Tu seras un saumon mon fils Vol.2 : Critiques

Le quotidien de Shion a totalement changé depuis l’arrivée de Sauman : son fils mi-homme mi-saumon né de la fécondation du sperme dans un œuf lorsque l’adolescent s’est branlé dans la rivière. Depuis sa rencontre avec son rejeton, il s’est lié d’amitié avec Ginji dont il était, autrefois, la tête de Turc. Seulement, voilà quelque temps que Shion a déserté son domicile pour rester chez son ami, avec Sauman. Il doit penser à retourner chez lui, mais en même temps, s’occuper de son fils-poisson n’est pas de tout repos…

Le premier tome de la nouvelle série de Shôhei Sasaki avait le mérite de proposer une intrigue aussi grotesque que déjantée, portée par le thème de la famille qui rendait le tout plutôt appréciable, malgré une succession de gags qui peinaient à se renouveler. On redoutait alors que cette suite (et fin) s’inscrive dans cette redondance, mais heureusement, l’auteur parvient à dynamiser son récit jusqu’à apporter quelques développements qui vont conclure l’œuvre de manière tout à fait correcte.

Alors, les gags tournant autour de Sauman ne se content plus de jouer sur le pipi-caca-sperme et proposent des choses plus inventives, comme cet événement tout à fait hallucinant de début de tome aussi sanglant que barré. Autant dire que la subtilité n’est pas au rendez-vous, mais le tout fonctionne plutôt bien. Pour le reste, c’est surtout sur la rencontre improbable entre Sauman et des personnages secondaires comme Iku que l’humour va se tourner, des réactions logiques, mais qui ne manquent pas de faire rire. Le tout paraît alors un peu simple, aussi serait-il possible que Shôhei Sasaki se soit modéré de lui-même ? Pas tout à fait, l’aboutissement de son humour venant de sa mise en scène et de son dessin, jouant souvent sur le contraste entre le sérieux des situations et son trait on ne peut plus grossier et, quelque part, réaliste sur les faciès des personnages. On se retrouve alors avec des pages d’une débilité savoureuse, par exemple ce délicieux passage où la stupeur d’Iku face à Sauman nous est montrée en même temps que le visage d’un Shion en extase pendant sa séance branlette devant sa star du porno préférée… Poétique, n’est-il pas ? Autant dire que Tu seras un saumon, mon fils… trouve amplement sa place dans la collection WTF ?! d’Akata.

Parallèlement à ces joyeusetés, l’auteur prend le temps de présenter une conclusion, un véritable acte final où le héros se voit confronté à ses responsabilités. D’une part, c’est là l’occasion pour Shôhei Sasaki d’achever son discours sur la famille de manière assez clichée, le happy-end étant classique, mais à travers des déboires abracadabrants où se mêlent rebondissements absurdes et émotion couillonne. Si le ton se veut dramatique, difficile de ne pas rire, y compris lorsque la série s’achève sur un portrait de famille qui aurait sa place dans un téléfilm de Noël américain. Et paradoxalement, le message de l’auteur est passé, aussi niais soit-il. On ne croit pas une seule seconde à tous ces revirements (en même temps, qui les croiraient ?), mais la recette fonctionne, voire émouvra certains lecteurs, tout en restant fidèle à son ambiance déjantée.

Après un Virgin Dog Revolution réussi, Tu seras un saumon, mon fils… a connu un coup de mou un peu avant sa moitié. Mais ce deuxième tome redresse la barre, conclut le récit dignement à travers tout un tas de séquences vulgaires, improbables et donc hilarantes, le tout s’octroyant une conclusion aussi débile que le titre et porté par le dessin de Shôhei Sasaki, volontairement dans l’excès et le grotesque. Alors oui, il vaut aimer l’humour gras et gore pour savourer le titre, mais celui-ci a le mérite d’être… unique. Oui, vous ne reverrez pas l’histoire d’un homme-saumon né de la branlette d’un ado de sitôt.