TAMAKI Chihiro - Actualité manga

TAMAKI Chihiro たまきちひろ

Interview de l'auteur

Interview n°1


Entre ses séances de dédicaces et ses promenades en yukata dans les allées du salon, nous avons eu la chance de pouvoir interviewer Chihiro Tamaki, auteure de Walkin' Butterfly chez Asuka. Une des auteures des plus agréable qui soit...





Manga-News : Bonjour, je suis ravie de vous rencontrer.

Chihiro Tamaki : Bonjour, je suis très heureuse de pouvoir répondre à vos questions.


Vous ne vous destiniez pas à devenir mangaka au départ, pourtant vous avez été acceptée à la Musashino Art University, quels métier désiriez-vous faire?

En fait je voulais être graphiste, c'est ce que je cherchais en entrant dans cette université.


Vous vous êtes sérieusement mise à dessiner après votre passage en tant qu'assistante dans une maison d'édition, quel a été le déclic qui vous a fait prendre les crayons?

Je faisais un petit job d'étudiant dans le magazine « Morning » : je vérifiais l'état du magazine avant sa sortie, je recevais les manuscrits et je devais les renvoyer quand l'éditeur les refusait. Je recevais tellement de manuscrit de très mauvaise qualité que je me suis dit « pourquoi pas moi?! ». Et c'est comme ça que j'ai envoyé mon premier manuscrit.


Qu'avez-vous ressenti quand vous avez appris que vous aviez remporté un concours?

Je savais que le niveau de ce concours n'était pas très haut. Du coup je me disais, un peu facilement, que j'avais des chances de gagner. Ce dont j'ai été la plus heureuse, c'est de recevoir la récompense.




Vous avez eu à vos débuts des difficultés à écrire vos premier scénarios, trouver des idées d'histoires. N'avez-vous pensez à vous associer à un scénariste et ne vous consacrer au dessin?

Pas du tout. Ce n'est pas quelque chose qui se fait souvent au Japon, ça ne m'a même pas traversé l'esprit.


Les débuts de « Walkin' Butterfly » ont été chaotique. Après une première prépublication dans un magazine celui-ci a cesser de paraître, ce qui a mis la série en « stand by ». Comment avez-vous réagi face à cet arrêt?

C'était un grand choc pour moi. Le magazine s'est arrêté de paraître sans prévenir. C'était comme perdre un enfant. J'ai été vraiment très choquée et déprimée aussi.





Heureusement Ohzora vous a contacté 3 ans plus tard environ pour reprendre la série. Est-ce que ça a été difficile de se replonger dans une histoire qui avait été arrêtée?

Oui, c'était très difficile. C'était comme retrouver un enfant qui était mort. On ne se rend pas compte tout de suite de ce qui se passe. Il m'a fallu beaucoup de temps pour retrouver mes idées, mon inspiration et reprendre mon « bébé ». J'ai eu peur aussi de ne plus être à la hauteur de ma création initiale.


Avez-vous modifiez des choses par rapport à l'histoire que vous aviez prévu à l'origine?

La fin de l'histoire était bien claire pour moi, je n'ai rien eu à changer de ce côté là. Mais c'est vrai que le cours de l'histoire a un petit peu été modifié.


Vous dites ne rien connaître à la mode et que c'était l'idée de votre premier éditeur d'écrire une histoire qui se déroule dans ce milieu là. Comment avez-vous travaillé pour écrire un récit sur un sujet que vous ne maîtrisiez pas?

Sur « Walkin' Butterfly » on peut dire que 98% de mon travail c'était mon inspiration, et les 2% qui restent étaient vraiment des recherches.


L'héroïne de votre série, Michiko, est assez agressive, complexée par sa grande taille. Est-ce que c'est vraiment la seule chose qui l'empêche de s'ouvrir aux autres?

En fait Michiko est très naïve. C'est une fille qui peut-être facilement blessée et donc elle se protège par son agressivité. Et le côté naïf et agressif, je trouve que ce sont deux caractères qui vont bien ensemble.


D'après vous comment une personne comme Michiko peut être moins complexée en travaillant dans un milieu où on est jugée uniquement sur l'apparence?

Quand on a un complexe, on a tendance à le cacher. Michiko va se retrouver obliger de se montrer. Elle va se rendre compte que son corps va lui permettre d'avoir un travail, de gagner de l'argent et de surpasser ce complexe. C'est ça que voulais montrer.


Vous avez rencontré le top model Aï Tominaga. Est-ce que ça vous a aidé pour l'écriture de Walkin' Butterfly?

En fait je ne l'ai pas rencontrée (rires). C'est une de mes top models favorites, c'est vrai. Quand j'allais finalisé mon manga, j'ai pu lire l'essai qu'elle a publié. Comme elle a été publiée chez le même éditeur que « Walkin' Butterfly », j'ai trouvé dommage de ne pas avoir pu le lire avant.


On dit que la France est la capitale de la mode. Pensez-vous que c'est encore le cas sachant que de nombreux styliste s'inspirent aujourd'hui de la mode japonaise?

Je pense que la mode est plutôt un échange. Et ça se concrétise aujourd'hui par l'ouverture d'un magasin de mode japonais à Paris. Mais Paris restera quand même la ville de la mode (rires).


Vous êtes ici au plus grand festival européen dédié au manga et vous avez pu rencontrer de nombreux fans français. Qu'est ce que ça vous fait?

Je me suis rendu compte de l'ampleur du phénomène. Le public m'a apporté beaucoup d'énergie et d'encouragement et j'ai envie de travailler encore plus (rires). Ils m'ont rappelé ma passion pour le dessin.




Merci beaucoup!

Merci à vous. J'espère que vous prendrez plaisir à lire « Walkin' Butterfly ».


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Interview n°2

Dans le cortège d'invités du Cartoonist 2013, nous avons eu le plaisir de retrouver Chihiro Tamaki. Après une première rencontre à Japan Expo en 2008, où nous avions eu tout le loisir de devenir sur son premier succès, Walkin' Butterfly (lire l'interview ICI), la mangaka nous est une nouvelle fois apparue en yukata et avec la sympathie qui la caractérise. Voilà l'occasion de revenir sur le parcours de cette auteure atypique, dont la carrière a été depuis enrichie du seinen Fool on the Rock et de sa série en cours au Japon : Ball Meets Girl
     
   
      
     
     
Manga-News : Bonjour, et merci pour cet entretien ! Vous êtes de retour en France après une première venue à Japan Expo en 2008. La France vous avait-elle manqué ?
Chihiro Tamaki :  En effet, c'est ma seconde visite en France, mais la première à Nice. Et honnêtement, je préfère le sud à la capitale ! (rires)
      
    
Depuis notre dernière rencontre, nous avons eu l'occasion de découvrir en France la série Fool on the Rock. Après la mode, pourquoi avoir choisi de vous intéresser à la musique, et plus particulièrement au rock ?
En réalité, pour Walkin' Butterfly comme pour Fool on the Rock, je n'ai pas choisi moi-même les thématiques : ce furent des suggestions de mon responsable éditorial. Le thème du rock a toujours été assez porteur, et c'est ainsi que je me suis lancé dans cette série.
   
    
Entre les deux séries, vos méthodes et votre rythme de travail ont-ils évolué ?
Oui, les séries touchant un domaine différent, il y a eu quelques changements dans ma manière de faire. La charge de travail a augmenté, en particulier car j'avais beaucoup plus de personnages à mettre en scène simultanément. Cependant, je pense que cela n'a pas réellement eu de répercussions sur le résultat final, ni sur mon style graphique.
   
       
             
      
Dans cette série, vous avez choisi de mettre en avant des héros masculins. Etait-il plus difficile pour vous de vous mettre dans leur peau ? 
Pas particulièrement, non. En réalité, je préfère même travailler sur des personnages masculins, car j'ai plus de plaisir à les dessiner !
       
   
D'ailleurs, vos héroïnes sont souvent des garçons manqués, que ce soit Michiko de Walkin' Butterfly ou, plus récemment, Hatsuko dans Ball Meets Girl. Pourquoi donnez-vous à vos protagonistes un tel caractère ? 
C'est sans doute parce que je suis aussi un garçon manqué ! (rires) Et que mon caractère doit ressortir davantage sur mes héroïnes féminines, je pense.
    
    
A ce sujet, on peut noter quelques références à d'autres œuvres dans vos mangas, en particulier vers des shonens (Ashita no Joe dans Walkin' Butterfly, par exemple). Aviez-vous des lectures de garçons dans votre enfance ?
Je suis passée par plusieurs stades : j'ai d'abord commencé par du shônen, en lisant le Sunday. En particulier, j'aimas beaucoup Urusei Yatsura (Lamu). Ensuite, je me suis mise aux lectures pour filles et j'étais passionnée par Hot Road de Taku Tsumugi, publié dans le Bestuma. Une histoire d'amour assez classique dans le genre, mais avec un côté "yankee manga" que j'adorais ! (rires) Et enfin, je m'intéresse aujourd'hui aux seinen, principalement avec la série des Kaiji (qui s'étale sur quatre saisons, la dernière étant encore en cours, ndlr).
       
    
    
    
Revenons sur Ball Meets Girl, série que vous avez lancée fin 2011, et qui signe pour la première fois une collaboration avec un scénariste, Masaya Tsunamoto. Qu'est-ce que cela a changé pour vous ? Intervenez-vous tout de même sur l'histoire ?
Ball Meets Girl est une série qui a pour thème le base-ball. Or, contrairement à mes séries précédentes, je ne connaissais pas vraiment le sujet avant de l'aborder, c'est pourquoi je collabore aujourd'hui avec M. Tsunamoto. Il s'occupe du scénario dans sa globalité et son aide sur les parties techniques me sont précieuses. En contrepartie, je conserve une liberté totale sur la création des personnages ainsi que sur la mise en scène des planches. En comparaison, si l'on travaillait sur un film, il serait le réalisateur et moi son actrice, interprétant ses directives à ma manière.
    
     
Partie d'un sujet très féminin comme l'est la mode, vos histoires se sont orientées par la suite vers des thèmes plus accessibles aux garçons. Est-ce que votre lectorat a évolué au fil des années ? Avez-vous eu plus de retours de lecteurs masculins ?
Non, j'ai remarqué qu'étonnamment, l'équilibre n'a pas vraiment changé depuis mes débuts. Même si les thématiques sont plus masculines, les lectrices ont continué à suivre mon style d'écriture.
        
  
       
     
Quelles sont les thématiques que vous aimeriez aborder, dans un futur plus ou moins proche ?
J'ai beaucoup d'idées en tête pour l'avenir, mais j'en ai une qui me tiendrait vraiment à cœur : une biographie de Helena Rubinstein, l'industrielle qui a fondé la marque de cosmétiques portant son propre nom. C'était une femme de caractère, réputée pour être une redoutable en affaires, mais qui a eu une vie passionnante. J'aimerais raconter sa vie en manga, mais hélas, les ayant-droits de la marque ne sont pas très favorables à ce projet. J'espère qu'un jour, la situation se débloquera !
     
      
Merci beaucoup !
     
    
         
Remerciements à Chihiro Tamaki, ainsi qu'à Suzuka de Nolife pour sa qualité d'interprète improvisée !