KANNO Kenji - Actualité manga

Interview de l'auteur

Publiée le Mardi, 21 Avril 2015

Parmi les nombreux invités de sa scène vidéoludique, Japan Expo 15ème Impact accueillait Kenji Kanno, officiant pour la firme Sega, et principalement connu pour une saga qui aura coûté bien des "coins" aux joueurs d'arcade : Crazy Taxi ! Venu présenter la version mobile du jeu, le développeur est revenu sur le succès de cette licence très appréciée par les connaisseurs...
    
   
  
    
Bonjour M. Kanno et merci pour cet entretient. Pour commencer, pouvez-vous nous dire comment vous avez eu l'envie d'intégrer le monde des jeux vidéo ?
A l'origine, je souhaiter concevoir des salles d'arcade pour des parcs d'attractions, mais c'est un domaine relativement clos avec des plannings très complexes. Je me suis alors tourné vers des sociétés de jeu vidéo, qui avaient pour projet de monter des salles. J'ai été engagé chez Sega et, par la force des choses, j'ai fini par faire des jeux vidéo chez eux. 
    
    
Au début de votre carrière, vous avez travaillé sur l'adaptation de Jurassic Park en borne d'arcade. Quel a été votre rôle sur ce jeu ?
J'ai d'abord été engagé sur ce jeu comme assistant-réalisateur. Comme je touchais à tout sur le projet, je suis allé voir mon patron en bombant le torse et j'ai réussi à être promu réalisateur principal sur la fin du développement.
   
     
    
    
Vous êtes surtout connu pour la saga des Crazy Taxi. Comment est née l'idée de ce jeu ? 
L'idée de Crazy Taxi m'est venue lors d'un jour de repos, où je suis parti faire une virée avec ma voiture. Je me suis retrouvée sur une autoroute complètement bondée, alors que la voie d'en-face était complètement déserte. Frustré, je m'imaginais traverser le terre-plein pour aller sur la voie d'en face et pouvoir rouler à toute allure à contresens ! Mais je pense que tout les automobilistes du bouchon rêvaient de la même chose, c'est ainsi que je me suis dit qu'un jeu exploitant ce concept pourrait intéresser beaucoup de monde, et Crazy Taxi est né.
  
  
Selon vous, quels sont les ingrédients essentiels qui ont contribué au succès de la série ?
Généralement, lorsque l'on pense à un jeu de voiture, on a tout de suite en tête un jeu de course, de circuits. A l'époque, ce genre de jeu étaient légion, et je commençais à en avoir assez de ce concept. Je voulais donc créer un jeu différent des autres, où l'on pouvait faire autre chose que rouler simplement sur une boucle en dépassant ses concurrents. Crazy Taxi a trouvé son public car c'était un pionnier d'un nouveau genre.
  
  
   
   
Le jeu est d'abord sorti en arcade, avec un système de parties assez courtes, puis sur Dreamcast. Comment avez-vous procédé pour faire ressentir au joueur console le frisson de l'arcade ?
C'est vrai qu'au début, j'ai eu des doutes sur l'efficacité succès de la conversion sur consoles. Sur la version originale, on joue débout, pendant quelques minutes, et on passe à autre chose. Alors que la console était plutôt synonyme de jeux posés, longs, comme les jeux de rôle. Finalement, la version console a connu un franc succès aussi, notamment auprès des salarymen souhaitant décompresser en fin de journée avec une petite session ! Et on y revient assez souvent, en fin de compte.
    
     
Crazy Taxi a également connu plusieurs suites et portages sur d'autres consoles. Comment avez-vous entretenu l'originalité de la série au fil des épisodes ?
Très rapidement après la sortie du premier volet, les gens ont réclamé une suite. Il s'agit tout de même d'un jeu assez court, et les gens avaient envie d'en avoir plus. J'ai discuté avec mon supérieur et mon équipe pour chercher de nouvelles idées en vue d'un deuxième opus. Nous en sommes arrivés à l'idée du Crazy Jump, permettant au taxi de sauter et de lui ouvrir de nouveaux chemins.
  
Pour le troisième volet qui est sorti sur Xbox, nous ne pouvions plus travailler sur une machine Sega. Mais nous avons cherché à tirer parti des capacités graphiques de la console. Nous avons également rajouté le passage jour/nuit, qui contribue à cette amélioration esthétique et qui permet quelques modifications sur l'environnement.
   
    
  
   
   
Depuis peu, nous pouvons découvrir Crazy Taxi : City Rush, qui est sorti sur smartphones. Qu'est-ce qui vous a motivé vers ce nouveau portage ? Quels sont les apports de cette version ?
Crazy Taxi a maintenant quinze ans, et n'est pas connu des jeunes générations. Nous souhaitions le remettre au goût du jour, et je me suis rappelé de ses points forts : son accessibilité et la rapidité de ses parties. Le format smartphone nous a paru le plus adapté, au vu des nouvelles habitudes des joueurs. Tout le monde peut s'y essayer et faire quelques parties courtes. 
   
   
L'aspect « openworld » présent dès le premier jeu de votre saga, est devenu de plus en plus populaire au fil des années. Pensez-vous exploiter davantage cet aspect dans un potentiel futur épisode ?
Étonnamment, c'est une question qui revient assez souvent dans les interviews que j'ai fait ici et lors de mon dernier passage en Angleterre. Je n'y pensais pas vraiment, mais visiblement il y a de l'attente, alors je vais y réfléchir en rentrant au Japon ! (rires)
   
   
Dans le monde de l'arcade, vous avez proposé des jeux avec des contrôleurs de jeux souvent originaux. Qu'est-ce que vous pensez de l'évolution du monde de l'arcade ?
Les salles d'arcade sont hélas en déclin sur ces dernières années. Les habitudes des joueurs ont changé via les nouvelles technologies, et notre rapport au jeu a évolué. Maintenant, il suffit de sortir son téléphone de sa poche pour jouer. Cependant, je pense que les Game Centers ont toujours un intérêt, car elles représentent toujours un lieu de rencontre, de rivalité, d'échanges entre passionnés. Si je devais retravailler pour l'arcade, je me tournerais vers cet aspect-là.  
  
   
Etes-vous inspiré par les nouvelles façons de jouer instaurées par les dernières générations de consoles, ou par des technologies d'avenir comme l'Occulus Rit ? 
Pour l'Occulus Rift, je ne connais pas encore assez bien le dispositif pour vous donner un avis. Par contre, je suis bien sur ouvert aux derniers apports dans le monde du jeu vidéo. Après, j'ai déjà beaucoup de projets en cours et je ne peux hélas pas tout faire ! 
  
    
Pour finir, avez-vous, vous même, été la victime d'un « crazy taxi » ?
Et bien oui ! Après la sortie du troisième jeu, j'ai fait quelques séjours à Las Vegas. Une fois, je suis monté dans un taxi, et son chauffeur était un danger public : il grillait tous les feux, tournait dans tous les sens, prenait d'obscurs raccourcis,... j'ai vraiment eu la peur de ma vie. Une fois arrivé à destination, le chauffeur s'est retourné vers moi et m'a lancé : « I'm a Crazy Taxi, man ! »
Bien sur, il n'y avait aucune chance pour qu'il sache qui j'étais ! (rires)
   
      
Remerciements à Kenji Kanno, à son interprète, ainsi qu'aux équipes de Sega et de Japan Expo.
  
Mise en ligne le 21/04/2015.