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Interview

Pourquoi un nouveau label d’animation japonaise ?

Quand j’ai pris la décision de me séparer de Kazé, je pensais tourner la page en laissant un secteur désormais mature pour l’animation japonaise en France. J’avais l’intention de me concentrer sur de nouveaux projets et défis passionnants et je me suis mis à aboutir entre temps d’autres projets, en créant par exemple le Dernier Bar avant la fin du Monde...
L’animation japonaise n’a jamais été diffusée aussi vite (simulcast), et il n’y en a jamais eu autant, deux éléments pour lesquels j’ai œuvré des années durant. Mais cette évolution a également des effets néfastes sur le secteur : la diffusion reste de plus en plus cantonnée aux connaisseurs et aux fans, de moins en moins susceptible de toucher un plus large public, et les acteurs semblent souvent se concentrer sur la quantité plus que la qualité. Bon nombre de titres sont vite oubliés, certains parce qu’ils n’ont pas de potentiel, d’autres – et c’est plus préoccupant – parce que le secteur n’est plus structuré pour permettre à ces titres d’atteindre un public nouveau. Preuve en est qu’il y a beaucoup moins de DVD édités à l’heure actuelle voire même de diffusion sur les chaînes hertziennes, seul moyen d’atteindre un public plus large.
L’objectif de @Anime est donc de proposer de nouveau sur le marché une offre qualitative destinée non pas seulement aux fans, mais à tous les spectateurs occasionnels, pour permettre aux «trésors» de l’animation japonaise d’émerger, aux « classiques » d’être toujours présents, et aux films d’être toujours au cinéma. Le label sélectionnera peu de titres, mais les traitera bien de manière à enrichir la diversité de ce qui est disponible pour le grand public.




Que va faire le nouveau label ?

@Anime sera concentré sur les titres et leur qualité, plutôt que sur les moyens de distribution. Nous le construirons autour de trois priorités éditoriales :
• Les sorties en salles de films indépendants.
• Les sorties en Blu-ray et DVD de séries nostalgiques remasterisées au Japon.
• Les sorties de nouvelles séries qu’il serait dommage de n’exploiter qu’en VOD.
De plus, nous comptons tout faire pour nous adresser plus directement à la communauté. Quand j’ai débuté Kazé en 1994, nous vivions dans un monde sans internet, où il était impossible de s’adresser sans intermédiaire au public, où nous prenions le risque d’aller chercher une communauté dont nous ne savons pas si elle existait. Aujourd’hui, nous avons beaucoup d’outils pour aller lui parler et voir pour quels projets elle se mobilise, pour vois ce qu’elle demande, et pour faire d’elle un acteur à part entière du secteur par le biais de leurs demandes constructives.
Nous comptons par exemple faire appel au financement participatif qui, si il avait existé il ya 20 ans, aurait rendu la tache de fonder Kazé beaucoup plus aisée... Ce mode de fonctionnement permettra de tester par avance ce que la communauté souhaite, de mettre des projets à l’essai et – en fonction des résultats obtenus – d’aug- menter la qualité et la quantité de leur contenu. On pourrait envisager de sortir ainsi nombre de produits qui n’ont pas leur place dans la distribution aujourd’hui comme nous l’avons fait dans le monde anglosaxon avec le film Mai Mai Miracle.



Peut-on survivre aujourd’hui sur une niche sans secteur commercial poussé ?

Dans les faits, la France reste l’un des pays ou l’animation japonaise est la plus regardée au monde. Malheureusement, suite à l’essor progressif du piratage en dehors du secteur commercial, le marché français est devenu très secondaire financièrement pour les producteurs au Japon : il est non seulement plus faible que marché dynamique des USA, mais également distancé par des pays voisins tels que l’Allemagne qui pourtant n’ont aucune tradition forte de l’animé mais où les spectateurs sont plus respectueux de la législation et du droit d’auteur. Pour l’instant, seuls les américains ont entrepris leur mutation durable vers la dématérialisation. La France, qui n’a plus ni l’un ni l’autre, pèse désormais un poids faible dans la balance, sauf dans quelques cas spécifiques.



Quels sont les autres défis que vous comptez relever avec ce nouveau label ?

Parvenir à s’adresser plus à la communauté et à la mobiliser positivement pour la rendre responsable des progrès de la japanime