KODAKA Kazutaka - Actualité manga

KODAKA Kazutaka 小高和剛

Interview de l'auteur

Publiée le Lundi, 24 Juillet 2017

Parmi les invités jeux vidéo de Japan Expo, on trouvait Kazutaka Kodaka, celui qui se cache derrière la saga DanganRonpa. A l'approche de la sortie du jeu DanganRonpa v3 le 29 septembre prochain, nous avons eu la chance de le rencontrer pour une interview où nous avons pu revenir sur la saga, sur ses déclinaisons en animés, mais aussi sur le manga Guren Five qu'il a scénarisé.



Merci beaucoup d'avoir accepté cette interview. Une question classique pour commencer : comment a germé en vous l'idée du premier jeu DanganRonpa ?

Kazutaka Kodaka : A la base, je voulais tout simplement me faire plaisir. J'ai pris tout ce que j'adorais jusqu'à présent : films, musiques, mangas... j'ai tout mis dans un sac, j'ai mélangé et ça a donné DanganRonpa.

En toute modestie, je pense qu'en jouant à ce jeu il devient possible à tous les joueurs de comprendre la totalité de la culture japonaise (rires).


Sur les jeux DanganRonpa vous êtes toujours crédité en créateur original et scénariste. Du coup, dans quelle mesure participez-vous aussi à l'élaboration du design des personnages et des décors, qui ont une patte bien identifiable ?

A l'origine je voulais faire un jeu original du début à la fin, et pouvoir contrôler tous les éléments du jeu. Je suis donc le créateur original et le scénariste, mais je voulais également pouvoir dire ce qu'il fallait faire concernant les designs des personnages et des décors. Tout est fait avec mon accord et sous mon contrôle.



Du coup, quand vous donniez les consignes à votre équipe, aviez-vous par exemple transmis des croquis ou d'autres choses ?

Je suis extrêmement mauvais en dessin donc je n'ai fait aucun croquis. Par contre, la personne en charge des designs est un ami très proche qui me connaît très bien. Toutes mes instructions sont faites à l'oral, et c'est ce collègue et ami qui parvient à retranscrire parfaitement ce que je veux.


Au fil des jeux, la figure de Monokuma est devenue une vraie mascotte avec sa double face (un côté blanc classique, un côté noir ricanant et avec un œil en éclair rouge) et son comportement barré. Comment sont nés le caractère et le design de ce personnage ?

Monokuma était le premier personnage créé pour le jeu.

DanganRonpa se base beaucoup sur la dualité entre espoir et désespoir. En Japonais, les mots « kuro » (noir) et « shiro » (blanc) peuvent aussi signifier « coupable » et « non coupable », j'ai donc voulu baser le personnage sur cette double-personnalité, avec un côté blanc tout doux à la Winnie l'ourson, et un côté noir inspiré du Venom de Spiderman.



Très récemment en France on a retrouvé la saga sur PS4 avec Danganronpa Another Episode: Ultra Despair Girls, qui fait le pont entre Danganronpa: Trigger Havoc et  Danganronpa 2: Goodbye Despair, et qui est plus axé action/aventure. Pourquoi ce changement ?

Dans ma jeunesse, j'ai eu l'occasion de travailler dans un gameshop, une boutique de jeux vidéo, c'était à l'époque où la PlayStation 2 venait de sortir et il y avait plein de jeux d'action, de tir, d'aventure... C'est un genre que j'ai toujours beaucoup apprécié. Quand les jeux DanganRonpa ont commencé à être reconnus et à gagner un peu en prestance, je pouvais avoir un peu plus de liberté d'action, et c'est à ce moment-là que j'ai décidé d'en profiter et de sauter sur l'occasion pour faire un jeu d'action comme je les aime.


Pourquoi, dans ce jeu, avoir fait le choix d'offrir en ennemis des enfants ayant le contrôle de la ville et voulant créer un paradis des enfants ?

Une chose me fascine : l'innocence des enfants, que je trouve effrayante. Il y a toujours des enfants qui, par exemple, peuvent se mettre à écraser des fourmis juste parce que c'est amusant. C'est quelque chose qui m'a toujours intrigué, et j'ai donc décidé de l'exploiter dans un jeu.



Aujourd'hui vous êtes ici pour présenter Danganronpa V3: Killing Harmony, le 3ème opus majeur de la saga. Pouvez-vous nous le présenter ? Quels seront ses grands thèmes ? Sur quels points avez-vous cherché, dans ce jeu, à renouveler les choses par rapport aux précédents opus ?

Comparé aux autres, ce nouvel opus est indépendant : pas besoin d'avoir joué au 1 ou au 2 pour saisir l'univers et l'histoire. C'est un monde totalement différent, avec de nouveaux joueurs.

Les thèmes de l'espoir et du désespoir sont toujours là, mais il y en a un nouveau qui est omniprésent : celui du mensonge. On est sans cesse tiraillé par des contre-pieds qui nous mettent dans des positions d'incapacité à savoir si l'on est dans le vrai ou dans le faux. Notre vision des choses change tout le temps, et je pense que c'est l'élément le plus important du jeu.

Ensuite, dans les points forts, je pense que c'est une expérience que l'on ne peut avoir que dans un jeu vidéo, et pas dans un animé par exemple.

Je dirais aussi que c'est une expérience qui ne peut avoir lieu que dans la saga DanganRonpa.

Le seul problème avec ce jeu, c'est que quand on me demande quel point précis est amusant, je ne peux pas répondre car je serais obligé de spoiler et de saper l'intérêt du jeu. Du coup, en faire la promo est difficile (rires).



DanganRonpa s'est décliné en animés. On sait que vous avez supervisé Danganronpa 3: The End of Hope’s Peak High School. Quel rôle avez-vous tenu dessus exactement ? Et d'où est venue l'idée de diviser la série en 2 arcs (Despair et Future) diffusés en même temps ?

A l'époque, avant le dessin animé, j'avais l'intention de sortie le 3ème jeu qui était déjà prévu pour être dans un nouvel univers. Du coup, on s'est demandés comment clore l'histoire des deux premiers jeux, et on a décidé de le faire en animé.

S'en est suivie la création de la série sortie l'an dernier, et étant donné que c'est une sorte de conclusion aux jeux DanganRonpa 1 et 2, on a eu l'idée de la diviser en deux avec d'un côté le thème du passé et de l'autre le thème du futur, et on a proposé quelque chose qui n'avait jamais été fait : diffuser l'animé deux fois par semaine. C'était la première fois que ça se faisait au Japon, et ça nous a permis de nous démarquer un petit peu.


Et avez-vous eu un rôle sur Danganronpa - The animation diffusé en 2013 ?

Je n'ai pas eu un rôle créatif, mais plus un rôle de vérification : voir si le scénario correspondait bien, voir si les phrases correspondaient bien à celles du jeu...



On vous connaît aussi pour être le scénariste du manga Guren Five, paru en France aux éditions Doki-Doki. Comment avez-vous imaginé le scénario de ce manga ?

Toujours aimé les mangas de yankees, de lycéens un peu loubards, ainsi que tout ce qui est sentai à la Bioman. C'est comme ça que j'ai eu l'idée de mixer les deux pour donner Guren Five.


Comment avez-vous procédé pour créer les personnages, et comment s'est déroulée la collaboration d'abord avec le character designer original Yûki Kodama, puis avec le dessinateur Riku Shinoda ?

A la base, c'est l'un des rédacteurs en chef du magazine dans lequel travaillaient les dessinateurs qui me connaissait. Il m'a proposé l'idée, et comme je voulais faire une histoire mélangeant yankee et sentai, il m'a mis en contact avec messieurs Kodama et Shinoda.

J'ai également participé au manga Killer Killer, mettant en scène un tueur en série qui ne tue que des tueurs en série.



Pour finir : à votre avis, qu'est-ce qui plaît tant dans les jeux DanganRonpa ?

Je pense qu'il n'y a pas forcément juste une raison précise, mais plutôt différentes choses.

Un élément auquel j'ai fait très attention, c'est de construire une histoire comme des montagnes russes. Par exemple, un drame se passe, puis juste après il y a une scène comique... j'ai voulu mettre beaucoup de variations pour ne pas lasser le joueur.

Je fais aussi très attention à ne pas créer de scènes où il ne se passe rien. Il y a toujours des scènes d'explications, mais même là je veux mettre en valeur les personnages qui parlent, en soulignant certaines de ses qualités par exemple, toujours pour pouvoir offrir une histoire qui accroche.

Je porte aussi énormément d'attention à la conception de mes personnages, pour que tous les joueurs puissent un peu trouver en eux leur personnage préféré.


Interview réalisée par Koiwai. Remerciements à Kazutaka Kodaka, à son interprète (et traducteur de DanganRonpa 3) Nicolas Pujol, à l'équipe de Koch Media pour la mise en place de cette rencontre, et à Japan Expo.

Mise en ligne le 24/07/2017.