un met en vente la première saison(7 volumes)en occaz. C'est dommage qu'il ne le réédite pas pour ceux qui désir l'avoir dans leurs collection. Perso,je le conseille au fan de yaoi.

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