MIKIMOTO Haruhiko - Actualité manga

MIKIMOTO Haruhiko 美樹本晴彦

Interview de l'auteur

Cette année, Japan Expo accueillait en tant qu'invité d'honneur anime Haruhiko Mikimoto, pour fêter les 30 ans de Macross dont il est le character designer. Entre deux conférences le samedi (où nous n'avons malheureusement pas pu être présents) et le dimanche, nous avons pu rencontrer M. Mikimoto lors d'une interview courte mais riche en éclaircissements, où il est volontiers revenu sur ses débuts et son amitié avec Shôji Kawamori, sur son travail sur les mangas Macross 7 Trash et Gundam – École du Ciel, sur ses préférences dans le chara design, le manga et l'illustration.





Monsieur Mikimoto, bonjour et merci à vous d'avoir accepté cette interview. Qu'est-ce qui vous a donné envie de devenir chara-designer et illustrateur ?
Haruhiko Mikimoto: A la base, je n'ai jamais réellement souhaité devenir chara designer ou illustrateur. Depuis mon enfance, j'aime beaucoup dessiner, mais jamais je n'avais pensé à devenir professionnel.

Tout a commencé quand un ami de l'université est entré dans le milieu de l'animation au sein du studio Nue, qui a conçu Macross. Cet ami n'est autre que Shôji Kawamori, initiateur du projet Macross et mecha designer de la série. J'allais régulièrement lui rendre visite de façon amicale sur son lieu de travail, et c'est à partir de là, en l'observant en train de travailler, que l'envie d'entrer dans ce milieu m'est venue.

L'envie s'est accentuée en voyant le film Space Cruiser Yamato (voir visuel ci-dessous) et la première série Gundam, qui ont révolutionné l'animation japonaise et plus spécifiquement la science-fiction dans l'animation grâce à leur contenu mâture, et qui ont commencé à me faire prendre conscience des nombreuses possibilités offertes par l'animation.

Entré dans le studio Nué grâce à Shôji kawamori, j'ai alors commencé à travailler sur Macross, et au début j'ai beaucoup souffert car je n'avais aucune expérience professionnelle dans ce domaine : je n'ai jamais fait d'études artistiques, ni d’illustrations en couleur.

C'est seulement quatre ou cinq années plus tard que j'ai pris conscience que je pourrais vivre sur la longueur grâce à ce travail. Avant cela, je ne me projetais absolument pas vers une carrière professionnelle dans ce domaine.
 
 
 
 

Vous avez réalisé l'adaptation manga de Macross 7: Macross 7 Trash, qui diffère assez de l'anime. Qu'avez-vous cherché à apporter de plus avec ce manga ?
Au départ, Macross 7 Trash devait être vraiment très proche de Macross 7, le projet était de faire une adaptation fidèle à l'anime, avec la même histoire et les mêmes personnages. Mais alors que le projet était déjà lancé, l'éditeur demanda s'il était possible de rester proche de l'univers de Macross 7 tout en ayant une histoire et des protagonistes différents. Le point de départ des différences entre le manga et l'anime vient de là.

Cela dit, il faut également savoir que c'était la première fois que je travaillais sur un projet lié à Macross indépendamment de mes collègues, ce qui m'a évidemment posé quelques problèmes et contraint à changer certains éléments en me basant sur mon unique expérience. Par exemple, pour l'anecdote, Monsieur Shôji Kawamori, le mecha designer et initiateur du projet Macross, travaillait principalement sur les Valkyries dans l'anime. Seul, je ne me sentais pas capable d'offrir une place importante aux Valkyries dans le manga, et c'est donc quelque chose que j'ai essayé d'éviter. C'est pour ça qu'il n'y a pas de Valkyries dans le manga.

A côté de ça, il y a des thèmes présents dans l'anime que je souhaitais à tout prix reprendre dans le manga. C'est le cas de l'introspection des personnages, qui connaissent de nombreux doutes, mais aussi de la musique qui réveille les sentiments chez les hommes et les zentradiens, et, de manière plus générale, des sentiments eux-mêmes avec les relations entre les personnages.
 
 
   
  
 
 
Vous avez également travaillé sur la saga Gundam. Vous considérez-vous vous-même comme un fan de cette saga ?
Au jour d'aujourd'hui, je ne peux pas réellement me considérer comme un fan de Gundam, tout simplement parce que la saga est tellement grande, tellement large que je n'ai pas tout vu et n'en connais donc pas tout. Par contre, je peux dire que je suis toujours aussi fan de la première série, que j'ai vue quand j'étais petit.
Dans tous les cas, je ne porte pas de regard critique sur la saga car je ne la connais pas en entier. Cela dit, de ce que j'ai vu de la dernière série en date, Gundam Unicorn, je pense que ça me plairait beaucoup.
  
 
  
     
 
Votre arrivée dans le monde de Gundam s'est faite avec votre travail sur Gundam 0080. Comment s'est passée cette première expérience ?
J'étais forcément très intimidé, car j'intégrais là le staff de la saga qui m'a donné envie de travailler dans ce milieu. Cela dit j'ai pris beaucoup de plaisir. Moi qui étais plutôt habitué à dessiner des jeunes adultes ou des adolescents, je me suis retrouvé à dessiner des enfants et des personnages plus vieux.
Mais ce n'était pas facile, car les réalisateurs étaient très dirigistes et laissaient peu de liberté. Ce qui, quelque part, m'a sans doute aidé à progresser.
 
 
Tout comme vous avez conçu un manga dans l'univers de Macross, vous travaillez sur une verison papier de Gundam : Gundam - École du Ciel. A votre avis, qu'apporte votre manga à la chronologie de l'Universal Century ?
Je dirais qu'il s'agit plus de nuances, comme le fait que les personnages soient des jeunes filles. Le fait d'apporter une touche plus féminine était une volonté nette.  Au départ, j'ai eu peur que l'éditeur refuse cette idée, mais j'étais tellement déterminé qu'il m'a rapidement soutenu.
Hormis cela, l'histoire en elle-même est originale, mais ne cesse de se raccrocher à des épisodes qui sont déjà connus. Il s'agit plus d'un complément que d'un apport nécessaire.
 
 
   
  
 
 
Vous êtes chara designer, illustrateur, mangaka. Quelles sont, pour vous, les contraintes propres à chacun de ces domaines ?
Tout d'abord, je peux dire que dans l'animation, pour mon travail de chara designer, mon dessin est repris par d'autres pour être amené jusqu'à son accomplissement, et quand cet accomplissement est bien fait, on a l'impression de recevoir un cadeau. Mais cela dit, dans le cas du chara design, je ressens quand même de la frustration à ne pas pouvoir mener jusqu'au bout une œuvre par moi-même selon ce que je souhaite, puisqu'au bout d'un moment mes personnages finissent par m'échapper. Le chara design n'est donc pas un travail qui correspond forcément toujours à mon caractère.

Ce que je trouve vraiment intéressant dans le manga, c'est qu'il y a toute une partie dont je m'occupe directement, de A à Z, notamment en ce qui concerne les personnages, justement. A côté de ça, je n'aime pas et ce n'est pas ma spécialité de dessiner des mechas, et du coup, pour accomplir ce travail-là, j'ai des assistants que je peux diriger, et le résultat est meilleur que si c'est moi qui les avait dessinés. Ca aussi, c'est un point que je trouve assez agréable. De plus, comparativement au métier de chara designer, je trouve qu'en tant que mangaka on est plus proche de l'illustration, puisque les dessins entiers des personnages sont de moi. Par contre, ce qui est plus délicat, plus difficile dans le manga, c'est que c'est destiné à être lu, il ne s'agit pas de faire juste du dessin qui se contemple, donc il faut évidemment faire très attention à la mise en page. Il faut que le lecteur ait envie de tourner la page, il faut faire attention à tout un tas d'éléments autres que le dessin pur, et encore une fois, je pense que c'est quelque chose pour lequel je ne suis pas forcément fait, et je dois donc me faire un peu violence là-dessus.

Pour finir, en ce qui concerne l'illustration, j'y ressens tout simplement le plaisir de dessiner seul une œuvre terminée. Mais ce qui est moins simple, c'est qu'il y a des modes, des courants auxquels il faut faire attention, et une fois que c'est terminé, le dessin est figé : on ne peut pas revenir en arrière. Il y a donc une pression : on n'est pas entièrement libre de dessiner ce que l'on veut, il faut quand même prendre en compte ces points. Voilà pour les principales difficultés de l'illustration. Également, le plus souvent en ce qui concerne l'illustration, ce sont sont des travaux qui nous sont demandés, et moi, ce que je préfère faire, c'est dessiner pour le plaisir.


Vous travaillez toujours sur Gundam – Ecole du Ciel, mais avez entamé en parallèle un nouveau manga ancré dans l'unviers de Macross : Macross The First. Comment gérez-vous le travail parallèle sur ces deux séries ? Pouvez-vous nous dire quelques mots sur Macross The First ?
Travailler en parallèle sur les deux séries n'est pas évident. Je donne la priorité à Macross The First, et de ce fait, la parution de Gundam – Ecole du Ciel peut paraître lente, voire quasiment en pause très souvent. Pourtant, j'ai déjà en tête la conclusion de Gundam – Ecole du Ciel, mais je n'ai toujours pas conclu la série par manque de temps. Un manque de temps non aidé pa rle fait qu'il me faut plusieurs jours pour me remettre dans le bain quand je passe d'une série à l'autre.

Macross The First reprend l'histoire de l'anime original, mais j'ai choisi de couper divers éléments pour plutôt reprendre des idées qui avaient été abandonnées à l'époque. Et histoire de ne plus décevoir les fans de Macross et de mechas qui avaient eu la surprise de ne pas en trouver dans Macross 7 Trash, j'ai décidé, cette fois-ci, d'accorder une place et un soin particulier aux Valkyries. J'espère que vous aurez un jour l'occasion de découvrir ce manga en France.
  
 
   
 
 
 
Remerciements à Haruhiko Mikimoto, à la SEFA et au traducteur.