GORGES Florent - Actualité manga

Interview de l'auteur

Publiée le Lundi, 29 Septembre 2008

Florent Gorges est le gérant des éditions Pix'n Love. Il est l'auteur du recueil L'Histoire de Nintendo, dont le premier volume retrace en 228 pages plus de 350 jouets en partant des cartes à jouer jusqu'aux Game & Watch. Dans le cadre du Festival du Jeu Vidéo 2008, nous avons réussi à l'interviewer après une brève discussion sur le stand MO5.COM.



MN : Combien d’années de recherches ont été nécessaires à la réalisation de ce livre ?

MN : Six ans de recherches directement au Japon, avec l’aide de différentes personnes, aussi bien des anciens employés que des collectionneurs, des journalistes, anciens et actuels... Et énormément de passion.



MN : Sur la première de couverture, on peut voir une machine de Nintendo qui est inconnue du public européen. Elle a notamment servi dans le kit de presse de soutien à MO5.COM. Que pouvez-vous nous en dire ?

MN : La machine s’appelle la Block Kuzushi. C’est une console sortie en 1978 chez Nintendo et qui est en fait un casse-briques assez rudimentaires, avec la possibilité de switcher entre six modes de jeu. A cette époque évidemment, les consoles de jeu n’avaient pas de cartouches. Il en existait, mais Nintendo n’en faisait pas encore d’interchangeables. La Block Kuzushi fait partie des produits phares de Nintendo d’avant les années 80, qui est une période assez oubliée.

MN : Et donc c’est sur cette partie de l’histoire, assez peu relatée, que vous avez entrepris vos recherches ?

MN : Voilà. Généralement, sur Internet, cette histoire est résumée en trois lignes avec la naissance de la firme en 1889, les jeux de cartes et la création des Game & Watch en 1980. J’ai donc entrepris mes recherches sur cette période que personne ne connaissait et on a réussi à en faire 200 pages.

MN : On parle aussi beaucoup du Love Tester dans cette période de Nintendo…

MN : Le Love Tester, c’est un des jouets les plus connus des fans de Nintendo. Il suffit d’aller sur Wikipédia pour trouver une page, mais il n’y a pas d'infos, rien, on ne sait pas comment s’en servir. Dans L’Histoire de Nintendo, il est montré avec des extraits de pubs de l’époque. On y explique le contexte, son histoire, comment s’en servir, et donc la finalité du produit.



MN : Lorsque l’on feuillette un peu l’ouvrage, on se rend compte que Nintendo n’a pas fait que des jeux électroniques et des cartes à jouer. Je prends un exemple concret : la poussette ?

FG : Nintendo a eu, au cours de son histoire, de grands moments de remise en cause. Ils se sont un petit peu éloignés de leur concept de cartes à jouer, à cause d’un marché du jeu à l’époque assez fébrile. Il y avait énormément de concurrence, notamment avec Bandai qui dominait complètement le marché. Nintendo était un tout petit acteur, il ne se sentait pas trop en confiance dans ce marché, donc il a essayé de se diversifier en réalisant des produits jugés plus utiles. Avec la crise, les jouets étaient le dernier maillon et les gens n’en achetaient pas. Ils se sont alors lancés dans des produits pour la petite enfance ou des produits de bureau avec la poussette, justement, mais aussi des imprimantes. Ils ont même fait dans l’agroalimentaire avec du riz instantané, des condiments, des nouilles à réchauffer, et tout ça est présenté dans le livre.

MN : Vous nous avez dit vous être renseigné auprès de journalistes et de passionnés, mais dans le cas des nouilles par exemple : comment retrouver un tel produit après tant d’années ?

FG : Comme pour n’importe quel travail de recherche, sur les tombeaux d’Égypte, les fakirs, etc., il suffit simplement de chercher des documents. Quand on en trouve un, généralement on le scrute, on l’ausculte, et on se rend compte qu’il y a des indices qui nous guident vers d’autres voies. C’est un véritable travail d’enquête.

MN : Est-ce qu’un document en particulier vous a permis de fouiller à la manière d’un archéologue ?

FG : Il nous est arrivé un moment où on a trouvé un document, qui nous a permis de bien avancer. C’était un listing destiné aux professionnels du jeu et des salles de jeu. Une liste des jeux Nintendo disponibles pour les salles. Or il s’est avéré, à cette époque, que l’on connaissait uniquement les Donkey Kong et compagnie. En regardant le listing, on a trouvé des titres qui nous étaient inconnus. Par la suite, en rencontrant des gens de chez Nintendo, on a pu leur poser des questions sur ces jeux et justement, c’est à cause d’un problème de rentabilité qu’ils ne sont jamais sortis.

MN : Y a-t-il également une part de chance dans vos recherches ?

FG : Lorsqu’on trouve un document sur lequel on a d’autres indices, c’est du hasard. C’est un vrai puzzle, on arrive à trouver des petits morceaux à droite, à gauche, et puis quand on les met ensemble on a un bouquin. Et des documents, on en trouve encore aujourd’hui.

MN : En partant de cela, vous pourriez remettre à jour votre livre si vous trouviez d’autres éléments sur cette période ?

FG : C’est possible dans un ou deux ans. Si on a suffisamment de nouveaux contenus, on rajoutera certainement des pages. Ce sera une réactualisation du premier tome.

MN : Comptez-vous faire plusieurs volumes ?

FG : Effectivement, le volume 2 sera sur les Game & Watch, le 3 sur la NES, le 4 sur la Game Boy et puis, ainsi de suite Super NES, Virtual Boy, N64, jusqu’à la fin.

MN : Et donc, ce premier tome est vraiment le livre à se procurer pour ceux qui souhaiteraient savoir ce qu’est Nintendo en dehors des consoles ?

MN : Ça peut paraître un peu prétentieux, mais ça reste un ouvrage unique au monde. Dans le sens où, au Japon, personne n’a été aussi loin dans les recherches. Il existe bien sûr des livres sur l’histoire de Nintendo, mais sans aucune illustration, pour différentes raisons. Même aux Etats-Unis, il existe un très bon bouquin qui s’appelle Game Over, mais qui se concentre uniquement sur l’histoire américaine de Nintendo. Ainsi, on ne connaît pratiquement rien de l’histoire japonaise et L'Histoire de Nintendo de Pix’n Love est le seul véritable ouvrage. Il n’y en a pas en langue japonaise. On peut dire que c’est une exclusivité dans le sens où on est les seuls à avoir été autorisés à le faire.