TOURRIOL Edmond - Actualité manga

Interview de l'auteur

Publiée le Dimanche, 06 Mars 2016

Edmond Tourriol et Albert Carreres ne sont pas étrangers au monde de la bande-dessinée en France. Ensemble, ces deux passionnés de football sont les auteurs de Zlatan Style et de Banc de Touche. Ils ont aussi contribué aux œuvres françaises du magazine Shôgun chez Les Humanoïdes Associés en 2007, Edmond avec Zeitnot et Albert avec Hand 7. En ce début d’année 2016, ils nous reviennent par le biais de L’Equipe Z aux éditions Kotoji, une série sur de jeunes footballers prévue sur trois tomes et co-scénarisée par Daniel Fernandes. A l’occasion du 43ème Festival International de la Bande-dessinée d’Angoulême, les deux auteurs étaient présents sur le stand de l’éditeur pour présenter et signer leur nouvelle œuvre, l’occasion pour nous de revenir sur le travail et la passion de messieurs Carreres et Tourriol qui nous livrent leur vision du football et de L’Equipe Z.


Bonjour Edmond et Albert. Pouvez-vous nous parler de votre parcours et ce qui vous a amené vers la bande-dessinée ?

Edmond : Quand j’avais quatre ans, j’étais fasciné par les super-héros, je les appelais les « supers musclés » car on voyait leurs muscles saillants apparaître sous leurs costumes. Avec mon frère, on demandait toujours à nos parents des livres de « super musclés » mais comme on ne savait pas lire, on demandait à ma mère de le faire. Comme ce n’était pas trop sa came, elle nous a vite appris à lire si bien qu’à l’âge de 5 ans je pouvais déjà profiter de mes livres de super-héros. De fil en aiguille, j’ai pris goût à la BD en général, allant du franco-belge comme Lucky Luck et Tintin aux super-héros qui représentent les trois quarts de ma culture avec la pop-culture américaine. Je tiens donc ma passion de cet amour de jeunesse qui ne s’est jamais arrêté puisque je travaille aussi comme traducteur de comics américains pour le marché français.

Albert : Je fais de la bande-dessinée depuis plus de dix ans, j’ai travaillé à la fois pour les Etats-Unis, la France et l’Espagne et sur tous genres de formats, du manga à la BD. Je suis un peu un mercenaire de la bande-dessinée. (rires)

Faire du manga était un rêve pour moi parce que c’est tout simplement de ça que je vis. En particulier, réaliser un manga sur le football est mon rêve ultime depuis que je suis enfant.


Edmond, est-ce que ça te plairait de faire une BD de super-héros ?

Edmond : Bien-sûr que ça me plairait, et j’ai envie de te dire que j’en ai déjà fait mais en amateur, en fanzines, quand j’étais dans une association qui s’appelait Climax Comics. J’ai fait ça en amateur, pendant deux ou trois ans vers 1999. On a publié une cinquantaine de fanzines différents dont chacun était tiré maximum à 200 exemplaires. On a appris plein de choses sur le tas, c’est à ce moment-là que j’ai commencé à écrire mes premières histoires et que j’ai rencontré une bonne partie de l’équipe avec laquelle on évolue au sein du studio MAKMA. Je pense notamment à Stéphan Boschat qui est mon associé au sein du studio ainsi que son gérant. Je l’ai initialement rencontré pour faire du lettrage. Il était au départ prévu comme dessinateur mais après avoir vu ses capacités, il a été décidé qu’il devienne lettreur.


Justement, peux-tu nous parler plus en détails du studio MAKMA ? Comment a-t-il évolué depuis sa création ?

Edmond : Une partie du studio MAKMA est constituée d’une bonne part de l’équipe dirigeante de Climax Comics, c’était une activité amateur. J’ai toujours voulu travailler dans la BD et sur les super-héros. Je ne sais pas si c’est toujours le cas mais quand j’étais petit, au collège lors des premiers jours de cours, on nous demandait de couper une feuille en deux et de noter des informations sur nous, par exemple ce qu’on voulait faire plus tard. Et bien j’ai répondu que je voulais être scénariste des X-Men. Je ne l’ai jamais été, même si j’ai traduit X-Men.

Tout ça pour dire que dans l’équipe, on voulait tous devenirs professionnels et c’est pour ça qu’au lieu de faire nos œuvres en amateurs, on voulait se professionnaliser dans le monde du comics. On a publié notre premier comic-book au niveau national avec un fort tirage, peut-être 2000 exemplaires. C’est un titre qui s’appelait « Spell » et qui racontait l’histoire d’une sorcière. Ce fut un échec retentissant en termes de vente mais on a beaucoup appris lors de sa conception.

Puis petit à petit, à force d’aller sur les salons, je suis entré en contact avec l’équipe de Semic qui publiait alors des super-héros. J’ai eu l’occasion d’y remplacer un ami, rencontré sur un forum de fans de Savage Dragon (super-héros américain, ndt), qui était traducteur et qui ne pouvait plus y consacrer tout son temps puisqu’il avait un autre travail à côté qui lui demandait plus d’implication après les attentats du 11 septembre. Je suis ainsi entré chez Semic et tout s’est bien passé. A partir de là, on avait mis un pied dans le milieu professionnel du comics.

C’est pour ça que l’activité principale de MAKMA est l’adaptation, on fait surtout de la traduction et de l’encrage de comics américains. Néanmoins, on se diversifie aussi tout ce qui existe, Stéphan et moi sommes scénaristes de BD, comics et mangas, et nous avons des dessinateurs, des encreurs, des scénaristes, des traducteurs… Tout ce qui existe dans le milieu de la BD en fait. On compte pas loin d’une quarantaine de personnes capables de se charger de toutes les étapes de la conception d’une bande-dessinée.



Quelle a été votre première approche du manga ?

Edmond : J’ai 42 ans, je suis né en 1974. Comme beaucoup de personnes de ma génération, ce premier contact n’a pas eu lieu avec les mangas sous leur forme papier mais avec leurs adaptations animées. J’ai grandi bien-sûr avec Goldorak, Albator, Capitaine Flam, la Bataille des Planètes… Puis vers mes 15-16 ans il y eut Akira que j’ai d’abord connu par sa version Epic Comics, colorisée chez Marvel par Steve Oliff. J’avais déjà lu le manga par la version américaine mais j’étais heureux de voir la version originale en France car enfin on pouvait lire du manga ! J’ai acheté les bouquins sortis chez Glénat afin qu’ils arrêtent la publication sous ce format, c’était la même époque où j’achetais Kameha qui nous permettait de découvrir plein de séries. Puis, il y a évidemment eu Dragon Ball au format papier… J’aime énormément les super-héros, mais j’adore aussi le manga. Je ne fais pas de sectarisme et j’aime raconter des histoires sur différents formats, je choisi celui qui s’y prête le mieux à chaque fois. Dans le cas de L’Equipe Z, on s’est demandé comment raconter au mieux un récit de foot. On a tous lu dans l’équipe Captain Tsubasa et forcément, c’est le manga qui nous paraissait être le meilleur choix.


Avez-vous des coups de cœur manga actuellement ?

Edmond : Actuellement non, mais j’ai adoré Bakuman car ça m’a rappelé mes premiers pas en tant qu’auteur de manga dans le magazine Shôgun aux Humanoïdes Associés. Petit aparté, Albert dessinait Hand 7, un titre sur le football, tandis que je faisais Zeitnot, un récit sur les échecs. On dit toujours qu’il faut écrire sur les échecs et c’est un domaine que je connais bien, déjà parce que j’ai eu quelques échecs dans ma vie mais on parle bien là du jeu d’échecs (rires), j’ai notamment joué en compétition, on est monté en national 4 avec mon équipe. L’expérience s’est bien passée mais les Humanoïdes Associés ont eu quelques soucis et toute la collection Shogun a été sabordée, mais un jour on fera la suite de Zeitnot.

Bakuman m’a donc rappelé mes premiers pas chez Shogun car on suit deux jeunes plein d’espoir qui attendent l’acceptation de l’éditeur ainsi que les scores de publication des séries… C’est vraiment ce qu’on a vécu, et j’ai adoré le revivre à travers Bakuman. Des mêmes auteurs, il y a aussi eu Death Note des années auparavant. Et en ce moment, je m’éclate à relire l’intégrale de Cutie Honey de Go Nagai, je me fends vraiment la gueule dessus. Enfin, j’ai acheté tout récemment One Punch Man et… jusqu’aux vingt dernières pages, j’avais pris la décision de ne pas lire la suite, j’étais vraiment déçu par rapport au buzz que ça fait. Mais à la fin, je me suis enfin dit que c’était pas mal, et je vais au moins lire le volume 2. Mais ce n’est pas pour autant qu’il s’agit d’un coup de cœur, c’est plus un intérêt, une curiosité. Je n’ai pas de vrai coup-de-cœur en ce moment.

Albert : J’ai joué au foot mais aussi au basketball. Du coup, mon manga préféré est Slam Dunk de Takehiko Inoue, ainsi que Dragon Ball. Dans mes coups-de-cœur, il y a Assassination Classroom que j’aime beaucoup bien que ce soit une histoire étrange, et One Punch Man comme tout le monde. Edmond n’aime pas trop, mais je ne sais pas pourquoi, l’histoire est pourtant très simple : Il y a des monstres, et le héros les dégomme en un coup-de-poing. (rires) Il y a aussi Seven Deadly Sins et d’autres récits dont j’aime le dessinateur…


Le format manga implique un découpage dynamique que l’on ressent dans L’Equipe Z. Albert, tu passes de la bande-dessinée au manga dans tes différentes œuvres, n’est-ce pas trop difficile de jongler entre les supports ?

Albert : C’est difficile parce qu’il y a de la restriction dans le nombre de pages. Dans un manga on peut expliquer l’action, accentuer le dynamisme alors que dans la bande-dessinée on ne peut pas trop faire ça. Je pense que c’est ça la différence et la difficulté.



Le football est un titre qui est imprégné de passion, notamment du côté des personnages. Qu’en est-il pour tous les deux ? Quel est votre rapport au football ?

Albert : Quand j’étais enfant, j’ai joué durant quatre ans au football. Je suis fan du FC Barcelone. J’aime le football et pour ça, il m’est facile de dessiner sur ce thème. Dessiner sur quelque chose qu’on aime est plus simple.

Edmond : De mon côté, c’est très simple : J’ai grandi avec un père supporter de Saint-Etienne, il regardait les matchs de l’équipe de France vu qu’on n’avait pas encore les diffusions de championnats. Je trouvais ça intéressant, mais sans plus. Puis il y eu 1982, lorsque la France s’est faite éliminer contre la RFA, un moment horrible avec cette faute de Schumacher sur Battiston… Mon père en avait les larmes aux yeux, et c’est à ce moment que j’ai commencé à comprendre que le foot est important. Mais ce n’est pas à cet instant que je m’y suis mis. J’étais certes content, mais finalement je m’en foutais un peu. J’ai regardé ça de plus ou moins loin, puis j’ai eu le déclic véritable en 1986, à la Coupe du Monde. L’équipe de Platini… c’était super ! Je me souviens encore de ce match France-Brésil qu’on a gagné aux tirs aux buts, un match que mon père nous avait laissé regarder contre l’avis de ma mère alors qu’il s’est terminé tard avec les prolongations et les tirs-aux-buts. C’est là que j’ai vraiment compris que le foot, c’est un truc sérieux. A partir de ce moment, j’ai commencé à jouer mais pas dans un club. L’idée même de jouer en club me saoulait, je préférais pratiquer avec mes copains, dans la rue ou sur les terrains libres. On jouait tout le temps, j’ai continué jusqu’à l’âge de 17-18 ans. J’ai beaucoup joué et j’ai beaucoup regardé les matchs.

J’habite Bordeaux donc je suis supporter des Girondins qui ont joué des matchs supers dans les années 80, par exemple de la Ligue des Champions en 85… C’était des grands matchs ! Bien-sûr, j’étais content que la France gagne la coupe du monde 98, mais je n’ai pas attendu ce moment pour m’intéresser au foot, ça fait partie de ma vie, d’autant plus que mon fils joue au football et il vient faire du futsal avec moi de temps en temps. Le foot n’est pas qu’un moyen de raconter une histoire pour moi, c’est une passion.


Ce côté passionnel tranche justement avec le côté polémiste véhiculé par les médias…

Edmond : A ce sujet, il y a d’abord un truc important que je vais dire. Le problème que j’ai avec l’idée du foot véhiculée par les médias, c’est que les gens sont jaloux. On entend beaucoup que « les joueurs de foot sont payés des millions à courir après un ballon mais ils sont complètement cons ». Peut-être qu’effectivement ce ne sont pas des champions d’orthographe ou de syntaxe et qu’ils sont très bien payés pour jouer au ballon. Mais dans ce cas-là, pourquoi ces gens ne deviennent pas joueur de foot, si c’est si facile ? Ce qu’il faut savoir c’est qu’un joueur de foot professionnel est presque déjà un pro à l’âge de douze ans, ça implique une hygiène de vie irréprochable, de se coucher tôt tout le temps, de régulièrement faire ses gammes… ce sont des gens qui souffrent énormément parce qu’ils doivent travailler tout le temps. Toi et moi, on se marre quand on tape dans la balle mais ces gens doivent faire ça hyper sérieusement car c’est leur métier. Bien entendu, ils prennent plaisir à jouer mais ils font un travail inhumain, ce dont les gens n’ont pas conscience. C’est dommage que je n’entende jamais des discours comme quoi les acteurs de cinéma sont payés des millions à jouer devant une caméra car le foot, c’est pareil. Pour moi, le football est un art qui demande des compétences physiques et techniques et ceux qui ont vu évoluer Lionel Messi ou Christiano Ronaldo, pour parler de joueurs d’aujourd’hui, diront la même chose. Je trouve ça dommage de réduire le foot à ces idées et de l’assimiler aux racailles et aux illettrés. Le foot est un sport qui appartient à tout le monde. On ne demande pas aux joueurs de faire de grands discours mais d’exercer un beau football qui procurera du bonheur aux gens. C’est important car beaucoup de gens malheureux trouvent un peu de joie en regardant le match les samedis soirs et rien que pour ça, je pense qu’il faut respecter les joueurs.

Albert : Le côté polémiste est presque normal car dès qu’il est question d’argent, il y a des problèmes. Et comme le football génère énormément d’argent, c’est évident qu’il y aura des polémiques. Maintenant, les magazines people espagnoles présentent plus de star de foot que de stars de cinéma, tu peux voir Christiano Ronaldo dans tous les magazines. (rires)



Et justement, le côté passionnel qu’on ressent dans l’Equipe Z et par ses personnages tranche avec cet aspect négatif qui entoure le foot. Quelles valeurs avez-vous souhaité transmettre ?

Edmond : Oui car L’Equipe Z, c’est un peu un rêve de gamin. Quand j’ai commencé à m’intéresser au foot, il était déjà trop tard pour jouer correctement. Je suis entré dedans à l’âge de douze ans, et c’est l’âge qu’ont les joueurs pro quand ils arrêtent de développer leurs capacités techniques pour s’attaquer à leurs capacités physiques. Et justement, on a fait hier soir une partie de foot en salle avec une « équipe Z » composée par le studio MAKMA contre des équipes faites de membres de Kotoji, de blogueurs, de journalistes… Le match a représenté ma malédiction : j’ai les compétences physiques, mais pas du tout la technique. Mon grand regret est de ne pas avoir fait l’effort de m’inscrire dans un club quand j’étais petit. Dans L’Equipe Z, on a voulu prendre le problème au-dessus en présentant des gamins qui jouent en club mais qui ont échoué aux détections du club de foot imaginaire qu’est le FC Bordeaux Métropolis, l’équivalent des Girondins dans notre univers. Mais on leur donne une deuxième chance ce qui est, je trouve, super important dans la vie car j’estime que les meilleures leçons qu’on prend dans la vie résultent d’un échec. L’Equipe Z, c’est une histoire d’une deuxième chance donnée à des laissés pour compte car ce qui est important dans un échec n’est pas la manière dont tu tombes mais la manière dont tu te relèves. C’est ça l’histoire de L’Equipe Z, c’est la manière dont une équipe va se relever ensemble et avancer ensemble. Car dans L’Equipe Z, il y a le mot « équipe ». Et d’ailleurs, notre match d’hier soir contre l’équipe s’est soldé par une défaite pour nous car nous avons joué perso tandis que Kotoji a joué en équipe, ce fut une belle leçon de football.

Albert : Avant même les caractéristiques morales des personnages, j’ai souhaité travaillé les différences ethniques. Et c’est une difficulté car le style manga est tellement épuré qu’il est difficile d’établir de réelles différences.
Dans L’Equipe Z, il y a deux valeurs qui dominent : d’abord la solidarité, mais aussi l’importance d’accepter l’autre. Cette dernière est primordiale car dans le foot de rue, même celui pratiqué sur les terrains vagues, c’est le sport de toutes les ethnies. On est tous ensemble, mais on partage un moment de plaisir.

Edmond : C’est tout à fait ça. C’est aussi illustré par notre partie de foot en salle hier qui réunissait artistes, blogueurs, journalistes, éditeurs… Le foot s’affranchit des ethnies et des caractéristiques sociales.
Albert : La dernière valeur importante de la série est le dépassement de soi qui caractérisent particulièrement les personnages. Car on ne parle pas de l’équipe A, de l’équipe B ou de l’équipe C, mais bien de l’équipe Z, de ceux dont personne n’a voulu !


Dans L’Equipe Z, on remarque qu’une grande importance est donnée aux personnages féminins. Pensez-vous qu’il serait intéressant d’écrire une histoire sur le football féminin ?

Edmond : Je compte bien le faire et à plus d’un titre. D’abord, j’ai vraiment envie de développer un jour un manga spécifiquement sur une équipe de foot féminine. Je le dis comme ça et peut-être que je le dirai un jour à ma fille, mais je regrette qu’elle n’ait pas joué au foot. Je suis heureux qu’elle fasse de la chanson et de la danse, moi-même j’adore la musique, mais je ne fais donc pas de foot avec ma fille. Je trouve le foot féminin très intéressant car ce n’est pas un sport programmé pour les hommes. D’autre part, je travaille actuellement sur le manga officiel du Paris Saint-Germain et vu que ça se passe dans un univers réel, on va présenter des équipes mixtes. On va réunir des personnages inventés de toutes pièces ainsi que des vrais joueurs. On trouvera donc des joueuses de l’équipe de football féminin du PSG dans ce titre. Je sais que dans la vie les joueuses ne jouent pas avec les joueurs mais il n’y a selon moi pas de raison, le football est pour tout le monde.

Albert : En Espagne, de plus en plus de filles jouent au foot mais les gens ne vont pas tellement au stade pour les voir jouer. J’habite à Barcelone et notre équipe féminine va bientôt recevoir celle du Paris Saint-Germain au prochain tour éliminatoire de la Ligue des Champions féminines.

Edmond : On est conscients de l’importance des femmes dans le foot. Dans L’Equipe Z, les personnages féminins ne jouent pas mais elles ont un rôle très important au niveau décisionnel. Laura est la fille de l’entraîneur, elle est aussi l’intérêt amoureux de la série pour Hugo et Majid qui vont essayer de la conquérir. Pour les héros, il y a deux quêtes : Est-ce qu’ils deviendront de bons joueurs de foot, et est-ce qu’ils parviendront à séduire Laura ? Ensuite, il y a la fille du milliardaire, Shakti, qui est amoureuse de Majid qui lui n’est pas intéressé. Elle est presque à l’origine de la situation puisqu’elle pousse son père à accepter le principe même du défi de l’équipe Z. Elle est très intelligente et manipulatrice, c’est d’elle que dépend la formation de cette équipe Z.

Albert : Il y a un autre personnage féminin mais on ne peut rien dire, c’est un secret. (rires)



La série est prévue sur trois tomes. Avez-vous déjà la conclusion de l’histoire en tête ?

Edmond : La série comptera trois tomes de manière sûre, et peut-être plus si la série fonctionne bien. Le synopsis des deux volumes restants est déjà écrit. Le script ne l’est pas, mais on sait comment vont se dérouler les deux prochains tomes. On sait quels joueurs finiront dans l’équipe et quelles surprises la suite réserve.

On a fait le choix d’avoir un arc narratif prévu en trois tomes, c’est l’histoire principale. Mais on fera en sorte d’avoir une fin ouverte parce que si le public est au rendez-vous, on a tellement de choses à raconter qu’on développera les deux-trois idées plantées par ci, par là.

Albert : Je suis à peu près au courant de ce qui va se passer dans la série mais j’ai moins ces choses en tête car je suis dans l’immédiateté du dessin contrairement aux scénaristes qui savent où ils vont. A chaque fois que je reçois le script, j’ai la surprise de découvrir les scènes et les dialogues. J’ai vit un peu la surprise des lecteurs mais j’ai même la chance de pouvoir les retranscrire par mon dessin.


Remerciements à Pierre Sery des éditions Kotoji, à Edmond Tourriol et à Albert Carreres.

Mise en ligne le 06/03/2016.


Interview n°2 de l'auteur

Publiée le Vendredi, 27 Octobre 2017

Edmond Tourriol est un nom qui parle sûrement, surtout depuis quelques mois puisque l'auteur s'est illustré en tant que scénariste de deux mangas sportifs dédiés au football : L’Équipe Z chez Kotoji et Paris Saint-Germain Infinity, édité par Soleil. Après une première rencontre en janvier 2016 aux côtés d'Albert Carreres, dessinateurs des deux titres en question, nous avons profité de l'édition 2017 de Japan Expo pour rencontrer de nouveau l'auteur, et de parler en long et en large de ses deux séries du moment.




Bonjour Edmond ! Nous t'avons rencontré il y a maintenant un an et demi. Le temps a passé, quelle est donc ton actualité de 2017 ?


Edmond Tourriol : En général, mon actualité est très dense puisqu'elle concerne aussi les comics et la bande-dessinée. Pour le manga, nous avons sorti le premier tome de l’Équipe Z en 2016. Depuis, nous avons publié le deuxième volume, qui rencontre un joli petit succès en librairie. Et, je n'ai pas peur de le dire, je trouve ce second tome encore meilleur que le premier, je suis donc très content du retour des lecteurs qui ont encore plus accroché qu'au début. On prépare actuellement le troisième opus qui, on l'espère, devrait sortir avant la fin d'année 2017.

Parallèlement à ça, avec Albert Carreres, on a sorti vers la rentrée 2016 le manga officiel du Paris Saint-Germain : Paris Saint-Germain Infinity. C'est un titre plus fantastique car c'était un souhait du PSG. Ils voulaient du football d'une part, mais aussi des pouvoirs, des hadôken et autres fireball. Ils voulaient un mix entre Street Fighter et le football, on en rajoute donc forcément : les tirs transpercent les filets, peuvent briser des murs... En parallèle au tome 3 de l’Équipe Z, on termine donc le deuxième tome de PSG Infinity. Il sera bouclé en fin de mois (ndt : au moment où l'interview a été passée, en juillet 2017), pour une sortie entre septembre et octobre.


Le second volet de L'Equipe Z est donc sorti en début d'année. Sur le plan créatif, notamment la construction de l'intrigue, quelles sont les difficultés que tu as rencontrées ?

Edmond Tourriol :
C'est difficile à dire. On savait où on allait puisque nous avons établi un arc narratif complet, prévu sur trois tomes, avec le suivi des deux personnages principaux : Hugo et Majid. Ces développements ont un début, une évolution et une fin. Enfin pas tout à fait, dans le sens où on aimerait aller au-delà de trois tomes ensuite... C'est comme dans un film qui raconte les origines d'un personnage qui découvrirait ce qu'il doit faire, où il doit aller. On savait donc ce qu'on voulait faire en terme d'histoire.

En revanche, on ne devait pas perdre de vue qu'on reste sur un manga de football, il fallait donc des scènes de foot. La spécificités du format manga est le découpage d'une scène : une action qui durerait 30 secondes dans la vraie vie peut être racontée sur 20 pages. Il fallait donc qu'on trouve un juste équilibre entre la place qu'on avait sur trois tomes pour raconter toute l'intrigue, et la place qu'on voulait réserver aux scènes de sport. Bien qu'on puisse faire plus de pages dans un manga que dans une bande-dessinée franco-belge, on reste limités. On a donc dû couper certaines scènes de foot que l'on voulait inclure afin de mieux raconter l'histoire. Par exemple, dans le premier tome, il n'y a pas de matchs de foot, contrairement au second volume qui en propose. C'était vraiment une délivrance parce qu'on attendait de mettre le sport en scène. C'est peut-être pour ça que le deuxième tome a reçu un très bon accueil de la part des lecteurs.



Autour de L’Équipe Z, tu as lancé différents projets. L'un d'entre-eux est le crowdfunding pour le générique de la série, peux-tu en parler ?


Edmond Tourriol : C'est un projet que j'ai toujours voulu réaliser. Avant même de faire de la BD, je voulais créer un manga de foot puisque ce sport est une passion. Je joue aussi au foot, avec des potes donc rien de très sérieux, mais ça reste une passion. Quand j'étais gosse, et comme beaucoup de personnes de ma génération, je regardais Olive & Tom à la télévision. Je me suis toujours dit qu'il serait chouette d'avoir une sorte d'équivalent qui se déroulerait en France. Je suis supporter des Girondins, donc ç’aurait été encore mieux que ça se passe à Bordeaux ! (rires)

Je suis allé démarcher les Girondins, on devait réaliser leur manga officiel. C'était un projet qui me tenait particulièrement à cœur et qui devait se faire chez un certain éditeur, mais ça n'a pas abouti, pour des raisons qui m'échappent. Il y a eu un accord oral entre chaque partie : Les auteurs, à savoir Albert et moi, les Girondins eux-mêmes, et Glénat, l'éditeur. Visiblement, les Girondins et Glénat n'ont pas pu se mettre d'accord, et le projet n'a pas vu le jour. En attendant, on travaillait dessus Albert et moi, on était à fond dessus mais nous n'avons jamais été mis au courant. Au bout d'un moment, tant pis, on a laissé tomber.

On voulait vraiment avoir un manga de football qui serait disponible durant l'Euro 2016. C'était un moment porteur pour un tel manga parce que l'Euro s'étant déroulé en France et notre pays ayant actuellement une bonne équipe, il y aurait eu un engouement. C'était maintenant ou jamais. Nous n'avons pas perdu de temps, et nous avons lancé le financement participatif du manga en 2015. On demandait 8000€, ce qui est insuffisant pour permettre la création du manga, payer les auteurs et l'impression, évidemment. Mais c'était une manière de participer au financement, la seconde partie venant du studio Makma, spécialisé dans la création de BD, dans lequel je travaille. Chez Makma, nous ne sommes pas éditeurs, on se considère comme des producteurs. Mais on pensait avoir les reins assez solide pour porter un tel projet, et on s'est lancés. Ça a été un succès, et ça nous a aussi servi d'étude de marché. Nous avons eu la preuve qu'il y avait une réelle demande d'un manga français de foot, même s'il en existe un autre : Head Trick. Mais les deux titres ont des approches différentes.
Nous avons eu plus de 200 commandes du tome 1 en financement participatif. C'est pas mal, parce que ça signifie que sans promotion ni soutien d'un éditeur, des gens nous faisaient déjà confiance. Le premier volume a donc été très bien accueilli. A titre personnel, je me suis rendu compte de l'efficacité du crowdfunding qui nous permet de promouvoir un produit et d'exister sur la place publique, de rencontrer des gens aussi. Certains personnes m'ont connu par cette campagne de financement. C'est intéressant car quand le livre sort en librairie, un buzz a déjà eu lieu, et il y a une certaine attente. Au moment de dessiner PSG Infinity, nous ne pouvions pas travailler de suite sur le tome deux de L’Équipe Z. Mais on voulait continuer à exister vis à vis de la série, on a donc lancé la campagne de financement du générique de L’Équipe Z.

La campagne fut lancée à cette même période en 2016,  et elle fut un franc succès. Le générique a été enregistré, et les contributeurs ont dû recevoir la chanson en mp3. On doit aussi finaliser la sortie CD mais là, c'est moi qui bloque et qui n'ai pas fini les visuels de la pochette. Les fichiers sont pourtant prêts, la chanson a été composée par Gaël Benyamin, qu'on connait surtout sous le nom de Geyster. Je suis vraiment fan de lui, je l'ai connu par un de ses titres que j'adore : Bye bye Superman. On était restés en contact depuis ce moment. Il existe plusieurs versions du générique, notamment une où je parle pour donner une introduction comme dans les dessins-animés des années 80-90. On a co-écrit les paroles avec Gaël, j'ai aussi participé aux chœurs de la chanson... J'ai pris un pied fabuleux ! Encore mieux, une version de la chanson est chantée par ma fille. Je suis super fier d'elle, elle avait 13 ans lors de l'enregistrement et elle chante super bien.
D'une certaine manière, j'ai transformé L’Équipe Z en une aventure familiale et une aventure de copains. Pour moi, la BD n'est pas qu'un métier mais aussi un mode de vie. On peut aussi se marrer dans cette pratique, c'est pour ça qu'on a aussi voulu rajouter du fun au projet.

Pour le tome deux, on a fait une campagne expresse parce qu'on n'avait plus vraiment le temps de s'en occuper. On a demandé peu parce que le but était d'honorer la campagne à coup sûr, sans compter qu'on était certain de voir le deuxième tome sortir, de la même manière que le troisième opus sortira à coup sûr. En conclusion, on peut dire que le financement participatif est inscrit dans le patrimoine génétique de L’Équipe Z. Et c'est tout à fait normal : la série réunissant les valeurs de solidarité, d'amitié et d'entraide, c'est à l'image du financement participatif. C'était donc cohérent de continuer là-dessus.


En 2016, tu nous confiais qu'effectivement, L’Équipe Z est prévu sur un arc narratif de trois tomes mais que si la série rencontrait le succès, il y aurait de développements à apporter. Aujourd'hui, as-tu plus de certitudes quant à la suite ?


Edmond Tourriol : Une chose est sûre, on va faire un bilan comptable à l'issue du troisième tome. Quand on a fini le volume un, on a embrayé immédiatement sur le deux, et même chose avec le trois. On ne réitèrera pas cette formule pour le quatrième volume. On a plein de pistes à exploiter et de choses à raconter avec la suite, on a même semé quelques petites graines qui germeront plus tard. Mais produire un manga, c'est minimum 15 000€ pour les auteurs, plus les coûts divers comme l'impression. Nous sommes co-producteurs sur le projet avec Makma, puis ça sort chez l'éditeur, Kotoji. Nous avons un très bon équilibre financier au studio Makma mais on ne peut pas simplement se faire plaisir, il faut aussi qu'on rentre dans nos frais. Si à la fin des trois tomes on se rend compte qu'on a perdu de l'argent, ça ne va pas. Il faut aussi prendre en compte les perspectives de développement, c'est à dire vendre les droits de L’Équipe Z à l'étranger, car c'est vraiment à partir de trois tomes qu'on te prend au sérieux. Ces droits ne sont pas très élevés en général mais dans notre cas, ça serait toujours un petit soutien qui nous permettrait de mettre en chantier le tome quatre. Je ne peux donc pas prendre d'engagement par rapport à ça : on refuse de laisser les lecteurs sans la conclusion de l'histoire et si le succès est au rendez-vous, on continuera. En tout cas, même si L’Équipe Z devait s'achever au troisième opus, la série s'achèverait bel et bien sur une fin et ne laisserait pas les lecteurs en plan. Si suite il y a, on partira sur un tout autre chemin.


Depuis la sortie du tome 1, tu as pu rencontrer tes lecteurs, que ce soit sur les salons ou sur les réseaux sociaux, par exemple sur certains groupes Facebook, dont un qui s'appelle Parlons Manga Français...

Edmond Tourriol : Tout à fait, ce groupe est une initiative excellente.
J'ai rencontré deux types de public : les jeunes, fans de foot et pas forcément amateurs de manga, mais qui achèteront un titre s'il parle de foot. Ce sont des lecteurs assez jeunes, je dirais entre 8 et 13 ans, ce sera peut-être même le premier manga pour eux. Puis, on a un lectorat de curieux vis à vis des mangas français, qui fait l'effort de soutenir les différentes créations françaises. C'est plus difficile les concernant car il s'agit d'un public plus connaisseur, plus exigeant, et pas forcément fan de mangas de sport.

Le manga sportif est grand public. Par exemple, nos meilleurs ventes se font dans les supermarchés plus que dans les librairies spécialisées. Pourtant, on adorerait qu'elles nous soutiennent, même si certaines ont sûrement bien aimé L’Équipe Z. Mais elles sont aussi conscientes que leur clientèle a moins tendance à être touchée par un manga de sport. Mais aller à la rencontre des lecteurs sur Facebook, notamment sur Parlons Manga Français qui récence plus de 3000 abonnés, est intéressant. C'est là que je reçois des retours, souvent positifs mais pas toujours. Dans tous les cas, les gens sont assez ouverts car même s'ils ne sont pas très portés foot, ils s'intéressent vraiment à un titre quand ils le lisent. Il y aura toujours des petites critiques, dont certains qui assument ne pas être le cœur de cible. Et c'est évident : il y a des gens à qui mon histoire parle, et d'autres non, et c'est normal.



En effet, on peut ne pas être amateur de sport et adorer un titre sportif. C'est le cas de beaucoup de personnes sur certains mangas, par exemple Haikyû!! ...

Edmond Tourriol : Haikyû !! est une série excellente ! C'est un manga que j'achète. Ma fille en est fan, elle voulait même arrêter le karaté pour faire du volley. Bon, finalement, le tome 2 de L’Équipe Z l'a convaincue d'arrêter le karaté pour faire du foot... (rires)


Parlons maintenant de Paris Saint-Germain Infinity. Tu as brièvement évoqué le projet un peu plus tôt, notamment le fait que le Paris Saint-Germain voulait un manga... Peux-tu nous en dire davantage ?

Edmond Tourriol : Les éditions Soleil ont la licence officielle du Paris Saint-Germain. Ils ont besoin de la faire fructifier, c'est à dire créer des projets de bandes-dessinées sous toutes les formes possibles. C'est pour ça qu'ils ont PSG Academy, une BD jeunesse, PSG Heroes qui est un peu plus fantasy, et un livre "Cherche et Trouve" sur l'équipe, d'ailleurs réalisé par le studio Makma... Soleil voulait donc faire un manga, et l'éditeur est parti en quête de quelqu'un qui pourrait réaliser le projet. Ils ont cherché une personne qui pourrait faire du manga français et du manga de foot... rapidement, ils sont tombés sur L’Équipe Z.

Je vais te raconter la légende telle que je l'ai entendue : Jean Wacquet, directeur éditorial de Soleil, mange avec d'autres collègues du milieu de la BD au Comic-Con de San Diego. Le PSG lui avait demandé un manga sur leur équipe, aussi Jean a demandé à ses collègues vers qui il pourrait se tourner pour un tel projet. Tout le monde aurait répondu "Demande à Tourriol !". (rires)
En effet, j'ai fait plusieurs BD de foot. J'étais en vacances, super étonné que Jean Wacquet m'appelle. Il m'a présenté le projet PSG Infinity. J'ai bien entendu accepté, même si ça a retardé la sortie du tome deux de L’Équipe Z car dans cette situation, c'est difficile de refuser. Je suis supporter des Girondins mais c'est impossible de rater une telle opportunité. Ce n'est pas exactement un manga de foot puisque les règles sont différentes, mais c'est super fun de travailler sur les vrais joueurs ! Comme Zlatan a été transféré, on a dû l'enlever au dernier moment. Il était très présent dans le titre et aussi sur la couverture... ça a été un énorme boulot quand on a dû tout redessiner après son départ. Mais bon, c'est le principe d'un manga de licence, il y a parfois des consignes qui font mal à respecter. C'est quelque chose de génial à travailler en tout cas, surtout que le PSG a aussi un beau jeu, même s'il s'est pris une petite déculottée par Barcelone...

A ce titre, il y a une anecdote. Paris avait battu Barcelone 4-0 à domicile en Ligue des Champions, ils étaient donc sûrs de remporter la victoire. Albert Carreres est espagnol, catalan et habite à Barcelone. Pendant le match Barcelone-Paris, on était chacun devant notre télé, au téléphone pour commenter le match. C'est au tour de Cavani de marquer un but, et Albert m'a dit textuellement "Je ne dessinerai plus jamais Edinson Cavani après ce qui vient de se faire". Bien-sûr, c'était pour rire. Mais rapidement, Barcelone repasse devant et élimine le PSG. Du coup, la faute était pardonnée, il pouvait recommencer à le dessiner. (rires)
Mais c'est dommage parce que je pense que le manga va moins bien se vendre que si le PSG avait gagné. La "PSG Mania" a pris un coup dans l'aile et, peut-être que je me trompe, mais le manga se vendra moins de ce fait.


Le départ de Zlatan a dû énormément affecter le potentiel du manga, aussi...


Edmond Tourriol : Exactement. Zlatan est un véritable personnage de bande-dessinée. Il est haut en couleurs, tout le monde le voit quand il est quelque part. C'est un produit d'appel tellement extraordinaire que c'était génial de l'avoir dans le manga. "Footballistiquement" partant, c'est vrai qu'en mettant Edinson Cavani en attaquant de pointe, le PSG n'y perd pas puisqu'il est très bon. En revanche, ma femme ne sait pas qui est Cavani, ma mère non plus... Seuls ceux qui s'intéressent au foot le savent. Le manga a perdu une tête de gondole, entre autre. Ce que beaucoup aimeraient, c'est que Paris recrute une très grosse tête d'affiche. Mais ça, ça ne dépend pas de nous. (rires)

Note : Depuis l'interview, Neymar a signé au PSG. Du coup, Edmond et Albert ont pu l'inclure au dernier moment dans l'histoire du tome 2, ainsi que sur la couverture. Ce fut le coup inverse de Zlatan. Avec la Neymar-mania les auteurs espèrent que le manga cartonnera chez les jeunes, cœur de cible de la série...




Couverture du tome 1 de Paris Saint-Germain Infinity, avant départ de Zlatan Ibrahimovic


Tu distingues donc bien les deux séries qui ont des directions différentes : PSG Infinity est beaucoup plus poussé, plus exagéré.

Edmond Tourriol : Oui et ce qui est intéressant, c'est qu'on mélange les générations, c'est à dire qu'on associe de jeunes joueurs qu'on a créé aux professionnels qui existent vraiment. On mélange aussi les genres puisqu'on a mis en scène une équipe mixte, avec des personnages qu'on a créé, qui ont des rôles totalement différents. Par exemple, Laure est le porte-drapeau du Paris Saint-Germain. Puisqu'on mettait des coups spéciaux et que la série est volontairement partie dans la science-fiction, autant faire des équipes mixtes. Évidemment que dans la vraie vie, c'est plus difficile car ça ne tiendrait pas la route sur le plan physique. Mais dans le cas présent, les personnages ont des pouvoirs spéciaux, donc pourquoi se priver ? Après tout, dans Street Fighter, les combattants masculins et féminins s'affrontent. C'est intéressant car en ce moment, il y a une vraie intention de la Fédération Française de Football de soutenir le foot féminin. Le fait de mélanger garçons et filles dans PSG Infinity, c'est ma petite pierre à l'édifice de la promotion du football féminin.


En effet, tu nous disais en 2016 que c'est une piste que tu voulais traiter. A terme, est-ce que tu te vois faire un manga entièrement dédié au football féminin ?


Edmond Tourriol : Oui, j'ai plusieurs pistes. Déjà, dans L’Équipe Z, il se passe quelque chose dans le tome deux, un événement important par rapport au football féminin. Je pourrais tout à fait rebondir là-dessus pour raconter une histoire sur le sujet. Aussi, au sein de Makma, on a un autre projet sur lequel je ne peux pas donner de détails. Mais on a plusieurs idées, on sait que c'est un sport qui peut être soutenu. Le foot féminin monte, nous aussi on veut participer à cette ascension.



En dehors du manga, tu es traducteur de comics et passionné par les super-héros. C'est une tendance qui monte dans le manga, notamment avec les deux best-sellers que sont One-Punch Man et My Hero Academia. Ce sont des titres que tu as lus ?

Edmond Tourriol : J'ai suivi toute la promo autour de My Hero Academia et ça m'a l'air très intéressant. Le soucis est que j'ai peu de temps pour lire et que je ne m'y suis pas encore attaqué... Néanmoins, c'est dans ma pile de lecture, et je peux déjà en dire que c'est très joli et que ça donne envie ! En revanche, il y avait un tel buzz autour de One-Punch Man que je savais que tous mes collègues qui aiment les super-héros allaient le lire. J'ai acheté les trois premiers tomes mais j'ai arrêté car je trouve ça très répétitif. Je ne vais pourtant pas critiquer parce que ça devient peut-être passionnant par la suite. Je lis des comics depuis tout petit, et je n'ai pas l'impression que la série révolutionne quoi que ce soit. Peut-être que quand on se contente des films de héros au cinéma, on trouve ça novateur. Mais pour moi qui ait lu et traduit un paquet de pages de comics, je n'ai pas l'impression de découvrir quelque chose de nouveau. C'était rigolo au début mais je trouve ça redondant. Je ne m'interdis toutefois pas d'y revenir plus tard, mais il faut dire que mon planning est chargé. Comme je ne suis pas tombé amoureux directement de One-Punch Man, on s'est quittés en très bon termes. (rires)


As-tu l'occasion de lire d'autres mangas ?


Edmond Tourriol : J'essaie de lire un peu de tout. En général, il est rare que j'aille au bout d'un titre, j'essaye surtout de savoir ce qui se fait actuellement. L'un des derniers mangas que je lis avec assiduité c'est Angel Voice chez Kana. Je suis sûr que ça ne se vend pas en France, mais je trouve que c'est le meilleur manga de foot de tous les temps. C'est très réaliste à plusieurs égards, dans les rapports humains notamment, et j'adore ça. Mais c'est peut-être aussi parce que je suis passionné de football.
Sinon, la dernière série que j'ai lu entièrement, c'est Bakuman. Plein de passages me rappelaient ma jeunesse professionnelle, il y avait donc un côté nostalgique.



Interview réalisée par Takato. Remerciements à Edmond Tourriol et à Pierre Sery pour l'organisation de la rencontre.