Innocent Vol.4 - Actualité manga
Innocent Vol.4 - Manga

Innocent Vol.4 : Critiques

Innocent

Critique du volume manga

Publiée le Mercredi, 18 Mai 2016

La populace remplissant, à n’en plus finir et à perte de vue, la Place de Grève, porte son regard vitreux en direction de l’indigne spectacle : l’écartèlement de Robert-François Damiens va pouvoir retentir avec fracas. Les préparatifs de la torture oscillent, l’oncle Gabriel n’est plus en état d’assister son neveu, les piètres destriers s’élancent : une des plus ignobles séquences de l’histoire de France s’esquisse à l’horizon et elle reposera sur la responsabilité d’un seul homme : le trop jeune Charles-Henri Sanson, exécuteur, malgré lui, des hautes œuvres de Paris.

Les trois premiers quarts de l’ouvrage sont ici consacrés à cette scène désormais devenue historique qu’est l’écartèlement du régicide. Un parti pris de l’auteur quant à une narration lente, à la fois toute en détail et en légèreté. Car, s’il est évoqué la chair qui faiblie, le corps en souffrance et l’ignominie du supplice, il sera mis sur planches nombre de figures de style évocatrices soit d’une métaphysique chrétienne – la mort, les cieux et les anges – voire même d’une dénonciation des dérives de la monarchie royale d’alors : l’inspiration de l’auteur culminera ici d’en la conceptualisation d’un monarque cannibale dont le métabolisme tout entier sera constitué des esprits égarés remplissant le triste théâtre : une prestation artistique pour le moins insolente.

La scène est d’autant plus saisissante que le contraste entre l’âme vertueuse de Charles-Henri et l’exécution monstrueuse de Robert-François sera marqué. Alors que ledit Charles-François Damiens hurle à l’agonie, son corps tout entier se déchire, le bourreau Charles-Henri Sanson, en relevant tous les aléas et les défis de circonstance, n’a qu’un seul objectif en tête : offrir à celui-ci, en dépit de tout, le décès le plus bref et le plus digne qu’il sera possible d’octroyer. Cependant, les choses n’auront de cesse d’empirer.

Comme précédemment, l’auteur procède ici à une subtile synthèse entre faits historiques avérés et libertés romanesques. Ainsi, et pour exemple, l’écartèlement tragique du pauvre Monsieur Damiens, à l’époque, s’éternisa sur plus d’une heure au point d’en déstabiliser la foule et, de surcroît, Charles-Henri Sanson, du haut de ses dix-huit ans, était décrit tel un enfant. Les chevaux à bout de souffle et ne parvenant pas à séparer le corps de la victime, il fut pris la décision d’en découper à la hache certaine partie de l’anatomie de celui-ci. En l’espèce, la liberté a été prise par Shin’Ichi Sakamoto de modifier la conclusion de tout cela afin d’approfondir la relation entre Charles-Henri et sa sœur cadette, laquelle prend, petit à petit, davantage d’importance dans le récit.

Charles-Henri Sanson s’affirme donc comme le seul et unique « Monsieur de Paris » et, lors du dernier quart de l’ouvrage, le lecteur prendra la pleine mesure de cela dans le cadre d’une destinée qui semble désormais se sceller davantage avec sa très jeune sœur Marie-Josèphe, ainsi qu’à travers l’affaiblissement d’Anne-Marthe Sanson, la grand-mère hégémonique. Un ensemble d’évènements de fin de tome qui esquissent des changements conséquents dans les cercles de pouvoir de la famille Sanson.

Ce quatrième ouvrage aura, à nouveau, abreuvé le lectorat d’un insoutenable flot poétique : l’auteur, grand habitué des ellipses, n’excelle pourtant jamais autant que lors d’une narration lente par laquelle il mettra en scène moult détails divers et, souvent, finement choisis, afin de les sublimer ; assez exceptionnel.


Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Alphonse
17 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs